Vontobel - Perspectives de la Fed : le contexte macroéconomique plus fort que le tapering

27/10/2021 - source : Patrimoine 24

La volatilité devrait être au rendez-vous sur les marchés obligataires mondiaux, dans la mesure où le tapering pourrait bien être annoncé lors de la prochaine réunion de la Réserve fédérale américaine, début novembre. Toutefois, toute hausse des rendements ne devrait être que relative par rapport à une tendance globale à la baisse, induite par de puissants facteurs structurels tels que la numérisation et la démographie.

TSimonLueFongVontobelous les regards sont actuellement tournés vers la Fed, mais, dans l’ensemble, la réduction progressive des taux (ou tapering) ne devrait pas susciter un véritable revirement des rendements. L’histoire en témoigne : au milieu de l’année 2013, les taux ont augmenté de 100 points de base (pb) lorsque la Fed a évoqué le tapering pour la première fois, manifestant ainsi son intention de débarrasser les marchés des liquidités massives injectées après la crise financière mondiale. Lorsque le tapering a finalement été initié en décembre 2013, les taux se sont en fait repliés. Ce n’est que trois ans plus tard que la Fed a entamé un resserrement quantitatif qui a fait grimper les taux de 70 points de base.

Les taux dépendent de la croissance et de l’inflation

Ces mouvements n’ont rien de spectaculaire, en particulier par rapport au début de l’année lorsque le scénario de reflation est apparu et que les taux ont cédé 120 points de base. Tout ceci montre bien que les marchés obligataires ne reposent pas uniquement sur le rapport existant entre l’offre d’un État et la demande d’une banque centrale. Au final, les perspectives de rendement dépendent des trajectoires futures de la croissance et de l’inflation. Ces derniers temps, les craintes de stagflation ont atteint des niveaux record, laissant présager un retour aux années 70. Ces inquiétudes ne tiennent pas compte des différences significatives entre les deux époques. Nous sommes aujourd’hui en période de croissance, mais l’offre est insuffisante. Ensuite, le chômage est actuellement au plus bas (4,8%) par rapport aux sommets enregistrés en pleine pandémie (14,7%), alors qu’il atteignait 8,2% au milieu des années 70. N’oublions pas en outre que certaines forces à l’œuvre peuvent déclencher un rééquilibrage économique salutaire et soulager les tensions au niveau des chaînes d’approvisionnement avant que la stagflation ne s’installe. La demande devrait en fait se stabiliser du fait d’une diminution des dépenses des consommateurs en raison de la hausse des prix, avant que la croissance ne soit étouffée par l’inflation.

Il est donc fort probable qu’à long terme, la croissance restera faible et que l’inflation se révélera temporaire, notamment parce que des mégatendances telles que la numérisation, la mondialisation et la croissance démographique les tempèrent depuis un certain temps déjà. Au final, le contexte macroéconomique prime sur la question du tapering. En d’autres termes, tant que les prévisions d’inflation et de croissance demeureront faibles, les rendements auront du mal à décoller.

Les grands mouvements de taux des banques centrales, du pain bénit pour tout gérant obligataire actif

Cela ne veut pas dire que les variations de taux plus modestes sont sans importance. Elles représentent en réalité des opportunités tactiques de court terme pour les gérants obligataires actifs. Les choses deviennent néanmoins beaucoup plus intéressantes lorsque la Fed intervient réellement sur les taux. Et pour pouvoir les relever, il faut avant tout supprimer les achats d’actifs. Le tapering pourrait donc annoncer des mouvements de taux de la part de la Fed si l’inflation et le chômage venaient à progresser de manière substantielle. Au regard du climat actuel, il pourrait y avoir des hausses de taux à partir de la mi-2022, pour autant que le tapering commence dès le mois de novembre de cette année.

Et même si ce scénario se vérifie, cela ne signerait pas la fin du marché obligataire. Bien au contraire, cela se traduirait par des mouvements des rendements et des spreads, une véritable aubaine pour tout gestionnaire obligataire actif. En effet, lorsque la Fed agit de manière significative sur les taux, la corrélation entre rendements et spreads est de 1. La partie courte de la courbe des taux américains réagit d’abord en augmentant, ce qui déclenche un mouvement vendeur sur les marchés du risque, d’où un élargissement des spreads. Les rendements et les spreads augmentent donc de concert. Une fois que le risque est élevé, les investisseurs se tournent vers les valeurs refuges, ce qui déclenche un rallye des rendements des emprunts d’État, qui se répercute sur les marchés des spreads, mais avec un certain décalage. Les marchés obligataires disposent dès lors de leur propre mécanisme de stabilisation, grâce auquel les marchés suivent un cycle naturel de variations des rendements et des spreads. Dans l’intervalle, le rendement total d’une obligation dépend de façon variable de ses composantes de duration et de spread, dont un gérant obligataire actif peut tirer parti par le biais de positions longues et courtes sur les facteurs de rendement pertinents.

Les produits de spread, sources d’alpha dans un environnement de rendements faibles

Que le tapering intervienne ou non, il est peu probable que les taux abandonnent à long terme leur inexorable tendance baissière.  En fonction du plancher estimé pour les taux, les détenteurs obligataires peuvent tirer parti de rallyes décents. Lorsque le Covid-19 a sévi, les investisseurs ont apprécié les emprunts d’État à faible rendement qu’ils détenaient en portefeuille, car les taux ont chuté de 190 à 50 points de base, ce qui a permis de dégager des plus-values en capital à deux chiffres. Mais même en dehors de ces accès de volatilité soudains, il est possible de trouver des sources d’alpha fiables dans des produits de spread qui offrent un rendement supérieur aux taux sans risque dans des environnements de faibles rendements. Les produits de spread se caractérisent en effet par un risque perçu qui tend à être plus élevé que le risque réel, ce qui constitue une inefficience du marché que les investisseurs obligataires actifs sont à même d’exploiter.

Par Simon Lue-Fong, Responsable des Obligations chez Vontobel

 

 

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