Société de gestion concentrée uniquement sur les petites et moyennes capitalisations européennes, Lonvia Capital vient de fêter son troisième anniversaire. Rencontre avec son président et directeur de la gestion, Cyrille Carrière, qui revient sur les raisons de la création de la société de gestion, sa méthodologie de gestion et sa vision des marchés actuels
Investissement Conseils : Pour quelles raisons avez-vous décidé de lancer Lonvia Capital en octobre 2020 ? Et où en êtes-vous dans votre développement ?Cyrille Carrière : Lonvia Capital est le fruit de mon association avec François Badelon, notre directeur général et ancien fondateur et directeur général d’Amiral Gestion, et moi qui a été analyste chez Rothschild et Cie Gestion, puis gérant chez Barclays et Groupama AM, ainsi que Cyril de Vanssay, avec qui je collabore depuis 2014 et qui est notre directeur adjoint de la gestion. Notre ambition était alors de poursuivre notre activité sur le segment des petites et moyennes valeurs européennes avec des moyens renforcés. Pour cela, nous avons doublé la taille de nos équipes avec deux analyses-gérants, Dorian Terral et Jacques Gout-Lombard, ce qui nous permet de proposer une gamme de trois fonds sur un gisement de valeurs très important en Europe.A cette équipe de gestion s’ajoute une équipe commerciale de deux personnes en France, Jérôme Guittet et Aurore Curtil, et deux autres personnes, Ivan Diez Sainz et Francisco Rodriguez D’Achille, basées à Madrid et qui couvrent l’Amérique latine et le marché ibérique, ainsi qu’une responsable de la conformité et du contrôle interne, Pascale Bradbury. Nous sommes donc dix personnes, toutes associées.Aujourd’hui, nous gérons 325 millions d’euros d’encours, dans un contexte de marché difficile pour notre univers d’investissement. Nous avons connu deux premières années dynamiques, particulièrement en 2022 avec 125 millions de collecte nette, puis une pause l’an passé avec seulement 10 millions d’euros nets collectés, sur une classe d’actif encore en forte décollecte. Notre panel d’investisseurs est bien équilibré entre institutionnels, multigérants, banques privées et CGP.
Quelles solutions proposez-vous ?Nous disposons de trois fonds qui investissent dans des petites et moyennes capitalisations de la zone euro-Europe.Le plus important est Lonvia Avenir Mid-Cap Europe qui compte plus de 280 millions d’euros d’encours, car il s’agit du fonds qui permet de bénéficier de la plus grande richesse d’innovation des valeurs moyennes européennes au sens large, en particulier celles des pays nordiques qui sont généralement plus en avance par rapport à celles de l’Europe du Sud.Tous nos fonds sont gérés selon le même process d’investissement et sont investis sur des valeurs de croissance, dans une perspective de long terme.
Pourriez-vous nous décrire votre philosophie de gestion ?Il est le reflet de mon parcours. En tant que gérant, j’ai développé mon propre process d’identification et d’analyse de sociétés créatrices de valeur. Il doit s’agir d’entreprises qui opèrent sur des marchés en développement et qui axent leur stratégie sur leur croissance, en investissant sur leurs produits, les hommes, de nouveaux marchés adressables ou encore leur déploiement géographique. En effet, en proposant un produit meilleur que leurs concurrents, ces valeurs construisent leur propre cercle vertueux de croissance : elles gagnent des parts de marché, augmentent leur marge, génèrent du cash-flow et réinvestissent constamment dans leur croissance future. Notre volonté est d’accompagner leur parcours sur cinq, dix, voire quinze années. Pour cela, nous menons un travail de valorisation de ces sociétés à moyen terme et cherchons à comprendre ce qu’elles seront dans les années futures.Nous construisons nos portefeuilles, constitués de quarante-cinq à soixante valeurs, de façon progressive. Plus la société est petite, plus son poids dans le fonds sera faible afin de maîtriser le risque opérationnel et le risque de liquidité. Au fil du développement de l’entreprise, ce risque spécifique baisse et son potentiel de croissance s’affirme, alors nous augmentons son poids dans le portefeuille. Il s’agit donc de renouveler par le bas notre portefeuille en dénichant les champions de demain. Nous accompagnons ces titres jusqu’à ce qu’elles atteignent un profil de valeur mature. Ainsi, si la capitalisation moyenne de nos portefeuilles s’élève à 5 milliards d’euros, la médiane est plus faible, à 2 milliards d’euros, avec certains titres pesant jusqu’à un minimum de 200 millions d’euros. Au final, le top 10 de nos fonds ne représente pas forcément nos dix principales convictions, mais les dix sociétés qui ont réussi à se créer leur poids dans le fonds grâce à leur performance.Le marché européen regorge de sociétés de niche à forte valeur ajoutée qui se déploient ensuite au sein de l’Europe, puis aux Etats-Unis et au niveau mondial. En moyenne, les valeurs en portefeuille affichent une croissance de l’ordre de 15 à 20 % par an, avec d’un côté de belles valeurs sur des marchés en croissance qui progressent de 8 à 10 % par an, notamment via des opérations de croissance externe, et d’un autre côté des sociétés très innovantes, notamment dans les domaines des logiciels ou des technologies médicales, qui affichent des taux de croissance annuels de l’ordre de 25 à 30 %.D’un point de vue sectoriel, nous n’avons pas de préférence, notre portefeuille étant la résultante de notre stock-picking. Néanmoins, notre méthodologie nous conduit à investir davantage dans certains domaines où le savoir-faire européen est fort, avec de bons ingénieurs et un bel écosystème. Il s’agit par exemple des technologies médicales, à savoir les sociétés qui équipent les biotechs, mais aussi la chirurgie robotisée des yeux ou du cerveau… Je pense également aux sociétés liées à la digitalisation de l’économie, ainsi qu’à l’automatisation et à la robotique pour l’industrie, des savoir-faire issus de nos écosystèmes liés à l’automobile et à l’aérospatial qui s’exportent également très bien, ou encore aux sociétés qui équipent les fabricants de semi-conducteurs.D’un point de vue géographique, certains pays ayant su créer de véritables écosystèmes se trouvent surpondérés, notamment la Suède, terre d’innovation sur le digital et le médical, l’Allemagne, qui compte un grand nombre de sociétés à forte valeur ajoutée, ou encore la Suisse, qui met l’accent sur la valeur ajoutée. Ces trois pays ont comme caractéristique commune de compter des entreprises qui sont nativement tournées vers l’internationalisation de leur activité.
Votre marché des petites et moyennes valeurs souffre sur le plan boursier…Les small et mid-caps sont actuellement pénalisées par la cyclicité des allocations. En tant que gérant, j’ai commencé ma carrière dans le creux de 2008, au milieu de la crise financière. Progressivement, les investisseurs se sont rouverts à la prise de risque : d’abord sur les large caps en 2012, puis en 2016 sur les petites et moyennes valeurs.Avec la normalisation de l’environnement économique, notamment de taux, les investisseurs vont progressivement revenir sur les petites et moyennes valeurs. La classe d’actifs reste attractive car c’est le lieu où se créent les modèles économiques de demain et où la génération d’alpha est la plus importante. Si le choc de taux a pesé sur leur valorisation en 2022 et que la volatilité des taux a pesé sur leurs cours l’an passé, ces valeurs continuent de délivrer une belle performance opérationnelle.Depuis la fin d’année dernière, nous observons un retour des investisseurs sur la classe d’actifs, certes encore timide, mais réel. Nous avons d’ailleurs assisté à un rallye en fin d’année dernière suite à la normalisation de l’inflation et de la baisse des taux longs, 2023 se révélant une année de solide performance boursière pour notre sélection de titres.
Un mot sur votre politique ESG ?Tous nos fonds sont labellisés ISR et sont classifiés article 9 SFDR. Depuis toujours nos portefeuilles sont constitués de valeurs ayant une utilité sociale. Ce critère est essentiel dans notre process. Nous avons donc toujours été intrinsèquement des investisseurs « responsables ».