MainFirst - En attendant l’année du lapin : Quelles mesures les autorités chinoises déploient-elles pour assurer une reprise au second semestre ?

22/08/2022 - source : Patrimoine 24

La Chine a connu de multiples développements depuis le début de la crise du Covid. Les marchés d’actions chinois ont atteint un sommet en février 2021, gagnant plus de 40% par rapport à 2020 grâce à une gestion efficace de la pandémie. Les investisseurs ont ensuite dû faire face à un tour de vis réglementaire à l’encontre de secteurs tels que la technologie, l’enseignement privé et l’immobilier, sous l’effet duquel les marchés d’actions ont aujourd’hui cédé la quasi-totalité de leurs gains précédents. Quels outils budgétaires et monétaires le gouvernement emploie-t-il désormais pour stimuler l’économie ?

Andranik SafaryanLe président Xi Jinping a justifié les mesures réglementaires de grande ampleur mises en œuvre en 2021 par l’aspiration à la « prospérité commune », concept théorisé en son temps par l'ancien président Mao Zedong, fondateur de la République populaire de Chine, et au travers duquel l’Etat vise à réduire les inégalités sociales en intervenant davantage dans le secteur privé. Si le durcissement réglementaire à l’égard du secteur technologique semble s’être apaisé récemment après la décision rendue à l’encontre de Didi (sous la forme d’une amende de 1,2 milliard USD), le désendettement du secteur immobilier mené sous la houlette de l’Etat a eu des répercussions négatives plus marquées sur l’économie et reste un casse-tête pour les responsables politiques. Pour ajouter encore à ces difficultés, le pays continue de s’efforcer d’enrayer la pandémie après l’explosion du nombre de cas de contaminations au variant Omicron en mars, qui a entraîné le confinement de villes d'importance stratégique comme Shanghai. Dans ce contexte, nous passons en revue les questions clés les plus importantes à l’horizon des prochains trimestres.

Quelles mesures les responsables politiques ont-ils prises face au ralentissement de la croissance dû à la pandémie ?

Les autorités chinoises y ont répondu avec force, et de nouvelles mesures sont attendues. Alors que le pays se confinait, de mars à mai, les autorités tant monétaires que budgétaires se sont employées à répondre à la nécessité urgente de stimuler l’économie. Sur le plan monétaire, la Banque populaire de Chine (PBOC) est aujourd’hui la seule grande banque centrale à continuer d’assouplir sa politique, à la faveur de pressions inflationnistes moindres que dans les autres pays. En avril, elle a par ailleurs abaissé de 25 pb le ratio de réserves obligatoires (RRO) appliqué aux banques commerciales des régions administratives et aux banques rurales soumises à un RRO de plus de 5%, ce qui a permis de dégager 530 milliards CNY (78,5 milliards USD) de liquidités. En mai, le taux directeur des prêts à 5 ans, qui sert de base aux prêts hypothécaires nationaux, a également été abaissé de 15 pb à 4,45% afin de soutenir l’économie en général et les achats immobiliers en particulier. Dans le même temps, fin avril, Xi Jinping s’est engagé à augmenter fortement les dépenses d’infrastructure afin de promouvoir la croissance et l’emploi. Ces mesures concerneront principalement les secteurs des transports, de l’énergie et de la gestion de l’eau, mais une partie des fonds sera également allouée à des dépenses non traditionnelles, en faveur notamment des centres de données. Dès le mois de juin, les gouvernements locaux avaient déjà émis leur quota annuel d’obligations d’Etat spéciales, fixé à 3.650 milliards CNY (540 milliards USD). Ces mesures de relance sont d’une ampleur sans précédent, et le volume d’émissions est supérieur à celui de 2020. On peut en outre s’attendre à de nouvelles émissions dans la mesure où une part du quota de 2023, de l’ordre de 1.500 milliards CNY, devrait être mise sur le marché dès cette année. D’autres mesures ont également été prises, allant de réductions d’impôt à la création récemment d’un fonds d’investissement en infrastructures de 500 milliards CNY, qui devrait être opérationnel au troisième trimestre. Globalement, les mesures de relance budgétaire devraient dépasser 7.000 milliards CNY, soit le triple de celles mises en œuvre en 2021.

Quelles mesures les autorités ont-elles prises pour soutenir le secteur immobilier et sont-elles suffisantes ?

De multiples mesures ont été mises en œuvre au premier semestre afin d’enrayer la crise du secteur de l’immobilier. Bien qu’elles aient contribué à atténuer la pression et qu’elles aillent dans le bon sens, les promoteurs chinois restent confrontés à une crise de liquidité sans précédent, qui a déjà entraîné des défauts de la part d’acteurs de premier plan tels qu’Evergrande. Pour leurs interventions, les autorités semblent jusqu'ici se conformer à un vieux proverbe chinois, qui enseigne de « réfléchir à trois fois avant d’agir », car plutôt que de déployer les grands moyens, elles ont jusqu’ici réagi de manière mesurée, ce qui s'est avéré très préjudiciable. Une réponse à même de changer la donne est nécessaire pour convaincre les investisseurs et les acheteurs immobiliers et éviter de nouveaux effets de contagion néfastes. Récemment, les remboursements des hypothèques concernant quelque 300 projets non livrés dans les temps ont été suspendus. Les autorités, aussi bien centrales que locales, ont pris des mesures afin d’éviter que cette perte de confiance ne s’aggrave. Au niveau local, la province du Henan, où l’on recense le plus grand nombre de projets non finalisés, a enjoint à sa société de gestion d’actifs de venir en aide aux promoteurs immobiliers en difficulté, en donnant la priorité aux projets non achevés. Au niveau central, les dernières informations semblent indiquer que la PBOC met actuellement en place, conjointement avec les banques publiques, un fonds de soutien gouvernemental de 300 milliards CNY en faveur du secteur immobilier. Bien que ce montant ne soit pas suffisant pour résoudre la crise, c’est néanmoins un outil utile, qui pourrait être réutilisé/accru s’il s’avère efficace. Nous espérons voir les sociétés de gestion d’actifs, ou des fonds de stabilité, prendre davantage de mesures de ce type à l’avenir. En outre, il serait utile que les projets des promoteurs en difficulté soient repris en main par des sociétés publiques. Enfin, une forte reprise des ventes immobilières sera également nécessaire pour assurer la stabilité du marché à moyen terme. Si cela dépendra de l’évolution de la pandémie, nous sommes convaincus que les autorités vont continuer de s’attacher à soutenir un secteur qui représente entre 25 et 30% de l’économie. Cependant, une réponse plus importante et plus ferme de la part des pouvoirs publics est une condition sine qua non pour mettre fin à la crise et redonner confiance aux investisseurs afin que le secteur puisse enfin aller de l’avant.

L’économie peut-elle se redresser au second semestre 2022 ?

L’économie a déjà repris des couleurs en juin lorsque les mesures de confinement ont été levées, ce qui s’est traduit par une hausse du PMI manufacturier, qui est passé de 49,6 à 50,2, ainsi que par une accélération des dépenses d’investissement et des ventes de détail. Selon nous, les importants efforts déployés en faveur des infrastructures peuvent permettre à l’économie de reprendre de l’allant après la morosité observée au deuxième trimestre. La mise en œuvre de nouvelles mesures de confinement strictes affectant de larges pans de l’économie domestique, comme au deuxième trimestre, aurait évidemment un impact négatif sur les dépenses de consommation et l’activité industrielle, ce qui affaiblirait le rebond économique attendu. A notre avis, les autorités chinoises vont maintenir leur politique « zéro Covid » pendant un moment encore, au moins jusqu'à la fin du 20e congrès national du Parti communiste qui se tiendra au quatrième trimestre. Xi Jiping, qui brigue un troisième mandat, ne peut en effet pas se permettre de voir le nombre de décès liés au Covid remonter. La poursuite de la vaccination des personnes vulnérables devrait en outre permettre une hausse notable du taux de vaccination d’ici le congrès, ce qui devrait également contribuer à inciter les autorités à abandonner leur politique de tolérance zéro. Entre avril et juillet, la part de la population de plus de 60 ans ayant reçu une dose de rappel est passée de 52 à 64%. Si nous attendons davantage de données probantes en la matière, nous sommes convaincus que les autorités chinoises disposent des outils budgétaires et monétaires nécessaires pour stimuler l’économie, et plus encore si nécessaire.

Auteur : Andranik Safaryan, Gérant de portefeuille, Équipe Emerging Markets/Corporate Debt

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