Il y a un an, je me demandais dans ces colonnes si l’atterrissage en douceur ne serait pas plutôt un décollage. Douze mois et +30% plus tard sur le S&P500, force est de constater que le marché a bien décollé, voire est sur orbite. Se pose désormais la question de la suite.
Depuis un an les investisseurs ont l’impression que l’actualité financière n’existe qu’à travers les banques centrales, et plus particulièrement la FED ; et l’Intelligence Artificielle, et plus particulièrement Nvidia. Difficile de les contredire, mais est-ce que cela va suffire à supporter une hausse des marchés pour les 18 prochains mois ?
Du côté de la Fed, la dernière hausse des taux remonte à juillet 2023 et la tendance est à l’heure actuelle est toujours à une baisse mesurée des taux directeurs en 2024. Le calendrier de cette baisse reste toutefois subordonné à l’absence de tout rebond inflationniste qui ne serait pas « transitoire » pour reprendre la terminologie de M. Powell en 2021. Pour rappel sur les deux derniers mois les chiffres de l’inflation ont été plus élevés que prévus. Si ce scénario n’a pas la faveur des pronostics, les banques centrales rappellent systématiquement leur vigilance en la matière et ces derniers chiffres n’ont pas suffi à remettre en cause le scénario désinflationniste.
Les marchés étant des machines à prédire le futur, on peut penser que cette baisse programmée des taux directeurs est déjà bien intégrée dans les cours actuels et ce sera vraisemblablement le rythme et l’ampleur de cette baisse qui, en surprenant positivement le marché, fourniront le carburant nécessaire à une continuation de la hausse. A contrario tout regain inflationniste impacterait significativement les marchés. Ainsi les politiques monétaires présentent aujourd’hui davantage de risque de mauvaise que de bonne surprise.
Reste l’intelligence artificielle. Ou plutôt la tech dans son ensemble. La croissance des profits des Nvidia, Amazon, Apple, Alphabet, Microsoft et Meta a été de 68% pour le dernier trimestre de 2023, contre moins de 1% pour le reste du S&P sur la même période. C’est absolument exceptionnel, au sens littéral du terme. En effet il n’est pas envisagé que cette croissance des profits se poursuive au même rythme pour ces géants puisqu’elle est attendue autour d’un, tout de même très respectable, 25% de croissance sur l’année 2024. C’est la grande différence avec la bulle Internet des années 2000 : si les projections de profit ont explosé on peut en dire autant des profits réalisés.
Cette augmentation des profits va donc ralentir, et se pose alors la légitime question de la suite. Est-ce que la tech peut monter jusqu’au ciel. Probablement encore un peu, mais pas beaucoup plus. C’est le facteur irrationnel de l’investissement dans la tech : on achète principalement l’innovation, la disruption, la bonne surprise que l’on ne connaît pas encore. Et depuis quelques années donc les profits également. La volatilité liée à la tech est intrinsèque au secteur : là où surgit l’innovation se crée la valeur de demain. Avec de fortes attentes, les déceptions sont très grandes et si je ne me tiendrai pas éloigné de ce secteur, j’éviterai en revanche de le surpondérer tant un ralentissement est attendu. En effet, comme pour la Fed, le risque à la baisse en cas de déception parait plus élevé que le potentiel à la hausse en cas de forte reprise en Chine ou de promesses de mesures économiques favorables pendant la campagne présidentielle US par exemple.
Alors que les records sont dépassés quotidiennement et que l’air se raréfie, on peut envisager un scénario de plateau en misant sur des secteurs moins volatils pour limiter son risque à la baisse. Les enjeux géopolitiques de cette année sont considérables (Guerre en Ukraine, Elections US, et toujours Taiwan et l’Iran), avec un potentiel de création d’un choc d’offre sur le pétrole, les matières premières agricoles ou les semis conducteurs considérable. A titre personnel je reste attentif aux secteurs de l’énergie inclus les valeurs pétrolières et des telecoms, et naturellement à tout évènement qui apportera de la volatilité. A coup sûr il y en aura quelques-uns.
Par Thomas Fonsegrive, Marigny Capital
Pour accéder au site, cliquez ICI.