Antoine Depigny (Primonial REIM France) : « Se concentrer sur les actifs de qualité »

16/05/2023 - source : Profession CGP

Antoine Depigny, Directeur Développement de Primonial REIM France, nous présente ses vues sur les différents segments de l’immobilier et les perspectives des différents marchés gérés par la société de gestion.

 

Profession CGP : Quel regard portez-vous sur les différents marchés immobiliers ?

Antoine Depigny : Les hausses des taux et de l’inflation impactent inévitablement tous les marchés et l’immobilier n’y échappe pas. Le retour de l’inflation a engendré une augmentation naturelle des loyers, mais en tant qu’asset manager nous devons nous assurer qu’elle puisse être absorbée par les locataires. La hausse des taux a, de son côté, entraîné des corrections sur certaines sous classes d’actifs immobilières. Ces deux aspects confirment notre conviction selon laquelle le marché se concentre sur les actifs de qualité privilégiés par des locataires corporate, solides financièrement.

Depuis quelques temps, le marché immobilier professionnel est globalement assez grippé. Par exemple, les valeurs d’expertise sont orientées à la baisse sur le marché des bureaux, dans un contexte où les transactions se ralentissent. Nous pensons qu’il faut encore quelques mois pour qu’acheteurs et vendeurs alignent leurs positions. Toutefois, sur les bureaux, l’attrait des utilisateurs pour les immeubles les plus centraux, flexibles, répondant aux critères ESG ne s’est pas démenti et a continué d’orienter les loyers à la hausse, renforçant par là même le rendement locatif de cette classe d’actifs.

 

Dans ce contexte, quelles typologies d’immobilier privilégiez-vous ?

Celles qui sont les moins corrélées à l’économie, à savoir le résidentiel, la santé et, dans une moindre mesure, la logistique. Le résidentiel s’affiche en légère hausse alors que nous aurions pu nous attendre à une baisse à cause du durcissement des normes environnementales. Au contraire, cela a accru la concurrence et poussé les loyers à la hausse.

Sur la santé, les besoins sont toujours aussi importants, au regard des enjeux liés au vieillissement de la population en Europe. Ce secteur absorbe également mieux les hausses de loyer. Néanmoins, nous devons rester attentifs car les locataires exploitants ont subi de fortes hausses de coûts sur d’autres postes, notamment l’énergie. Il convient donc de rester vigilant sur le taux d’effort demandé, dans une logique d’alignement d’intérêts entre les parties.

La logistique connaît, quant à elle, un destin différent avec un emballement des prix depuis trois ans, suivi d’une correction en fin d’année dernière. Nous voyons cette correction comme l’assainissement d’une petite bulle, alors que les besoins sont toujours très importants.

 

Le marché du bureau est soumis à différentes pressions, notamment celle du télétravail.

Tout à fait. Ce marché – qui représente 80 % de l’immobilier d’entreprise – connaît des mutations profondes qui restent encore sous-estimées selon nous. Nous sommes rentrés dans un nouveau monde où les locataires recherchent des actifs de qualité, souvent moins grands qu’auparavant, bien placés, flexibles et modernes. Parallèlement, le parc doit être rénové pour des questions environnementales, mais aussi pour satisfaire cette demande. Certains aspects ont aussi radicalement changé. Par exemple, il y a quelques années, il fallait absolument condamner les fenêtres pour des raisons de sécurité ou pour la climatisation ; désormais il faut pouvoir aérer les locaux pour assainir l’air. Chez Primonial REIM, nous avons d’ores et déjà pris les devants pour moderniser notre parc immobilier. Cela est essentiel pour fidéliser et attirer les nouveaux locataires puisqu’il s’agit de baux en 3/6/9, donc finalement assez courts par rapport à ce qu’il se pratique dans le domaine de la santé où ils sont généralement conclus pour 12, 15 ou 20 ans. 

 

Un mot sur vos différents fonds ?

Primovie poursuit sa belle marche en avant. C’est la SCPI qui a le plus collecté l’an passé et nous anticipons une collecte de 600 à 750 millions d’euros pour 2023, avec une rémunération de l’ordre de 4,5 %. Elle est essentiellement investie dans de l’immobilier de santé, même si le thème de l’éducation y est également représenté (crèches, écoles privées…). Grâce à des baux de long terme, nous avons une bonne visibilité sur notre distribution et cette pérennité des flux attire nos investisseurs.

Toujours dans le domaine de la santé, nous avons lancé récemment et avec succès la SCI Cap Santé. Plus opportuniste, notamment par une plus forte diversification à l’international, ce véhicule vise une rémunération de 5 à 5,5 %.

Comme évoqué précédemment, notre SCPI de bureaux, Primopierre, reste concentrée sur les actifs de qualité, avec 70 biens pour près de 4 milliards d’euros de capitalisation. Nous privilégions en effet les biens de taille importante pour pouvoir mieux les retravailler. Le taux de distribution est ainsi plus contraint, autour de 4 %, mais le moment est opportun pour retravailler nos fondamentaux afin de profiter de la prochaine revalorisation des actifs ou saisir des opportunités immobilières dans un marché favorable aux investisseurs « cash rich » comme c’est le cas de Primonial REIM. Par ailleurs, nous nous attachons à ce que chacun de nos biens soit dans la trajectoire des accords de Paris. Cela passe aussi bien par des cessions que des restructurations pour repositionner ces immeubles aux meilleurs standards et créer ainsi de la valeur future.

Notre SCPI Primofamily, investie dans l’immobilier du quotidien (résidentiel et immobilier géré) délivre quant à elle un rendement de 3 à 3,5 %, tout en bénéficiant d’une revalorisation quasi-automatique de 1,5 % par an. Le changement de paradigme sur les taux nous permet d’anticiper une hausse des loyers. De même, les biens à faible consommation énergétique sont ceux dont les loyers seront les plus élevés.

S’agissant de notre SCPI sur les commerces, Patrimmo Commerce, nous anticipons un retour à meilleur fortune pour 2023-2024 alors que nous revenons à plus de raison sur ce marché. Des sous-secteurs restent contraints, notamment les centres commerciaux et les galeries commerciales ; alors que les commerces de pied d’immeuble fonctionnent toujours bien. Pour Patrimmo Commerce, nous privilégions ce dernier format, avec des locataires dont les activités sont complémentaires ou non substituables au commerce en ligne.