20 façons d’utiliser l’assurance-vie autrement

01/08/2024 - source : Investissement Conseils

Le placement financier favori des Français est plein de ressources sous-utilisées. Voici vingt stratégies pour tirer tout le parti de cette enveloppe, conseils à l’appui.

C’est entendu, les contrats d’assurance-vie modernes sont un mode d’épargne très confortable. Et pour cause, on peut y verser ce qu’on veut, quand on veut, ce qui en fait un outil adapté pour se construire une cagnotte financière sur la durée, avec de multiples solutions d’investissement, ou pour placer une somme rondelette, jusqu’à plusieurs dizaines de millions d’euros. Mieux, une fois ouvert, rien n’empêche l’assuré de venir piocher dans son capital. Ou de ne pas y toucher, pour qu’il soit transmis à son décès au(x) bénéficiaire(s) désignés dans le contrat, le tout hors du cadre successoral et selon des règles fiscales favorables. Cette leçon a fait et continue de faire le succès de l’assurance-vie auprès des ménages comme des conseillers financiers, qui ont à leur main un placement tout terrain couvrant quasiment tous les objectifs patrimoniaux. Résultat:2 à 2,5 millions de nouveaux contrats sont peu ou prou souscrits chaque année.
Et l’encours de cette enveloppe tutoie aujourd’hui les 2 000 milliards d’euros, loin devant tous les autres produits financiers sur le marché.
S’arrêter à cette lecture reste néanmoins réducteur. Avec une assurance-vie, le champ des possibles est en effet bien plus vaste. Loin de montages complexes (et utiles), qui incluent une vision globale du patrimoine, les recettes, parfois très simples, pour optimiser la gestion de ce placement sont nombreuses. Encore faut-il les connaître…

1. Donner son contrat en gage
Comme tout produit financier, l’assurance-vie est un composant du patrimoine d’un ménage. A ce titre, si son montant est significatif, elle peut garantir une opération d’emprunt immobilier. On parle alors de donner son contrat en gage, techniquement de le « nantir », auprès d’une banque pour garantir un prêt personnel, ce qui protégera l’établissement bancaire contre une défaillance de l’emprunteur. Intérêt de l’opération:éviter de prendre d’autres garanties payantes comme l’hypothèque ou la caution, alors que l’opération de nantissement d’une assurance-vie, réalisée par avenant, est très souvent gratuite. Encore faut-il disposer d’un contrat ayant un montant significatif.
Il est aussi possible de garantir partiellement un contrat, par exemple pour un montant de 75 000 euros, alors que le capital en compte est de 120 000 euros. Côté fonctionnement, une fois le crédit remboursé, le gage tombe et l’assuré retrouve complètement la main sur son contrat. Entre-temps, son pouvoir est en revanche fortement écorné. Les opérations de gestion (retraits, arbitrages ou avances) ne sont en effet plus possibles sans l’accord de la banque. Le capital en compte continue cependant à être rémunéré, donc à grossir.

Conseil
Les établissements bancaires acceptent plus facilement le nantissement d’un contrat reposant sur un fonds en euros, la garantie du capital de ce support financier étant un gage de sécurité évident pour la banque.

20 façons dutiliser lassurance vie autrement 012. Tirer des revenus réguliers
Le rachat (dit aussi retrait) partiel ou total est une disposition inscrite dans le Code des assurances, via ses articles L.132-21 et 132-23. Mais la plupart des contrats modernes vont plus loin, permettant la mise en place de retraits d’argent réguliers, nommés rachats partiels programmés dans les contrats. « Tout détenteur peut effectuer des retraits partiels à la carte, avec la possibilité de les programmer de manière régulière, en choisissant le séquençage et le montant, résume Alexandre Boutin, directeur de l’ingénierie patrimoniale de Primonial. Ajoutons que la fiscalité sur les retraits est modérée passé huit ans, voire nulle (en dehors des prélèvements sociaux) compte tenu des abattements annuels sur la quote-part d’intérêts comprise dans les retraits.»En pratique, chaque mois, ou trimestre ou semestre, l’assureur verse sur le compte bancaire de l’assuré une somme prélevée sur son contrat. Cette somme est soit exprimée en euros, soit en pourcentage de la valeur du capital. Il est aussi possible de percevoir uniquement les intérêts générés par le capital, ce qui pré- servera ce dernier (hors impact de l’inflation).
Exemple : avec un contrat de 75 000 euros rapportant 4 % nets, on peut retirer 3 000 euros par an, hors fiscalité. Cette option de gestion est souple, les rachats programmés pouvant être arrêtés et repris à tout moment. A noter:cette opération est rarement facturée.

Conseil
Séduisante, la mise en place de cette option de retraits programmés doit correspondre à un véritable besoin de revenus (notamment à la retraite). Inutile de procéder à des retraits programmés fiscalisés, pour réinvestir une partie des sommes dans un placement avec frais à la clé.

3. Placer ses liquidités à 5 %
Avec un taux de rendement à 3 % net de taxes sociales et une gestion instantanée des opérations, le livret A et son consort, le Livret de développement durable et solidaire (LDDS), sont des outils incontournables pour optimiser son épargne de précaution. Mais ils souffrent de deux bémols : leur plafonnement (un livret A par personne, limité à 22 950 euros versés) et leur rendement identique partout. Pour des sommes plus rondelettes, l’assurance-vie est alors une solution complémentaire intéressante. Et pour cause, le fonds en euros (capital garanti) a retrouvé des couleurs. Son rendement moyen a atteint 2,15 % net de prélèvements sociaux en 2023 et devrait tutoyer les 2,50 % cette année.
Mais ce chiffre masque des écarts importants. Sur le marché, nombre de fonds en euros rapportent aujourd’hui plus de 3 % net sur le capital en compte, voire de 4 à 6 % pour les versements effectués actuellement pour qui profite des campagnes commerciales des assureurs. Pour placer des liquidités importantes, c’est là une piste à creuser, d’autant que les assureurs ne conditionnent plus (ou rarement) ce taux promo à l’investissement sur des unités de compte en parallèle. .

Conseil
Deux éléments sont à intégrer dans cette stratégie : les éventuels frais sur versements, qui vont réduire l’attrait à court terme du fonds en euros, et la fiscalité sur les intérêts en cas de retraits ultérieurs.

4. Faire tourner le compteur fiscal
A l’instar d’une bonne bouteille de vin, l’assurance-vie se bonifie avec le temps. Huit ans après son ouverture, sa fiscalité devient en effet plus attractive : le taux de taxation des intérêts est alors de 7,50 %, contre 12,80 % avant (pour tous les versements effectués depuis le 27 septembre 2017). Surtout, le titulaire profite d’un abattement fiscal annuel sur les intérêts retirés (4 600 euros pour un célibataire, 9 200 euros pour un couple marié ou ayant conclu un Pacs).
Précisons que le taux de taxation reste à 12,80 % pour les épargnants détenteurs de 150 000 euros ou plus en assurances vie et contrats de capitalisation. Au vu de cette règle, les professionnels recommandent de prendre date sur un ou plusieurs contrats, pour faire tourner le compteur fiscal. Même raisonnement pour les membres de sa famille, enfants compris. Cette stratégie est facile à mettre en place puisque la plupart des contrats, y compris à contenu « patrimonial », s’ouvrent avec un premier versement de quelques centaines ou milliers d’euros.

Conseil
La prise de date est aussi conseillée au(x) bénéficiaire(s) du contrat(s). De la sorte, s’il perçoit le capital en cas de décès de l’assuré, il disposera d’un réceptacle pour y placer les fonds et faire des retraits dans un cadre fiscal favorable.

5. Rachat : opter pour l’impôt sur le revenu
20 façons dutiliser lassurance vie autrement 02Lors d’un retrait ou rachat, le taux de prélèvement forfaitaire unique (PFU) appliqué aux intérêts (compris dans la somme retirée) est de 12,80 % les huit premières années suivant la souscription du contrat. Ce prélèvement est automatiquement effectué par l’assureur. Mais au moment de la déclaration des revenus, l’assuré pourra choisir entre l’application de ce PFU et la réintégration des produits taxables dans son revenu imposable. Voilà qui intéressera les personnes qui ne sont pas soumises à l’impôt sur le revenu (33 % des foyers en 2022, selon le ministère de l’Economie), mais aussi celles taxées dans la première tranche marginale à 11 % (50 % des foyers en 2022). Passé huit ans de détention d’un contrat, quand le PFU tombe à 7,50 % (sauf cas des personnes détenant 150 000 euros ou plus en assurances vie et contrats de capitalisation), ce choix intéressera seulement les ménages non imposables.

Conseil
Le choix entre PFU et intégration des intérêts est à préciser dans sa déclaration de revenus. Il s’appliquera à l’ensemble des revenus de capitaux mobiliers pour l’année concernée. En pratique, l’administration fiscale déduira le prélèvement forfaitaire déjà acquitté du montant à régler.

6. Multiplier les bénéficiaires avant 70 ans
L’assurance-vie est un outil de transmission hors pair. Et pour cause, en cas de décès de l’assuré, chaque bénéficiaire désigné au contrat a droit à un abattement fiscal de 152 500 euros sur le capital transmis, le reliquat étant taxé à 20 % sur les 700 000 euros suivants, 31,25 % ensuite. Cette règle est valable si et seulement pour les versements effectués dans le contrat avant les soixante-dix ans de son détenteur. Point clé:cet abattement est octroyé à « chaque » bénéficiaire. Voilà pourquoi multiplier les bénéficiaires revient à multiplier l’abattement et par ricochet le capital transmis en franchise de droits, un cadre évidemment attractif pour les gros patrimoines. Illustration : Monsieur X a trois enfants adultes, qui ont eux-mêmes deux enfants chacun. Il peut alors transmettre à chacun 152 500 euros en franchise de droits, soit au total 1 372 500 euros (152 500 x 9). Attention, cette règle fiscale s’entend tous contrats confondus. Autrement dit, si l’assuré détient d’autres contrats, ils seront pris en compte pour calculer ce qui revient à chaque bénéficiaire. Et rappelons qu’elle concernera uniquement les versements (et intérêts générés par ces primes) réalisés avant les soixante-dix ans du souscripteur.

Conseil
Ne pas oublier que le conjoint ou partenaire pacsé sont exonérés de droits en toutes circonstances, y compris pour les capitaux perçus via l’assurance-vie. L’abattement de 152 500 euros ne le concerne donc pas.

7. S’endetter chez son assureur
En cas de besoin d’argent, il est à tout moment possible de retirer une partie de l’argent investi sur votre contrat via un retrait partiel. C’est là tout la souplesse de l’assurance-vie, qu’on peut alimenter et vider à sa guise. Pour autant, le retrait partiel n’est pas toujours adapté du fait qu’il est fiscalisé. Il existe une alternative nommée l’avance, une disposition prévue par l’article L.132-21 du Code des assurances. De quoi s’agit-il ? D’un prêt de l’assureur sur le capital de votre contrat. En pratique, ce dernier met à disposition de l’assuré une somme pendant une durée déterminée. En général, ce prêt est au plus égale 80 % de la valeur du contrat, 60 % dans la plupart des cas. Théoriquement, selon les engagements pris par la profession, l’assuré aura trois ans pour rembourser ce prêt, une période reconductible. Ce procédé recouvre trois avantages. Un, l’avance échappe à l’impôt. Deux, aucuns frais sur les versements ne seront pris sur son remboursement (qui peut être effectué en plusieurs fois). Trois, pendant la durée du prêt, la totalité du capital continue de fructifier. Bien sûr, en contrepartie, l’avance est facturée par l’assureur, autour de 4 % actuellement.

Conseil
Le taux d’intérêt de l’avance doit s’apprécier net, c’est-à-dire net de la rémunération du capital en compte. Au mieux, ce prêt coûtera les frais de gestion du contrat, ce qui est souvent moins cher qu’un crédit à la consommation.

8. Exploiter la clause bénéficiaire
Aux dires des assureurs, la quasi-totalité des assurances-vie sont encore souscrits aujourd’hui avec la clause bénéficiaire standard, celle inscrite dans tous les contrats et stipulant qu’en cas de décès, le capital reviendra au conjoint survivant, à défaut aux enfants, etc. Cette part est évidemment moindre pour les contrats souscrits auprès des CGP et autres banques privées. Il n’empêche, ce choix laisse perplexe.Pour Delphine Pasquier, directrice du développement de Prepar-Vie, « force est de constater que la clause bénéficiaire standard est de moins en moins adaptée, ne serait-ce parce qu’elle exclut de fait les partenaires de Pacs et les concubins de son périmètre. Le développement des familles recomposées change aussi la donne ». Point de départ : il n’y a aucune obligation de se tenir à la clause standard. Chacun est libre de formuler sa propre clause bénéficiaire, sous réserve de son enregistrement par l’assureur. Le champ des possibles est large, puisqu’à quelques exceptions près, toute personne peut y être désignée (y compris une personne morale ou association), puisque le capital peut être réparti entre plusieurs personnes (même de manière inégale), puisque certaines conditions peuvent y être indiquées (par exemple:«mes enfants, à charge pour eux de convertir le capital en rente viagère»), etc.
Autre piste : démembrer la clause, une solution sans équivalent fiscal pour les familles unies aux patrimoines importants. Ce qu’explique Sophie Nouy, directrice du pôle expertise patrimoniale chez Cyrus Conseil : « Le démembrement de la clause bénéficiaire permet de protéger efficacement son conjoint, en lui apportant un capital financier qu’il pourra utiliser via une convention de quasi-usufruit, tout en préparant la transmission du patrimoine à ses enfants, qui seront titulaires d’une créance en restitution lors de la succession de l’usufruitier. L’enjeu est essentiellement fiscal. Au décès de l’assuré, la fiscalité et les abattements sont répartis entre le conjoint usufruitier et le nu-propriétaire selon le barème du CGI. Rappelons que le conjoint ou partenaire pacsé sont exonérés de prélèvement pour les versements avant soixante-dix ans et de droits de mutation pour les primes versées après soixante-dix ans. Bien sûr, l’enfant nu-propriétaire devra s’acquitter de droits de mutation liés à la valeur de la nue-propriété, alors qu’il ne reçoit rien, les capitaux revenant à l’usufruitier. Mais il peut être prévu que ces droits soient à la charge de l’usufruitier. Surtout, au décès de ce dernier, le nu-propriétaire disposera d’une créance de restitution sur la succession, non soumise aux droits de succession ».

Conseil
En pratique, pour des clauses complexes, il sera sage de se faire aider d’un conseiller expérimenté. Il faut aussi se montrer précis dans la rédaction de la clause, prévoir la représentation de ses enfants (car l’assurance-vie ne l’inclut pas, contrairement aux règles successorales), et dernier point, revoir régulièrement sa (ses) clause(s).

9. Faire de l’assurance-vie après 70 ans
20 facons dutiliser lassurance vie 033L’assurance-vie n’a pas bonne presse chez les septuagénaires, que l’on presse souvent d’investir avant cet âge pour des raisons fiscales en cas de décès.
Passé soixante-dix ans, la règle change en effet. Que dit-elle ? Que toute prime versée sur un contrat est taxée aux droits de succession, après un abattement de 30 500 euros. 
C’est à première vue moins attractif que les 152 500 euros d’exonération par bénéficiaire pour les versements avant soixante-dix ans.
Pour autant, le cadre reste attractif, comme l’explique Eric Birotheau, directeur de l’ingénierie patrimoniale chez Banque Richelieu France : « Contrairement à une idée reçue, la règle post-soixante-dix ans est intéressante, car les plus-values issues des versements seront exonérées de fiscalité, hors prélèvements sociaux. Dès lors, plus on vivra longtemps et plus le contrat sera performant, plus le montant transmis sans droits de succession à payer sera élevé. Prenons un capital de 2 millions d’euros investi sur des unités de compte. Avec une performance annuelle de 4 %, vous aurez plus que doublé le capital au bout de dix-sept ans, avec 4,05 millions en compte. Cette durée correspond peu ou prou à l’espérance de vie à soixante-dix ans. Dans cet exemple, ce sont donc plus de 2 millions d’euros qui seront transmis hors impôt en cas de décès. Partant de là, si l’objectif transmission est clairement poursuivi par l’assuré, on pourra rechercher un profil d’investissement plus risqué pour optimiser la performance ». Sur un plan fiscal, l’objectif transmission reste donc tout à fait pertinent en assurance-vie, passé soixante-dix ans. Enfin, rappelons une fois de plus que le conjoint ou le partenaire pacsé sont exonérés de droits de succession, y compris pour des assurances-vie alimentées après soixante-dix ans… Tous les détails de cette stratégie à retrouver dans le n° 871 d’Investissement Conseils de mai 2024 (pages 14 à 20).

Conseil
L’abattement de 30 500 euros est valable pour l’ensemble des bénéficiaires, tous contrats confondus. S’ils sont plusieurs, hormis le conjoint ou le partenaire pacsé, ils devront se le partager.

10. Manier l’arbitrage plus souvent
Les contrats modernes regorgent d’options diverses et variées pour gérer son contrat. Leur intérêt est souvent minime, avec trop de complexité à la clé pour une bonne compréhension par l’épargnant. Un outil est toutefois très utile, son nom:l’arbitrage. Cet acte de gestion permet de modifier la répartition de son capital entre les supports financiers.
Avoir un contrat truffé de fonds d’investissement, c’est bien. Mais y rester coller, quel intérêt ? Et pourquoi ne pas mettre régulièrement ses gains à l’abri sur le fonds en euros (par exemple dès 5 % de plus-values sur une unité de compte), d’autant que les transferts de plus-values ou intérêts se font à l’abri du fisc (car restant dans le contrat) ? L’arbitrage est aujourd’hui peu utilisé par les épargnants.
Dommage, d’autant que de plus en plus de contrats en proposent au moins un gratuit par an. En pratique, il suffit de faire une demande d’arbitrage au guichet, par courrier ou en ligne quand c’est possible. Attention, on ne vend et n’achète pas les fonds d’investissement à cours connu. Les délais d’enregistrement de l’arbitrage peuvent jouer de mauvais tours aux épargnants, même si les processus se sont améliorés dans les compagnies, avec désormais des opérations souvent réalisées le lendemain de la demande.

Conseil
La plupart des contrats prévoient un arbitrage annuel gratuit, facturant les suivants. De nombreuses options d’arbitrage automatique sont aussi inclues par les assureurs. Leur utilité est à évaluer selon les objectifs poursuivis.

11. Miser sur l’eurocroissance
Parmi les solutions d’investissement en assurance-vie, l’eurocroissance reste une énigme commerciale. Peu d’assureurs proposent ce fonds dans leurs contrats, alors qu’il date de 2014 (décret le créant) et qu’il a été remodelé par la loi Pacte en 2019. La raison invoquée ? Un produit trop compliqué à expliquer aux épargnants. De quoi s’agit-il ? D’un fonds en euros proposant une garantie du capital (totale ou partielle) au terme choisi (huit à quarante ans), avec une promesse de rendement supérieure aux fonds en euros classiques.
Simple, sauf que la mécanique de gestion reposant sur une poche de diversification et une proche garantie est bien plus ardue à décrypter. Il s’agit pour autant d’un support financier dont les résultats sont intéressants sur plusieurs années, s’intégrant assez bien dans l’enveloppe de moyen-long terme qu’est l’assurance-vie. Quels sont aujourd’hui les assureurs actifs sur ce créneau ? Axa, Generali et Prepar-Vie.

Conseil
La mayonnaise commerciale semble enfin prendre. Fin mars 2024, l’encours des fonds eurocroissance était de 9,3 milliards d’euros, en hausse de 27 % sur un an. On comptait cinq-cent-soixante-deux mille contrats incluant ce support, soit 26 % de plus que fin mars 2023.

12. Détenir plusieurs contrats
Un seul livret A par personne. Un seul plan d’épargne en actions. Un seul plan d’épargne logement, etc. Mais pas de limite avec l’assurance-vie : il est, en effet, possible de souscrire autant de contrats que voulu, sans limite de montant versé qui plus est. Un avantage dont il faut tirer parti.
Première raison d’être multi-contrats:la sécurité de ses avoirs. Il ne faut pas mettre tous ses oeufs dans le même panier, dit l’adage. La seconde raison tient à une meilleure lisibilité de la gestion de son patrimoine, avec un contrat souscrit et alimenté par objectif ou projet poursuivi (retraite, transmission, etc.).
Il existe enfin des raisons fiscales à détenir plusieurs contrats souscrits à des dates différentes. D’abord, pour éviter les confusions ou imbroglios sur la règle qui sera appliquée en cas de retrait ou de décès. Pour les titulaires de vieux contrats souscrits avant septembre 1997, il est conseillé de ne pas les polluer par de nouveaux versements. En cas de retraits partiels, mieux vaudra utiliser les abattements sur un contrat plus récent avant de se pencher sur l’ancien.
Autre élément à connaître : la fiscalité sur les retraits est calculée sur l’ensemble du contrat, même si l’épargne est répartie sur plusieurs supports financiers aux performances différentes. En ayant plusieurs contrats, par exemple deux, seul celui concerné par le retrait sera fiscalisé. L’assiette des prélèvements lui sera limitée, et le capital placé sur l’autre contrat échappera logiquement à toute imposition.
Concernant la fiscalité au décès, mieux vaut ouvrir une nouvelle enveloppe passé soixante-dix ans pour garantir la traçabilité des fonds. « La bonne stratégie est d’utiliser les cadres fiscaux – avant et après soixante-dix ans – de manière complémentaire, conseille Christophe Chaillet, directeur de l’ingénierie patrimoniale du CCF (ex-HSBC). Il faut aussi se monter pragmatique en ayant plusieurs contrats pour différentes raisons. D’abord, cela permet de dispatcher les bénéficiaires quand ils sont nombreux. Cela est aussi utile de distinguer les objectifs poursuivis par contrat : un pour les retraits, un pour la transmission par exemple. »

Conseil
En assurance-vie, en cas de faillite d’une compagnie d’assurances vie, la garantie de place est limitée à 70 000 euros par assuré. Quand sa propre épargne dépasse ce seuil, la diversification entre des assureurs différents est une sage mesure à prendre.

13. Jouer la carte du transfert
En assurance-vie, impossible de transférer son contrat souscrit chez un assureur X chez un autre assureur Y. En revanche, il est possible de réaliser cette migration au sein d’une même compagnie, le tout sans perdre les avantages fiscaux du premier contrat.
Le jeu peut en valoir la chandelle dès lors que le contrat sur lequel est effectué le transfert est plus qualitatif que le contrat quitté (plus de fonds d’investissement, meilleurs fonds en euros, mandats de gestion, etc.). C’est là un moyen de sortir d’un contrat moribond pour viser plus de performances financières. Ce transfert intra-compagnie tourne à plein. Au premier trimestre, cent-cinq mille migrations d’un contrat à un autre ont été enregistrées chez les assureurs pour un volume de 3,5 milliards d’euros. Depuis le vote de la loi Pacte, ce sont 1,4 million de contrats qui ont été transférés pour un peu de 50 milliards d’euros (dont 11 milliards investis en unités de compte).

Conseil
Sous l’impulsion de parlementaires, notamment des sénateurs, le débat sulfureux sur le transfert inter-compagnies de l’assurance-vie revient régulièrement sur la table. Mais jusqu’ici, ce serpent de mer n’a jamais abouti.

14. Enrichir ses petits-enfants
Deux solutions sont possibles pour les grands-parents souhaitant gratifier leurs petits-enfants. La première est d’ouvrir eux-mêmes un ou plusieurs contrats, d’y placer de l’argent et d’y désigner leurs petits-enfants bénéficiaires quand ils décéderont. Avantage de cette formule : le capital investi reste disponible pour les grands-parents en cas de besoin.
La clause bénéficiaire reste aussi modifiable en cours de route, par exemple pour ajouter un autre petit-enfant ou répartir l’octroi du capital différemment. Inconvénient : les petits-enfants ne profiteront du capital qu’au décès du grand-parent, dont la date est évidemment inconnue. La seconde piste est de donner dès à présent de l’argent à ses petits-enfants, par acte notarié ou sous forme de don manuel enregistré auprès du fisc. Ce capital financier est alors placé sur un contrat ouvert au nom du petit-enfant, via ses parents s’il est mineur. Un pacte adjoint peut être associé pour encadrer l’utilisation des fonds, par exemple en rendant impossible leur utilisation jusqu’à une certaine date.
Atouts de cette formule:les grands-parents bénéficient des abattements propres aux donations et le petit-enfant aura à terme un placement défiscalisé pour y tirer de l’argent.

Conseil
Certains assureurs proposent des contrats étiquetés « générationnels », destinés aux grands-parents voulant transmettre à leurs descendants. C’est de l’habillage marketing:en pratique, tout contrat d’assurance-vie peut être utilisé à cette fin.

15. S’intéresser à la rente sous conditions
La rente viagère est choisie par une partie infime des tenants d’assurances-vie, selon les données de compagnies. Logique : « avec la rente viagère, on perd la main sur son capital, qui n’est plus disponible et qui ne sera pas transmis en cas de décès, commente Alexandre Boutin. Fiscalement, le capital issu d’une assurance-vie servant à la transformation en rente sera exonéré d’impôt, mais la rente viagère dite à titre onéreux sera, elle, fiscalisée et soumise aux prélèvements sociaux, selon l’âge de l’assuré au moment de sa mise en route (40 % entre soixante et soixante-neuf ans, 30 % après). Cet abattement fiscal n’est toutefois pas un élément suffisant pour convaincre les Français d’y recourir, sauf cas particuliers. » D’autant que financièrement, ce n’est pas très engageant avant soixante-dix ans au vu des taux de conversion utilisés par les assureurs. A soixante-cinq ans, ce taux (hors options et frais) avoisine 3,50 % (avec un taux technique à 0 %, ce que pratiquent généralement les assureurs). Pour autant, à partir de soixante-dix ans, le décor change, le taux de conversion dépassant alors les 4 %. De quoi s’intéresser à nouveau à ce mode de sortie de l’assurance-vie, notamment quand l’assuré ne souhaite pas transmettre un capital à son décès. Il pourra aussi composer avec les options proposées par la compagnie pour aménager la rente viagère:annuités garanties (dite rente certaine), rente à paliers, rente dépendance, etc. Autant de solutions à analyser posément.

Conseil
La revalorisation d’une rente dans le temps est la grande inconnue. Suivra-telle l’inflation ? Aujourd’hui, la plupart des assureurs proposent des rentes à taux technique à 0 % (alors que la réglementation leur permet d’aller jusqu’à 1,75 %), ce qui doit permettre une meilleure revalorisation chaque année. Sans garantie, toutefois.

16. Utiliser la formule anti-impôts
Quel montant peut-on retirer de son assurance-vie de plus de huit ans sans payer d’impôt (hors prélèvements sociaux) ? Un petit calcul permet de le savoir. Il s’agit de multiplier l’abattement autorisé (4 600 euros pour un célibataire, 9 200 euros pour une personne vivant en couple marié ou pacsé) par la valeur du contrat à la date du retrait, puis de diviser le tout par le total des intérêts acquis à cette date.
Prenons un exemple : Madame Y, mariée, a versé 100 000 euros sur un contrat il y a neuf ans. Il vaut aujourd’hui 150 000 euros. Que peut-elle y retirer sans passer par la case impôts ? 9 200 x 150 000/50 000 = 27 600 euros.

Conseil
Attention, la formule n’est plus valable si des retraits avaient déjà été effectués par le passé, car l’assiette des intérêts ne serait pas la même.

17. Souscrire à deux… pourquoi pas ?
Très souvent, le contrat d’assurance-vie est souscrit par une seule personne. Cas typique dans un couple marié:le conjoint ouvre un contrat et désigne sa femme bénéficiaire en cas de décès. Et vice-versa. Les époux mariés sous le régime de la communauté peuvent pourtant opter pour une co-souscription ou co-adhésion d’un même contrat, une disposition prévue par le Code des assurances (article L. 132-1, alinéa 2). Tous deux signent l’ouverture du contrat, désignant alors le conjoint survivant comme bénéficiaire en cas de décès.
Cette solution, davantage mise en avant chez les conseillers en gestion de patrimoine qu’aux guichets des banques, présente deux avantages. Un, elle colle bien au statut patrimonial choisi par les époux. « Le premier avantage de la co-souscription est de permettre aux époux de réaliser une véritable gestion commune du contrat, analyse Gilles Belloir, directeur général de Placement-direct.fr. C’est un principe de gestion plutôt sain, le contrat étant alimenté avec des fonds communs. » Co-souscrire un contrat, c’est désigner ensemble le ou les bénéficiaires, exercer ensemble les droits de retrait ou d’avance, etc. Bref, le contrat se gère à deux et chacun garde un oeil sur les deniers du couple. Cette solution est toutefois contraignante : « Réaliser un versement, un arbitrage, un rachat ou modifier la clause bénéficiaire du contrat nécessitera alors une double signature, complète Gilles Belloir. Si besoin toutefois, un mandat croisé pourra être mis en place permettant à l’un comme l’autre d’effectuer certaines opérations sans forcément justifier de l’accord du conjoint. » Les avantages ? Les problèmes éventuels générés par les souscriptions simples comme le sort du contrat en cas de décès du conjoint bénéficiaire sont ici évités. Avec la co-souscription en cas de décès, le survivant perçoit les capitaux comme un bien propre. Alors que dans le cadre d’une souscription par une seule personne, le survivant pourrait avoir à partager le capital avec les autres héritiers.

Conseil
Une co-souscription doit se réfléchir posément avec l’aide d’un conseiller chevronné. Il faut peser les avantages et inconvénients de la formule. L’un des intérêts est de purger les plus-values du contrat du conjoint survivant. Illustration:au lieu de souscrire deux contrats croisés de 150 000 euros, les époux co-souscrivent un seul contrat de 300 000 euros, le conjoint survivant d’entre eux étant le bénéficiaire. Au premier décès, le conjoint survivant reçoit les fonds, soit 300 000 euros en totale exonération fiscale. Alors qu’avec deux contrats individuels, le sien n’aurait pas été dénoué et les rachats fiscalisés.

18. Gratifier un tiers, pas le fisc
Sur un plan fiscal, l’assurance-vie est un placement très efficace pour gratifier des personnes tierces à son décès. Son concubin, en premier lieu. Ce dernier a seulement droit à un abattement de 1 594 euros sur la succession, le solde étant taxé à 60 % ! 500 000 euros transmis à un concubin lui vaudront une facture fiscale de 299 043 euros.
En passant par un contrat d’assurance-vie, le capital transmis bénéficiera d’un abattement de 152 500 euros et le reliquat sera taxé à 20 %. Soit une note à régler aux impôts de 69 500 euros. CQFD. Cet intérêt fiscal sera identique pour toute personne tierce non-héritière. Mais il vaut aussi pour des héritiers éloignés du défunt, tel un neveu, fortement taxés aux droits de succession.

Conseil
Il faut impérativement soigner la rédaction de la clause bénéficiaire pour des transmissions à des personnes tierces. L’identité de la personne doit être précise pour permettre à l’assureur de payer à qui de droit.

19. Retirer sa mise en deux fois plutôt qu’une
Deux raisons doivent inciter l’assuré à préférer effectuer plusieurs rachats partiels, plutôt qu’un rachat total pour récupérer son capital.
La première est d’ordre financier. Si l’obole est placée sur le fonds en euros, il faudra être présent au moment de la distribution du rendement pour y prétendre en totalité. En général, au cours du premier trimestre de chaque année. Si c’est un gros rachat partiel qui est effectué, laisser un minimum en compte permettre de percevoir l’intégralité des intérêts dus, l’assureur versant le complément de rendement à ce rachat à ce moment-là.
La seconde raison est d’ordre fiscal. Si le contrat a plus de huit ans, il va profiter d’un abattement sur les intérêts retirés (4 600 euros pour un célibataire, 9 200 euros pour un couple marié ou pacsé). Un abattement renouvelable tous les ans.
Si le contrat a une certaine valeur, il sera judicieux de saucissonner son retrait sur au moins deux années afin de profiter deux fois des abattements. Par exemple, si le besoin financier intervient en fin d’année, il faudra effectuer un retrait en décembre, puis un autre en janvier afin de profiter deux fois de l’abattement.

Conseil
Dans le même ordre d’idée, pour récupérer le capital d’une assurance-vie pour le réinvestir dans un meilleur contrat, l’assuré peut retirer chaque année la somme permettant de faire le plein de l’abattement fiscal. Il expurge ainsi les plus-values de son ancien contrat hors impôt. C’est du transfert d’intérêts non taxables entre deux contrats, sachant que le réinvestissement dans le nouveau contrat devient du capital non imposable par la suite.

20. Expatriés : bien naviguer entre les règles
Ne plus avoir son domicile fiscal en France est une aubaine pour préparer la transmission de capitaux à son décès. En effet, les contrats souscrits en France par un résident étranger au jour de la souscription sont exempts de la taxe de 20 % appliquée au-delà de 152 500 euros (et de celle de 31,25 % appliquée sur les montants transmis supérieurs à 852 500 euros). Autrement dit, les capitaux-décès sont transmis sans impôts, quel que soit leur montant.
Deux conditions sont toutefois requises. Un, que l’assuré soit, au moment du décès, non-résident fiscal en France (au sens de l’article 4 B du Code général des impôts). Deux, que le bénéficiaire soit au moment du décès de l’assuré, également non-résident fiscal en France (ou qu’il ne l’ait pas été pendant au moins six années au cours des dix années précédant le décès de l’assuré). Ce n’est pas tout, une exonération de prélèvements sociaux est aussi de mise pendant la vie du contrat d’un non-résident fiscal. Ainsi, sur le fonds en euros, le taux est attribué sans taxes sociales (17,20 % actuellement, prélevé directement par l’assureur pour tous les résidents fiscaux français). La situation d’expatrié a toutefois ses revers. Concernant les rachats sur un contrat, l’option d’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu n’est pas possible. Surtout, après huit ans, il n’est pas possible de profiter de l’abattement sur les intérêts (4 600 euros pour une personne seule ou 9 200 euros pour un couple). Il faudra bien se renseigner sur l’existence ou non d’une convention internationale avec l’Etat de résidence et la France, pour éviter les cas de double imposition ou inversement pour profiter de l’annulation de certaines impositions.

Conseil
Tous les assureurs n’acceptent pas des souscriptions effectuées par des expatriés. Il faudra aussi fournir tous les justificatifs adéquats aux assureurs pour profiter du cadre fiscal.


Bénéficiaires : deux alternatives à connaître
Pour les bénéficiaires d’assurances-vie, la règle est a priori simple. Au décès de l’assuré, il leur revient de se manifester auprès de la compagnie d’assurances pour percevoir les capitaux inscrits au contrat. Ils ont toutefois deux autres marges de manoeuvre méconnues.
Tout d’abord, un bénéficiaire peut décider de se désister au profit du ou des suivants. Il s’agit alors de renoncer au bénéfice du contrat. Un conjoint survivant n’étant pas dans le besoin peut ainsi décider de laisser les capitaux à ses enfants, désignés comme bénéficiaires suivants dans le contrat. En pratique, il suffit d’envoyer une lettre avec accusé de réception à l’assureur, dans laquelle le bénéficiaire exprime simplement ce renoncement, sans toutefois préciser au bénéfice de qui. Il reviendra ensuite au(x) bénéficiaire(s) suivant(s) de se manifester. Attention, quand on passe son tour, c’est sur la totalité du capital.
Autre piste pour le bénéficiaire, la possibilité de récupérer le capital sous forme de titres. Pourquoi pas si les capitaux investis sur des fonds d’investissement sont en moins-values, évitant ainsi de les matérialiser. Les titres récupérés seront alors inscrits sur un compte-titres. Cette disposition est d’ordre public, conformément à l’article L.131-1 du code des assurances.