Groupe de protection sociale, Apicil prend une place croissante sur le marché de l’assurance-vie et des services financiers. Sa diversification s’opère tous azimuts, avec pour coeur de cible, les CGP via la marque Intencial Patrimoine. Tour d’horizon avec Renaud Célié, directeur général adjoint épargne et services financiers du groupe Apicil.
Investissement Conseils : Parlez-nous de votre positionnement sur le marché de l’épargne.
Renaud Célié : Apicil est le troisième groupe de protection sociale en France, déployant son activité sur les terrains de la santé, de la prévoyance, de l’épargne et de la retraite. Notre ancrage territorial d’origine lyonnaise est fort, mais avec un rayonnement national, et même international, et se décline dans notre politique RSE. La volonté de développer l’épargne individuelle, qui est une spécificité dans le monde de la protection sociale, fut prise au début des années 2010. L’épargne et les services financiers pesaient alors 2 Md€ dans le groupe, c’est aujourd’hui plus de 20 Md€ et une collecte de 2 Md€. L’activité couvre désormais l’assurance-vie en France et au Luxembourg, la banque, et l’asset management.
Pourquoi cette volonté d’accroître votre présence en épargne individuelle ?
Pour trois raisons. La première, la taille critique. Seconde raison, l’orientation vers les UC; elle fait partie de notre stratégie globale sur l’épargne, c’est une trajectoire de longue durée. L’acquisition de Skandia et de ses activités en France et au Luxembourg, il y a quelques années, allait dans ce sens pour détenir un savoir-faire en la matière. Enfin, troisième point, l’élargissement de nos cibles clients au travers de nos différents réseaux. Outre notre marque Intencial Patrimoine dédiée aux CGP et à leurs clients, qui représente la moitié de notre collecte, nous avons eu l’ambition de développer un réseau salarié de conseillers patrimoniaux, Gresham Banque Privée, issu de l’acquisition de la société Legal & General. L’acquisition de OneLife Lux est le dernier volet de notre diversification. Nous avons donc créé un écosystème dans lequel Apicil propose une gamme de produits:l’assurance-vie, en France comme au Luxembourg, des solutions bancaires, avec aussi des solutions financières proposées par Apicil Asset Management et Equitim pour les produits structurés. Ajoutons que nous redéveloppons aussi la commercialisation en direct via Apicil Connect, pour toucher le mass market. En résumé, le groupe Apicil couvre l’ensemble du marché, du mass market à la gestion de fortune, au travers de marques et de réseaux spécialisés.
Revenons à Intencial Patrimoine. Que recouvre cette identité ?
Intencial Patrimoine est né en 2016 du rapprochement de Skandia et de Courtage & Systèmes. C’est aujourd’hui notre bannière, notre marque unique dédiée au marché des CGP, bien identifiée par le marché. En cinq ans, nous avons doublé notre collecte sur ce terrain. Tous les engagements d’épargne-retraite seront prochainement gérés par Apicil Epargne Retraite, ceux d’assurance-vie par Apicil Epargne, et ceux propres au Luxembourg par One Life Lux. Notre marque est désormais bien installée, nous travaillons activement avec huit-cent-cinquante CGP et cette part croît chaque année. Nous avons une équipe de cinq inspecteurs régionaux qui réunissent régulièrement les CGP, mais aussi une équipe d’animation à distance, qui élargit notre périmètre d’action et est source de proposition de valeurs pour les courtiers moins spécialisés en épargne. Notre hub digital unifié dans lequel migrent tous les portefeuilles est un avantage concurrentiel fort, source d’agilité. Nous avons modélisé les process pour tout faire dans un seul et même système. Partant de là, nous sommes capables de faire des produits en marque blanche pour des grands comptes, autre source de notre développement, ou pour les acteurs en ligne. Intencial Patrimoine, c’est la somme de toutes ces facettes.
Comment se décline aujourd’hui votre offre de produits ?
Nous avons un produit clé, le contrat d’assurance-vie Intencial Liberalys Vie. C’est un véritable couteau suisse, avec beaucoup d’options de gestion et une gamme d’unités de compte très large. Mais les offres du marché tendent à fortement se ressembler, c’est donc les services qui vont faire la différence. On insère donc dans notre contrat de nombreux compléments, du service en somme, comme le référencement de produits structurés, une option de gestion multipoches, de la gestion sous mandat, du 100 % digital, etc. Notre PER est la déclinaison de l’assurance-vie avec les ajustements réglementaires propres à l’épargne-retraite, il est aussi proposé en marque blanche à certains distributeurs qui y apposent leur marque, leurs frais. En parallèle, nous avons également la gamme luxembourgeoise avec des offres plus spécifiques. Là aussi, nous nous distinguons, puisque dans notre succursale en France, nous avons un produit bénéficiant du triangle de sécurité. Notre offre ne se limite pas à l’assurance-vie. Sur la partie banque, importante à nos yeux, via Gresham Banque, nous proposons aux CGP des compte-titres et PEA. Tout cela est largement digitalisé, ce qui a permis de développer significativement le transactionnel en ligne ces deux dernières années et donne au CGP une vision globale des avoirs du client.
Parlez-nous d’un point vous distinguant sur le marché : le mode de commissionnement des CGP.
C’est simple, depuis 2019, nous proposons au CGP un mode de commissionnement libre. Nous avons la capacité de délivrer des commissions sur le modèle que le CGP choisira. Trois possibilités s’offrent à lui. Il peut opter pour le modèle standard avec un commissionnement par UC, c’est donc une rémunération du conseil par la sélection de fonds. Autre possibilité, choisir une rémunération selon le taux moyen par groupe d’actifs, ce qui revient à rémunérer le conseil sur l’allocation réalisée. Enfin, troisième option, il peut opter pour des UC sans rétrocession avec les frais apparents au niveau de la poche, ce qu’on appelle la gestion smart. Cette dernière solution permet de prévenir d’éventuels conflits d’intérêts et de garantir la transparence des rémunérations. Nous sommes les seuls à proposer ce choix au CGP, contrat par contrat. Il faut reconnaître que pour l’heure, peu de CGP ont changé de mode de rémunération. Intencial est ainsi partenaire des CGP et leur donne du choix, du service.
A fin 2021, quel regard portez-vous sur le marché de l’assurance-vie ? Sur le fonds en euros ?
Nous avons un alignement d’intérêts entre l’épargnant, le conseiller et l’assureur. S’il veut de la performance, l’épargnant doit faire autre chose que seulement du fonds en euros, il a donc besoin de conseils. Ce qui renforce la valeur ajoutée du conseiller professionnel. Et dans le contexte de Solvabilité II, l’assureur doit se diriger vers d’autres solutions. Nous avons tous vu venir la baisse des taux, aller vers les UC est logique et raisonnable. Le fonds en euros ne va pas disparaître, mais il change de nature, est revisité par les assureurs, c’est une rupture avec le passé. L’assureur ne peut pas continuer d’offrir la garantie en capital permanente, la liquidité et la performance. Notre stratégie chez Apicil est de jouer sur le curseur performance plus que sur la liquidité, de dire que la garantie se paie, donc de faire de la pédagogie. Il est anachronique de faire croire que le fonds en euros, hors fonds en euros atypiques, peut donner de la performance à long terme. Le fonds en euros va maintenant naviguer entre 0,5 et 1 % net client, sauf évolution significative de l’environnement, c’est normal. Il ne doit pas disparaître et peut continuer à représenter 10 à 20 % d’une allocation selon les projets de l’épargnant. Les CGP, mais aussi les épargnants, ont compris cette évolution. Chez nous, la collecte est aujourd’hui de 70 à 80 % sur les UC, et notre stock sous gestion est déjà au-delà de 50 % en UC. Signe de cette évolution, les rachats des clients finaux se font plutôt sur les fonds en euros que sur les unités de compte. L’assurance-vie doit toutefois rester un produit d’assurance, mais avec des garanties cohérentes sur le fonds en euros avec l’environnement, avec des protections comme les garanties plancher en cas de décès, des formes de prévoyance, etc., différentes notions qu’on ne retrouve pas dans les comptetitres. Pour mémoire, la notion de protection de l’épargne est affirmée dans le Code des assurances. L’assureur ne perd pas son âme, la protection de l’assuré doit être conservée, surtout pour un groupe de protection sociale comme Apicil.
Plusieurs rapports publics ont pointé du doigt les frais des produits financiers (1). Qu’en pensez-vous ?
Dans un monde financier complexe, l’épargnant a besoin d’être accompagné, donc d’avoir du conseil. Et ce conseil doit être rémunéré. Les frais rémunèrent une chaîne de valeurs. En revanche, il y a un vrai besoin de transparence et d’une meilleure information sur ce plan. Je ne suis pas convaincu que les réglementations passées aient simplifié le sujet. Chez Apicil, la volonté d’indiquer les frais dans leur totalité est assumée, en toute transparence. Mais dire que c’est trop cher, c’est sans doute un peu rapide. Qui a été résilient pendant la crise de 2020 ? Ceux qui proposaient du service, c’est-à-dire les CGP avec leur proximité des clients. Ce qui compte à la fin, faut-il aussi le rappeler, c’est la performance nette sur l’horizon de placement.
Pour conclure, un mot aux CGP sur 2022 qui pointe…
Tout le monde semble satisfait de son année 2021. Attention, il faut rester prudent et sérieux. Le modèle de développement des CGP a de l’avenir car le conseil a de la valeur. Mais ce qui est important, c’est de savoir modéliser son activité. Demain, il sera très difficile de rester totalement indépendant avec une réglementation et des produits plus complexes. Les CGP doivent choisir des partenaires capables de les accompagner dans les changements réglementaires, avec une certaine agilité. C’est ce qui fait la valeur d’Intencial aujourd’hui.
Propos recueillis par Frédéric Giquel1. Rapport d’information du Sénat sur la protection des épargnants, octobre 2021; rapport sur le nouveau PER du CCSF, juillet 2021.