Protection du patrimoine d’un mineur en cas de décès des parents

24/04/2024 - source : Profession CGP

Par Fidnet, la base documentaire du groupe Harvest

Comment protéger le patrimoine de l’enfant mineur en cas de décès des parents ?

 

En l’absence de prévisions

La gestion des biens d’un enfant mineur est assurée par ses parents, c’est-à-dire ses administrateurs légaux. En cas de décès des parents ou de déchéance de leur autorité parentale et en l’absence d’anticipation :

- si les deux parents sont décédés, le juge aux affaires familiales désigne comme tuteur du mineur, l’ascendant le plus proche (grands-parents, arrière-grands-parents), un membre de la famille ou un proche ;

- si un seul des parents est décédé, le second conserve seul l’administration légale sur le patrimoine de l’enfant.

Or ces personnes désignées ne sont pas nécessairement les plus à même de protéger les intérêts de l’enfant, et en particulier la gestion de son patrimoine, parfois complexe. Plusieurs solutions s’offrent aux parents pour anticiper les conséquences de leur décès et désigner une personne qu’ils estiment apte à gérer les biens de l’enfant, soit par le biais d’un testament, soit par le biais d’un mandat.

En fonction de la solution retenue, la protection pourra être globale (désignation d’un tuteur), limité aux biens (désignation d’un administrateur) ou limitée à certains biens ou certains actes (mandataire).

Remarque : ces dispositions peuvent également être envisagées pour la protection d’un enfant majeur souffrant de handicap.

 

La désignation d’un tuteur par testament

Par testament, le parent peut anticiper la nomination d’un tuteur pour ses enfants mineurs. Il peut s’agir d’un membre de la famille ou non.

Remarque : la tutelle ne se met en place qu’au décès du dernier survivant des parents, contrairement à la désignation d’un tiers administrateur ou la mise en place d’un mandat à effet posthume.

Le tuteur aura la charge de gérer non seulement le patrimoine de l’enfant mineur, mais également de l’accompagner dans les actes de la vie courante. Le mineur conserve néanmoins la possibilité d’engager seul des actes de consommation courants, ainsi que certains actes d’administration et de conservation (ouverture d’un livret A). Les pouvoirs du tuteur se limitent aux actes d’administration et de gestion. L’accord du conseil de famille (ou à défaut du juge aux affaires familiales) sera donc nécessaire pour accomplir certains actes de dispositions (emploi des capitaux du mineur, renonciation à la succession). Le tuteur désigné n’est pas tenu d’accepter cette tutelle, et par précaution il convient d’anticiper la désignation d’un autre tuteur. La tutelle cesse automatiquement à la majorité de l’enfant.

 

La désignation d’un tiers administrateur des biens par testament

Les parents peuvent également prévoir dans leur testament la désignation d’un administrateur concernant les biens légués à l’enfant. Le régime ne devrait s’appliquer qu’aux biens légués (ou donnés) à l’enfant mineur, mais la jurisprudence semble valider le dispositif sur les biens constituant la réserve héréditaire. Les pouvoirs de l’administrateur doivent être définis dans le testament et peuvent s’étendre aux actes de dispositions (vente d’un bien) sans nécessiter l’intervention du juge. A défaut de précisions, il disposera des mêmes pouvoirs que l’administrateur légal. Il est possible de désigner un tuteur testamentaire et un administrateur des biens. L’administrateur prime sur le tuteur dans la gestion des biens légués désignés. En cas de refus ou d’incapacité de l’administrateur, le juge aux affaires familiales désigne un administrateur ad hoc pour le remplacer. Il est possible de désigner un tiers administrateur en présence d’un parent survivant afin d’écarter l’administration légale de ce dernier sur les biens transmis à l’enfant.

Il n’est pas nécessaire d’indiquer les motifs de cette désignation, ni de démontrer qu’elle est prise dans l’intérêt de l’enfant, contrairement à un mandat à effet posthume. Les fonctions du tiers administrateur cessent automatiquement à la majorité de l’enfant. Pour pallier cet inconvénient, il est possible de désigner un mandataire à effet posthume qui pourra poursuivre la gestion des biens après la majorité de l’héritier s’il existe toujours un intérêt légitime et sérieux.

 

La désignation d’un mandataire par un mandat à effet posthume

Ici, le parent donne à une (ou plusieurs) personne le pouvoir d’administrer ou de gérer sa succession dans l’intérêt de certains héritiers. Le mandat doit impérativement être justifié par un intérêt légitime et sérieux. Le mandataire peut accomplir des actes conservatoires, de surveillance et d’administration provisoire. Par exception, il peut également réaliser certains actes d’aliénation :

- ceux définis par la loi elle-même comme constituant des actes conservatoires ou d’administration provisoire ;

- ceux dans le cadre de la gestion des universalités de fait.

Contrairement à la tutelle ou à l’administration testamentaire, le mandat ne prend pas automatiquement fin à la majorité de l’enfant s’il continue à se justifier par un autre motif que la minorité de l’héritier (ce qui peut notamment être le cas en présence d’une entreprise ou d’une société). En revanche, la vente des biens mets fin au mandat. Or le mandat ne peut pas empêcher l’administrateur légal de vendre les biens.

 

La désignation d’un mandataire par un mandat de protection future (MPF)

Le mandat de protection future pour autrui ne semble, a priori, possible que pour les enfants mineurs atteints d’une altération de ses facultés mentales. Les pouvoirs du mandataire s’étendent aux actes portant sur le patrimoine et sur la personne. Les pouvoirs du mandataire sur le patrimoine sont similaires à ceux du tuteur (acte d’administration et de conservation). Il peut néanmoins obtenir l’autorisation du juge pour certains actes de disposition. Le mandat peut se poursuivre à la majorité de l’enfant handicapé.

 

Références

C. civ., art. 403 ; C. civ. art 448 ; C. civ., art. 504 et suiv. ; C. civ., art. 384; C. civ., art. 395 et 396 ; C. civ., 812 et suiv.; C. civ., art. 425 & 477 et suiv. ; C. civ., art. 490 et suiv. ; Cass. 1re civ., 11 févr. 2015, n° 13-27.58 ; Cass. 1re civ., 26 juin 2013, n° 11-25.946 ; Cass. 1re civ., 12 mai 2010, n° 09-10.556.