Prévoyance  : faire simple et efficace

01/12/2024 - source : Investissement Conseils

La gestion d’un patrimoine ne se limite pas à sa valorisation. Il faut aussi prendre les bonnes dispositions pour protéger au mieux ses proches et son entreprise. Explications et solutions.

En France, 15 % des décès ont lieu avant soixante-cinq ans (1). On dénombre aussi près d’un million de personnes recevant une pension d’invalidité (2). Ces deux statistiques mettent les pieds dans le plat de la prévoyance, le parent pauvre de la gestion de patrimoine dans les pays latins, France incluse donc. « La prévoyance est un sujet qui fait peur, que les gens ont tendance à repousser, sur lequel ils sont aussi mal informés, et qu’ils perçoivent comme une charge financière, analyse Jean-Baptiste Omnes, directeur de la prévoyance chez MetLife. On préfère couvrir ses biens que sa personne, c’est une erreur ! Pour inverser la donne et susciter une prise de conscience, il faut se poser les bonnes questions. Si je suis gravement malade et/ou invalide, avec l’impossibilité de travailler, quels seront mes revenus ? Et pendant quelle durée je pourrais ainsi tenir ? Si je décède, qu’est-ce que je laisse à ma famille pour vivre ? Et pendant combien de temps cela lui suffira-t-il  ? Chacun devrait se poser ces questions régulièrement, aller chercher les infos auprès du service ressources humaines de son entreprise pour les salariés, auprès des régimes obligatoires pour les travailleurs non-salariés, ou de son assureur, en amont et non une fois le sinistre survenu. Au vu des réponses, sans prendre de dispositions complémentaires, beaucoup de ménages s’apercevront de l’insuffisance de leur couverture, tant la prévoyance est la grande absente des systèmes de protection français. »

La chasse aux idées reçuesPrevoyance faire simple et efficace 03Le décor est posé. Mais envisager le pire n’étant pas très agréable, peu de gens veulent entreprendre un tel bilan prévoyance. Puis dans l’imaginaire collectif, la protection sociale reste globalement du ressort de l’Etat et va pourvoir à l’essentiel. C’est loin d’être le cas. Illustration avec les prestations publiques en cas de décès : la Sécurité sociale verse aux ayants droit d’un salarié décédé un maigre capital de 3 910 euros (montant 2024). Une somme portée à 9 273 euros pour les travailleurs non-salariés (TNS). Quant aux fonctionnaires décédés avant l’âge légal du départ à la retraite, ses ayants droit perçoivent sa dernière rémunération annuelle (indemnités comprises). Même si elles ne sont pas fiscalisées, ni soumises aux cotisations sociales et droits de succession, ces sommes seront-elles suffisantes pour la famille ? Probablement pas.Foi de sondages, le déficit d’information sur cette thématique est important dans toutes les strates de la population. Exemple : selon le récent baromètre MetLife-CSA 2024 sur la prévoyance des TNS et dirigeants de TPE, ces derniers « se sentent mal protégés par leur régime obligatoire (en moyenne 70 %), mais très peu d’entre eux connaissent leur niveau de couverture réel (19 % pour le décès et 31 % pour les indemnités journalières). » Les pharmaciens, vétérinaires ou notaires savent-ils par exemple qu’ils ne perçoivent aucune indemnité journalière après quatre-vingt-dix jours suite à un arrêt de travail ? Au manque d’informations s’ajoute son lot de confusions. Les régimes publics obligatoires, nous l’avons vu, sont insuffisants. Et chacun de s’en remettre aux assurances privées.Quid de la complémentaire santé pour commencer ? Elle ne prend en charge que le remboursement des frais de soins. De la garantie conducteur de l’assurance auto ? Elle attribue bien un capital aux proches en cas de décès de l’assuré, mais uniquement si ce dernier a eu un accident avec son véhicule. De la carte bancaire ? Une couverture décès y est parfois incluse, mais limitée à un accident en lien avec l’utilisation de la carte. Quid enfin de la responsabilité civile de la multirisque habitation ? Elle ne couvre que les dommages causés par l’assuré à autrui. Autant de protections très partielles…

Les TNS… et les retraitésPour y voir clair sur sa protection globale (famille et professionnelle), il faut savoir changer son angle d’approche. « Le point de départ est de prendre conscience du risque décès/invalidité et de ses conséquences financières, fortement sous-estimées chez la plupart d’entre nous, appuie Amandine Rebecq, responsable marketing chez Alptis. Pour y parvenir, la situation professionnelle est un élément incontournable pour étudier sa protection financière. Les personnes à leur compte n’ont pas la même protection sociale que les salariés, ils sont rattachés à de multiples régimes, dont les prestations pour décès, invalidité, arrêt de travail sont très variables mais souvent insuffisantes. Le salarié est, lui, souvent couvert par un contrat collectif, encore faudra-t-il le vérifier, contrairement au cadre qui est systématiquement couvert, loi oblige, et ensuite faire un point précis sur le contenu des garanties. » Rappelons ici que la convention collective des cadres (du 14 mars 1947) oblige les employeurs à consacrer au minimum 1,5 % des salaires au financement d’une assurance-décès. Les capitaux perçus peuvent représenter jusqu’à 400 % du salaire brut annuel, avec des majorations possibles dans certains contrats de prévoyance collective. Attention, cette couverture est facultative pour les non-cadres, et bien sûr, ne dure que tant que le salarié travaille !Et les retraités ? « A la retraite, la prévoyance a encore du sens même si le coût est plus élevé compte tenu de l’âge des assurés, souligne Delphine Sibony, directrice générale de Nevidis. Le but est ici de sécuriser la transmission du patrimoine, en permettant par exemple aux héritiers de pouvoir régler tout ou partie des droits de succession sans devoir vendre le patrimoine immobilier dans l’urgence. » C’est, en effet, l’objectif prioritaire des seniors, même si les contrats obsèques et dépendance font partie de ce qui leur est proposé. « Pour le retraité, il est souvent tard pour souscrire certains produits de prévoyance dans les meilleures conditions, tant au niveau tarif que conditions médicales, comme une assurance-dépendance, complète Amandine Rebecq. C’est ici le niveau de patrimoine atteint et ses capacités financières qui vont, oui ou non, entraîner la souscription d’un produit de prévoyance individuel. »

S’assurer ou épargner  ?Par méconnaissance, mais aussi par frein psychologique – il est peu réjouissant d’anticiper sa mort ou son invalidité –, la protection familiale et professionnelle se retrouve donc au milieu du gué. Que faire ? « Inutile de tourner autour du pot, la seule réponse immédiate pour une protection solide et durable est l’assurance, affirme Jean-Baptiste Omnes. Seules les compagnies peuvent prévoir des garanties élevées face aux accidents de la vie. Nous sommes ici dans l’assurance pure, qui couvre des risques importants, avec une mutualisation des primes perçues. Partant de là, simplifions le discours en évitant de le rendre trop technique et allons droit au but. Il existe trois garanties de base en prévoyance que sont le décès, l’invalidité et l’incapacité de travail. C’est le pack de départ, pour lequel il faut avoir une protection, et qu’on va ensuite moduler selon sa situation. » C’est l’avis de nombreux experts. Problème : l’assurance-décès est à fonds perdu, selon l’expression consacrée. En face, l’épargne est évidemment plus attrayante. Mais peut-on vraiment se protéger en mettant de l’argent de côté ? Beaucoup de pros y voient une fausse bonne idée, puisqu’épargner ne permettra pas de constituer un capital épais avant de nombreuses années. Illustration : si je verse 100 euros par mois dans un placement rapportant 3 % par an, j’aurai accumulé 22 624 euros au bout de quinze années. Et si je pousse à 200 euros par mois, ce sera 45 248 euros. Suffisant ? Non, l’enjeu n’est pas que mes proches disposent de quelques milliers d’euros pour payer les funérailles ou les droits de succession. Il est de ne pas alourdir leur douleur affective de charges financières lourdes et durables. Surtout, ce capital ne sera pas atteint avant de nombreuses années, alors que l’assurance décès couvre immédiatement (sauf délais de carence).Une approche combinée est donc préférable, comme l’explique Gaultier Laurier, directeur des Solutions Patrimoniales chez Abeille Assurances : « La prévoyance a vocation à sécuriser des revenus immédiats, par la création de revenus de substitution qui viennent en complément des régimes obligatoires. Le but n’est autre que de maintenir le niveau de vie, mais aussi son cadre de vie, notamment immobilier avec une assurance de prêt efficace. Mais c’est un dispositif à fonds perdu, qui ne doit donc pas durer trop longtemps. C’est pourquoi il faut en parallèle organiser son épargne, construire son patrimoine avec une poche de trésorerie suffisante et disponible pour prendre le relais de la prévoyance. »

Pas de formule globalePartant de là, il faut maintenant se frotter à l’offre du marché. Là, premier écueil : il n’existe pas un contrat global couvrant toutes les situations. Au contraire, l’ensemble est dispersé, avec de multiples produits, dont les garanties se chevauchent entre elles, donnant l’impression aux particuliers d’être assurés plusieurs fois pour le même risque.Pour les assureurs, il y a ici un vrai travail de simplification à faire, nous ont confiés plusieurs courtiers spécialisés. Pour les familles, il faut partir de l’indispensable bilan à réaliser en cas de coup dur, une projection finalement assez simple à mener. Puis souscrire les contrats adaptés. Prenons l’achat immobilier, un moment fort de l’existence. L’acte de prévoyance élémentaire est de couvrir sa capacité à rembourser son emprunt, donc de s’assurer pour ce risque. Or, on constate que la question de l’assurance reste encore mal traitée, en bout de course lors de l’obtention du prêt. Une bonne couverture est pourtant indispensable, chacun imaginant facilement les conséquences en cas de décès ou d’invalidité de l’emprunteur.Faire le tri est donc nécessaire. « Il existe des solutions assurantielles simples pour protéger le patrimoine personnel et professionnel, estime Delphine Sibony. Le bon choix va dépendre de la situation de la personne, tels que son âge, son statut professionnel, sa situation familiale, l’état de son patrimoine ou encore son état de santé. Il faut aussi se poser les bonnes questions. Prenons le cas d’un chef d’entreprise : il doit d’abord s’interroger sur les conséquences d’une incapacité de travail sur ses revenus, son train de vie et celui de sa famille. Mais il doit également protéger son patrimoine professionnel. » Deux volets se dessinent ici. D’un côté, la famille, pour laquelle la couverture incontournable est l’assurance temporaire décès. Son objet est de laisser un capital substantiel à ses proches en cas de décès prématuré ou d’invalidité définitive. Son montant ? Chacun en décide à la souscription et le module si besoin par la suite. De l’avis des spécialistes, il faut compter au moins trois ans de salaire pour assurer la base de rémunération d’un foyer et lui permettre de se retourner. Et viser de 100 000 à 200 000 euros pour sécuriser son avenir. Le coût de “ cette assurance, si elle est bien choisie, est modeste, notamment pour les moins de quarante-cinq ans. Voilà pourquoi les actuaires disent qu’il s’agit d’une « grande protection à petit prix », qui plus est souple puisque modifiable/et ou résiliable chaque année.Bref, l’assurance temporaire décès est adaptée à des besoins de couverture précis, limités dans le temps. C’est le point de départ de la prévoyance.Autre volet, l’entreprise. Arrêt de travail prolongé, invalidité, décès, les accidents de la vie frappent aussi les dirigeants (salariés ou non), avec des conséquences lourdes pour leur entreprise comme pour leur famille. Une bonne protection passera par une mise à plat des enjeux et le recours à des outils, notamment assurantiels, adéquats. Pour protéger ses revenus, il suffit de souscrire une assurance couvrant l’arrêt de travail et l’invalidité. Des indemnités journalières seront alors versées, une rente en cas d’invalidité. Ce contrat est à la base de la protection du chef d’entreprise, notamment le TNS. Il existe aussi des contrats et garanties spécifiques permettant de protéger l’entreprise et la pérennité de son activité. Le contrat homme clé est une réponse adaptée pour sécuriser le compte de résultat, qui sera affecté par l’indisponibilité du dirigeant, et donc pour pérenniser l’activité de l’entreprise. L’assuré du contrat est bien le chef d’entreprise, mais le souscripteur est la personne morale, qui est destinataire des capitaux en cas de sinistre. Citons encore le contrat croisé associé, qui permet de protéger tous les associés. Si l’un d’eux décède ou est invalide, un capital sera versé aux autres associés, leur permettant par exemple de racheter les parts des héritiers du défunt pour éviter une situation de blocage.

Des avantages méconnusSur le papier, une fois ces éléments factuels posés, chacun est convaincu de l’utilité, sinon de la nécessité de souscrire une assurance. Dans les faits, le passage à l’acte est loin d’être automatique.D’où l’idée d’aller plus loin dans le discours. « Il faut rappeler certains points très attractifs des contrats de prévoyance, avance Gaultier Lauriau. D’abord, avec une assurance-décès, on désigne librement le (ou les) bénéficiaire du capital. Tout est ici possible, comme avec l’assurance-vie. On peut parfaitement rédiger une clause bénéficiaire démembrée entre le conjoint usufruitier et les enfants nus-propriétaires, même si c’est à éviter dans le cas des familles recomposées. Il est regrettable de constater que très souvent, les contrats de prévoyance sont souscrits avec la clause standard-type désignant le conjoint comme bénéficiaire. Ensuite, fiscalement, le capital-décès est en pratique exonéré de droits de succession dès lors que les primes sont versées avant soixante-dix ans. C’est donc une solution optimale pour laisser une somme d’argent significative à ses enfants, par exemple, pour qu’ils soient en mesure de régler les droits de succession, évitant ainsi de vendre les biens immobiliers laissés en héritage dans l’urgence. »Après soixante-dix ans ? C’est cette fois l’article 757B du Code général des impôts qui s’applique, avec la réintégration dans l’actif successoral des primes versées après soixante-dix ans sur un contrat d’assurance (vie et décès) après un abattement de 30 500 euros. Exemple : Pierre, un assuré de soixante-treize ans, cotise à une assurance-décès. Sa cotisation annuelle s’élève à 2 500 euros pour une garantie de 120 000 euros. Sa fille est bénéficiaire du capital-décès. Mais il détient aussi une assurance-vie sur laquelle il a versé 100 000 euros après soixante-dix ans. A son décès, le contrat en vaut 150 000 euros. Quelle est la base taxable à son décès ? 2 500 euros de dernière prime annuelle sur l’assurance-décès et 100 000 euros au titre de l’assurance-vie, moins l’abattement de 30 500 euros, soit 72 000 euros taxés aux droits de mutation selon le degré parent-enfant.Dans l’ensemble, la fiscalité appliquée aux produits de prévoyance est assez clémente. Bon à savoir : les capitaux de l’assurance-décès ne sont pas visés par les règles d’imposition aux prélèvements sociaux, conformément à l’article 125-0 A du Code général des impôts. Ajoutons, par ricochet, que les contrats d’assurance-obsèques sont soumis aux mêmes règles fiscales, puisque techniquement il s’agit d’assurances-décès. Idem pour les assurances de prêt immobilier : le remboursement du crédit n’est logiquement pas imposable. Reste la rente-éducation destinée aux enfants (à leur représentant s’ils sont mineurs). Elle échappe à l’impôt, ainsi qu’aux prélèvements sociaux, sauf dans le cas d’un contrat dont les cotisations ont déjà donné lieu à une réduction fiscale (contrat de prévoyance entreprise obligatoire ou contrat souscrit dans le cadre Madelin pour les non-salariés).Concernant les TNS, ils ont accès au cadre Madelin, qui leur permet de déduire leurs cotisations du revenu imposable. Attention, l’imposition sera de mise pour les compensations de perte de revenus, y compris pour un contrat dont les cotisations n’étaient pas déductibles du revenu imposable, ce qu’a confirmé un arrêt de la cour d’appel de Nantes du 19 mars dernier (n° 23NT02189).

Les points d’achoppementMalgré tout, plusieurs écueils retardent le développement de l’assurance-prévoyance en France. Au premier rang, la technicité des produits.L’assurance est affaire de garanties. Il en est une qui ne porte pas à contestation – ou presque – : le décès. Pour les autres, c’est tout l’inverse. Les produits de prévoyance couvrent principalement des états d’invalidité, d’incapacité, de perte d’autonomie, etc.Autant de mots qui peuvent être définis différemment d’un assureur à l’autre. Prenons la notion d’invalidité, source de nombreux litiges. La Sécurité sociale retient pour sa part l’invalidité d’un assuré social quand, après consolidation, son handicap lui a fait perdre au moins les deux tiers de sa capacité de gain ou de travail. Une personne ayant trois ans d’incapacité est du reste automatiquement placée en état d’invalidité. La Sécu détermine ensuite le niveau de cette invalidité, via un médecin conseil, avec trois catégories possibles (la troisième étant l’invalidité la plus sévère). Sauf que les assureurs ne sont pas tenus par cette évaluation de l’organisme public. Chaque compagnie a son médecin conseil qui va déterminer le taux d’invalidité de l’assuré, conformément à son contrat d’assurance. C’est pourquoi on peut être reconnu invalide par la Sécurité sociale et ne pas l’être pas son assureur privé. Ce dernier prend du reste en compte différents types d’invalidité (fonctionnelle, professionnelle) et combine l’ensemble pour indemniser ou non.Un besoin de clarification semble nécessaire. Ainsi la garantie incapacité totale de travail (ITT)/invalidité permanente totale (IPT) correspond-elle à la prise en charge des échéances du prêt en cas d’incapacité de l’emprunteur à travailler. Mais dans le détail, que recouvre la couverture : franchise d’intervention (à partir de quand elle est active ?), nature de la prise en charge (indemnitaire ou forfaitaire ?), définition de l’incapacité (l’exercice de la profession de l’assuré ou de toute profession ?). Selon plusieurs experts, la garantie invalidité permanente totale n’est absolument pas normée d’un assureur à l’autre. Ce qui est évidemment source de litiges d’une part, et par ricochet de méfiance des particuliers.Mais ce n’est pas tout. Les formalités de santé propres aux contrats d’assurance, avec des examens passé un certain âge, sont un obstacle au développement du marché. D’autant qu’elles peuvent aboutir à des surprimes substantielles pour l’assuré.

Quid du prix  ?Reste donc, nous y venons, la tarification des produits, avec des écarts significatifs entre les contrats (ce qui se constate au moyen des comparateurs en ligne), à garanties peu ou prou équivalentes. « Le tarif est bien sûr un élément important, voire un frein, dans la décision de s’assurer ou non », commente Amandine Rebecq. C’est du reste l’élément premier évoqué par 61 % des sondés dans le baromètre MetLife précité. « Nous sommes ici face à un achat contraint et non un achat plaisir, chacun y regarde donc à deux fois avant de s’engager, poursuit Amandine Rebecq. Pour autant, au regard des prestations financières et de services en cas de sinistre, le prix n’est pas très élevé, notamment pour les jeunes actifs. Surtout, il intègre un principe de mutualisation : votre cotisation servira en partie à aider financièrement quelqu’un si ce n’est pas vous (et tant mieux). Ajoutons que les contrats prévoyance incluent aussi de plus en plus des services associés et des actions de prévention, comme des ateliers gratuits pour prendre soin de sa santé, ce à quoi nous croyons fortement chez Alptis pour limiter les risques. »Bien sûr, selon ses revenus, le prix aura plus ou moins d’impact. Selon le Baromètre MetLife-CSA, le taux d’équipement en prévoyance individuelle des TNS ressort ainsi à 79 % pour les revenus de 60 000 euros ou plus et à seulement 39 % pour les revenus inférieurs à 40 000 euros. Il faut aussi en relativiser la portée. « La cotisation à payer par l’assuré reste faible face au risque garanti, ce qui ne doit pas être un obstacle au développement des contrats de prévoyance, nuance Delphine Sibony. Plus on est jeune, moins les cotisations sont élevées. » A trente ans, la cotisation représente en moyenne 0,15 à 0,20 % du capital garanti avec une temporaire décès/invalidité. Soit 150 à 200 euros par an pour 100 000 euros garanti. A quarante ans, c’est deux fois plus. Et à cinquante ans, au moins cinq fois plus qu’à trente ans.On le voit, l’âge influe significativement sur la tarification, le risque de décès/invalidité augmentant avec lui, l’état de santé dégradé pouvant aussi nécessiter des surprimes. A soixante ans, la cotisation est autour de 1,70 %. Soit, cette fois, 1 700 euros par an pour une couverture décès/invalidité à 100 000 euros. Et à soixante-dix ans, 3 450 euros par an (taux de cotisation à 3,45 %). « Le prix est un élément important, bien sûr, confirme Jean-Baptiste Omnes. Il sera d’autant plus élevé que l’assuré opte pour des garanties additionnelles et qu’il est âgé. Pour les seniors, la prévoyance n’est pas à écarter pour autant. D’abord, parce que nombre d’entre eux continuent de travailler après soixante-cinq ans ou pratiquent un cumul emploi-retraite. Ensuite, parce qu’il existe une problématique importante pour eux : les droits de succession que paieront les héritiers. Souscrire un contrat de prévoyance décès dans ce but est envisageable, d’autant qu’on peut aménager la clause bénéficiaire du contrat, avec une désignation libre, et que fiscalement, le capital sera exonéré d’imposition pour le(s) bénéficiaire(s). Notre contrat MetLife peut être souscrit jusqu’à quatre-vingt-cinq ans et couvrir le risque décès jusqu’à quatre-vingt-dix ans. »

Le devoir de conseilLe tableau est complet, mais il y manque un élément : le professionnel. Que peut-on attendre de lui ? « En matière de prévoyance, le rôle du courtier est primordial à plusieurs titres, analyse Amandine Rebecq. D’abord, il saura poser au client les bonnes questions sur sa protection. Par exemple, il l’invitera à avoir une approche globale du risque et à prendre conscience des conséquences financières sur sa vie professionnelle, mais aussi familiale. Ensuite, il est à même de proposer les contrats adéquats, “d’en lire les garanties et exclusions, et de savoir les expliquer. Le courtier connaît aussi les assureurs gestionnaires des contrats, leur capacité de réaction en cas de sinistre, leur expertise dans certains domaines précis, par exemple en matière de dépendance. En somme, le courtier est un relais nécessaire pour disposer d’une couverture prévoyance globale, notamment pour les actifs les plus exposés que sont les non-salariés. » L’utilité, donc la valeur ajoutée, du courtier spécialisé est ici évidente. Mais tous les intermédiaires, notamment les CGP, ne sont ni aguerris ni séduits par la thématique prévoyance. C’est un tort, selon Benoît Sébille, inspecteur expert prévoyance chez Abeille Assurances : « les CGP négligent encore trop souvent cette matière, qui les oblige à sortir de leur zone de confort. Notons qu’ils sont aussi globalement en lien avec une clientèle plus âgée, qui a déjà de l’épargne et pour qui la prévoyance coûte évidemment plus cher. Attention, un CGP ne doit surtout pas s’exonérer de traiter la prévoyance de son client et être en mesure de justifier son conseil en cas de problème, même si les exigences réglementaires sont ici moins formalisées que sur l’épargne. Il faut bien admettre que la prévoyance est à la gestion de patrimoine ce que sont les fondations à la construction. Reste qu’un cruel déficit d’informations empêche cette prise de conscience dans la population et chez de nombreux professionnels. Dommage, car le potentiel de progression du marché est énorme. Il faut notamment déverrouiller le marché de la clientèle moyen-haut de gamme et permettre aux CGP de rentrer sur une clientèle plus jeune, en devenir. Aux assureurs d’être inventifs dans leurs formations, avec des cas concrets, et de lever les freins techniques des régimes obligatoires et de leurs produits, mais aussi d’avoir un bon back-office pour gérer les sinistres, car dans cette situation, le CGP n’a plus la main. Si un sinistre est mal traité par l’assureur, le client pourra en tenir rigueur au conseiller et retirer son épargne. »Dérouler la pelote nous mène in fine sur le terrain de la gestion de patrimoine. Et donc du devoir de conseil auquel sont tenus les professionnels. « En matière de prévoyance, on ne va pas aussi loin sur le devoir de conseil que sur l’épargne, constate Delphine Sibony. Les obligations formelles sont aujourd’hui quasiment inexistantes, alors qu’un devoir de conseil ne devrait pas s’envisager sans intégrer la prévoyance. Bien que les CGP aient compris l’importance de la prévoyance, socle de la gestion de patrimoine, ils n’en font pas encore un point essentiel de la planification patrimoniale en l’intégrant dans leurs analyses. L’écueil porte avant tout sur la mise en application des solutions à apporter. C’est ici que Nevidis intervient en prenant le relais du conseiller en gestion de patrimoine qui a détecté un besoin chez son client. Notre offre de produits est multi-assureurs, lui permettant de couvrir toutes les situations, et notre accompagnement avec des processus simplifiés via le digital et la prise en charge complète de la gestion des contrats par une équipe d’experts, déchargeant le CGP de toute intervention. »

Droit au butPour (re)donner à la prévoyance sa juste place, il faut finalement joindre les deux bouts du marché. D’un côté, en proposant aux ménages une couverture adéquate. « Pour faire de la prévoyance efficace, il faut recourir à une offre de qualité gérée par un assureur expérimenté, résume Jean-Baptiste Omnes. Ce qui signifie d’avoir un contrat aux garanties claires et évolutif dans le temps. Et que l’assureur ait une expertise longue sur ce terrain, permettant de faire du sur-mesure, avec une tarification au juste prix. Ensuite, il faudra penser à revoir sa protection dès que sa situation évolue, suite à un changement de situation professionnelle (statut, rémunération) ou familiale (naissance d’un enfant, mariage, divorce, etc.). »De l’autre côté, il va falloir convaincre, donc inciter, les professionnels à davantage s’y intéresser avec un langage réaliste. « Cette activité n’apporte pas une rentabilité immédiate importante au conseiller, contrairement aux produits d’épargne, bien plus rémunérateurs quand les marchés financiers sont favorables, reconnaît Delphine Sibony. Elle s’inscrit clairement dans la durée, sachant que les contrats de prévoyance durent sept à huit ans en moyenne. L’augmentation des cotisations avec l’âge de l’assuré et la croissance du nombre des contrats garantissent une rémunération sur le long terme, non soumise aux aléas des marchés. Elle fidélise le client et devient un outil de différenciation. Autre élément : les contrats de prévoyance permettent de recontacter le client régulièrement, afin d’adapter éventuellement les garanties dans le temps. Cette prise de contact crée l’occasion d’aborder d’autres thématiques telles que l’épargne. » 

1. Source Insee. En 2020, 667 500 personnes sont décédées : 567 992 étaient âgées de 65 ans ou plus, 99 508 de moins de 65 ans.2. Source Sécurité sociale. En 2021, le nombre de pensionnés d’invalidité de droits propres (avant ouverture des droits à retraite), tous régimes confondus, est estimé à 909 000.

Zoom statistiqueEn 2023, l’assurance-temporaire décès enregistrait 2,5 milliards d’euros de cotisations, pour 834 millions de prestations versées par les compagnies régies par le Code des assurances (donc hors mutuelles et instituts de prévoyance), selon les données de France assureurs. On comptait, l’an dernier, 23,1 millions de contrats temporaires décès en cours, un nombre élevé mais avec une cotisation moyenne finalement faible (110 euros). Inversement, on dénombre moins de contrats décès « vie entière » en cours (6,3 millions). Mais les cotisations y sont nettement plus élevées, avec 2,1 milliards cumulés sur l’année (soit en moyenne 335 euros par contrat). Les prestations pour les contrats vie entière ont atteint 1,4 milliard en 2023, un montant plus élevé que sur les temporaires décès. Ajoutons à ce panorama les contrats obsèques (4,3 millions de contrats en cours, 1,4 milliard de cotisations en 2023) et les contrats emprunteurs (4,5 millions de contrats en cours, 1,1 milliard de cotisations). Du côté des assurances prévoyance Madelin, on dénombrait 1,2 million de contrats en cours, pour 1,8 milliard de cotisations et 1,2 milliard de prestations en 2023.

«  Pour le CGP, s’occuper de la prévoyance de ses clients est une preuve de sa valeur ajoutée  »

Alexis Teillant, CGP, cogérant du cabinet Axe Conseils Patrimoine, a mis la prévoyance au cœur de son activité. Il explique pourquoi et comment.Prevoyance faire simple et efficace 04Investissement Conseils  : Qu’est-ce que la prévoyance pour vous  ?Alexis Teillant  : C’est avant tout recueillir le patrimoine du client. Ses revenus, ses besoins en cas d’arrêt de travail, combien il lui faut par mois pour vivre, voir s’il a un emprunt par ailleurs, etc. Bref, c’est de la gestion de patrimoine. Pour le CGP, s’occuper de la prévoyance de ses clients est une preuve de sa valeur ajoutée; mais attention, l’assurance n’est pas l’unique réponse. Des préconisations juridiques peuvent être faites, comme réaliser un mandat de protection future ou un mandat à effet posthume. Notre métier est de faire passer l’intérêt du client avant le nôtre. Nous avons aussi un devoir de conseil en la matière, même s’il n’est pas balisé par la réglementation, contrairement aux produits d’épargne. Pour éviter tout problème, chaque année, je fais signer un document stipulant que les garanties proposées correspondent toujours aux besoins du client, y compris en cas de baisse des garanties.Qui est concerné en premier lieu ?Les travailleurs non-salariés sont la cible numéro un pour l’assurance-prévoyance. Le contrat de base pour un indépendant, c’est couvrir le décès, l’invalidité et l’incapacité. Il faut alors tenir compte de la spécificité des métiers, prendre garde aux exclusions, notamment dans le sport, et déterminer les niveaux de franchise, qui auront un impact dans la tarification. Il faut aussi se pencher sur la définition de l’invalidité retenue par l’assureur pour savoir si elle concerne l’impossibilité d’exercer toute profession ou uniquement la profession que vous exerciez avant le sinistre. A l’arrivée, le but est de bien s’assurer, de manière raisonnée, c’est-à-dire avoir des couvertures proportionnelles – ni pas assez, ni trop – et de les ajuster quand ma situation change.

Vos recommandations de couverture sont-elles suivies ?Pour différentes raisons – du fait que les clients ne se rendent pas forcément compte des conséquences fâcheuses d’un accident de la vie sur la gestion du patrimoine personnel et professionnel, de la nécessité de convenir d’un ou plusieurs rendez-vous avec le notaire pour la mise en place de certaines préconisations, des examens de santé à passer pour accéder à certaines couvertures d’assurance notamment –, nous pouvons rencontrer des difficultés à avancer sur des dossiers, qui parfois n’aboutissent pas malgré le temps passé dessus. Mais une fois les enjeux perçus, le client suit nos préconisations, ce qui renforce nos liens de confiance sur la durée.

Les dessous des contratsCertains contrats ne couvrent que le décès par accident, les rendant nettement moins onéreux. Mais le degré de couverture est alors faible. Certains contrats prévoient le versement du capital uniquement si le décès est dû à une cause extérieure soudaine et imprévisible. Ce qui va exclure un décès par accident cardiovasculaire. La plupart des temporaires décès ont un cadre plus large, incluant aussi les décès par maladie, et l’état d’invalidité sévère (on parle de perte totale et irréversible d’autonomie, dite PTIA) qui devra être reconnu par un médecin expert de la compagnie. La cotisation est alors plus élevée. Il faut savoir que certaines maladies récidivantes (comme un cancer, par exemple) pourront être écartées. Les exclusions sont aussi de rigueur dans les assurances-décès, avec souvent des sports ou métiers à risques, certaines zones géographiques, les décès dans un conflit armé, etc. A noter : dans tous les contrats, le décès par suicide est garanti à partir de la deuxième année du contrat. Les délais de carence du contrat, ceux pendant lesquels l’assuré n’est pas encore couvert bien qu’il règle ses cotisations, sont un autre élément à analyser. Ils varient de plusieurs mois à un ou deux ans sur certaines garanties. Enfin, reste à savoir jusqu’à quel âge sont valables les garanties. Il faut là différencier deux âges. D’abord, celui qui permet de souscrire une temporaire-décès. Il court de 18 à 65 ou 70 ans pour la grande majorité des assurances-temporaires décès. Ce qui va fermer la porte aux septuagénaires et plus, sauf à se tourner vers quelques alternatives plus onéreuses. Ensuite, l’âge auquel les garanties cessent d’être actives. Pour le décès, c’est en général 70 ou 75 ans. Mais là encore, certains contrats poussent jusqu’à 80, voire 85 ou 90 ans. Concernant la couverture invalidité, elle cesse plus tôt, vers 60 ou 65 ans le plus souvent.

L’alternative du contrat viagerPrevoyance faire simple et efficace 01A côté des temporaires-décès, commercialisées un peu partout, certaines compagnies proposent des contrats viagers, dits « vie entière ». Cette fois, l’assureur s’engage à verser le capital garanti quand survient le décès, quelle que soit sa date. Le souscripteur d’un tel contrat sait ainsi que cette transmission s’effectuera avec certitude (contrairement à une temporaire-décès). Illustrons : à la souscription, le souscripteur détermine le capital garanti (par exemple, 100 000 €) que le bénéficiaire désigné touchera à son décès. En contrepartie, l’assureur lui indique la cotisation à payer. Cette dernière peut être versée en une fois (pour 100 000 € garantis, la cotisation est d’environ 55 000 € à 50 ans), pendant plusieurs années (pour dix ans et 100 000 €, environ 6 000 € par an pour une souscription à 50 ans) ou encore de manière viagère (mêmes hypothèses, autour de 2 500 € par an). Point clé : ce produit dispose d’une « valeur de rachat », permettant de récupérer un capital à tout moment. Ce montant est évolutif, mais les premières années, il sera inférieur aux cotisations versées (sauf cas de la prime unique) et éventuellement soumis à des pénalités. Ce n’est donc pas une assurance à fonds perdu : un jour ou l’autre, un capital est forcément récupéré. Soit par l’assuré s’il « rachète » son contrat. Soit par le bénéficiaire quand l’assuré décède. Autre avantage, la cotisation fixée à l’adhésion n’est pas modifiable par la suite selon l’âge et l’état de santé. Il existe toutefois des contreparties importantes à connaître : la cotisation est plus élevée que sur un contrat temporaire, les frais peuvent être excessifs, et l’assuré s’engage à payer ses cotisations. A défaut, le contrat est mis en réduction avec des garanties réduites. Gare aux confusions, puisque les contrats obsèques du marché sont aussi des assurances vie entière, mais avec une finalité bien différente.

Lexique utilePrevoyance faire simple et efficace 02La PTIA est la perte totale et irréversible d’autonomie. Le médecin de l’assureur la détermine. Elle équivaut à la troisième catégorie de l’échelle définie par la Sécurité sociale sur l’invalidité. Certains contrats parlent d’IAD, pour invalidité absolue et définitive. L’IPT, pour invalidité permanente totale, correspond à une personne qui ne peut plus exercer définitivement son activité professionnelle (voire toute activité professionnelle selon les contrats). C’est un état d’invalidité supérieur à 66 %.L’IPP, pour invalidité permanente partielle, correspond à une personne qui ne peut plus exercer à plein temps son activité professionnelle (ou toute activité professionnelle selon les contrats). C’est un état d’invalidité compris entre 33 et 66 %.L’incapacité est l’inaptitude temporaire (partielle ou totale) à exercer une activité professionnelle ou non.