Si 2022 a été marquée par un fort choc inflationniste, 2023 n’a pas apporté de nouvelles surprises sur le front de l’inflation, du moins en Europe.
Il est étonnant de constater que le consensus sur le taux d’inflation moyen en France ou en Allemagne était déjà très proche de la valeur finalement réalisée au début de l’année 2023. En revanche, le taux d’inflation de la Chine en 2023 a beaucoup surpris. En janvier 2023, le consensus sur l’inflation annuelle moyenne était encore de 2,3 % pour la Chine ; mais à la fin de l’année, la Chine était au seuil de la déflation. Cette situation a entraîné des répercussions sur les économies européennes fortement orientées vers l’exportation, car les tendances déflationnistes entraînent un recul de la demande. Par rapport à l’année précédente, les volumes d’exportation de l’Allemagne et de la Suisse vers la Chine ont baissé en 2023. Les espoirs suscités par l’abandon de la politique zéro-Covid du gouvernement chinois à la fin de l’année 2022 ne se sont donc pas concrétisés. En revanche, les données économiques en provenance des Etats-Unis et de la France ont surpris positivement. Les fortes impulsions données par la politique fiscale ont permis à ces économies d’échapper à la récession, malgré la hausse des coûts de financement.
Cinq thèmes à privilégierL’année 2024 sera marquée, selon nous, par cinq thèmes clés.L’économie mondiale sortira du creux cyclique en cours d’année. L’Allemagne et d’autres économies européennes, qui sont actuellement au bord de la récession, profiteront d’une reprise. Cette relance de la dynamique conjoncturelle sera principalement portée par le fait que les revenus réels disponibles des ménages augmenteront à nouveau au cours de l’année, pour la première fois depuis 2021.Les objectifs d’inflation des banques centrales sont à nouveau à portée de main. Pour la zone euro, on peut s’attendre à ce que le taux d’inflation passe sous la barre des 2 % au cours du second semestre 2024. L’objectif d’inflation de la BCE est donc à nouveau en vue. Notre prévision de taux d’inflation moyen est de 2,1 % pour la France comme pour la zone euro. Le point culminant du cycle de hausse des taux est donc derrière nous. Le vent tourne sur la politique monétaire et fiscale. L’économie mondiale bénéficiera donc bientôt d’un léger vent arrière de la part de la politique monétaire. Les développeurs de projets et les investisseurs orientés vers le long terme obtiennent des éclaircissements sur l’orientation future de la politique monétaire. La normalisation prévisible de la courbe des taux d’intérêt apporte à nouveau la sécurité de planification tant attendue. La croissance de l’économie mondiale sera inférieure au potentiel à long terme, ce qui réduira encore la pression inflationniste. Jamais dans l’histoire, autant de personnes n’ont été appelées à voter dans autant de pays, comme ce sera le cas en 2024. L’élection présidentielle américaine est celle qui retient le plus l’attention des marchés financiers. Mais les élections sur d’autres continents sont également susceptibles de renforcer le désordre géopolitique mondial. Cette tendance devrait maintenir la pression à la hausse sur le franc suisse et soutenir également le yen japonais. La guerre en Ukraine et le conflit au Proche-Orient continuent de semer l’incertitude. La mise en danger de la route de transport par le canal de Suez rappelle le risque d’interruption des chaînes d’approvisionnement. Contrairement à ce qui s’était passé après la grande crise financière, la Chine n’assume plus le rôle de moteur de croissance pour l’économie mondiale. Dans certains domaines, comme le développement et la fabrication de véhicules à propulsion alternative, la Chine devient en outre de plus en plus un concurrent des principaux fabricants occidentaux. Les exportations de marchandises européennes vers la Chine n’augmenteront que timidement au cours de l’année, et le nombre de visiteurs chinois dans les destinations touristiques européennes restera inférieur aux chiffres d’avant la pandémie.
Reprise économiqueQuel sera l’impact de la tendance à la baisse des taux directeurs sur les marchés obligataires ? Par rapport aux niveaux actuels, nous nous attendons à une légère baisse des taux d’intérêt sur les emprunts d’Etat à dix ans aux Etats-Unis et à un recul en Europe. La raison principale en est la faiblesse actuelle de la conjoncture. En Suisse, les taux d’intérêt ont déjà baissé plus fortement et devraient donc évoluer latéralement au cours de l’année. La perspective d’une reprise économique et d’un environnement de taux d’intérêt plus favorable signifie que les investisseurs devraient se tenir prêts dans ce scénario afin d’investir à nouveau davantage dans des classes d’actifs plus risquées au cours de l’année.
Marc Brütsch,chef économiste de Swiss Life Asset ManagersAchevé de rédiger le 15 janvier