Question issue de Fidnet, la base documentaire du groupe Harvest
Le PER a vocation à remplacer les anciens produits d’épargne-retraite, notamment le contrat article 83. Cependant, les contrats article 83 ne disparaissent pas automatiquement : il est possible de les conserver ou de les transférer pour bénéficier des avantages du PER. En conséquence, est-il plus intéressant de conserver son contrat article 83 ou de le transférer vers un PER ?
Oui, il est souvent pertinent de transférer son contrat article 83 vers un PER, principalement pour bénéficier de la gestion pilotée. Toutefois, les épargnants ayant des contrats article 83 avec peu d’encours ont plutôt intérêt à le conserver. Pour connaître la meilleure option, plusieurs points sont à analyser.
Attention, le choix du transfert n’est pas toujours laissé au souscripteur : certaines compagnies imposent la transformation de leur contrat article 83 en PER entreprise (PER obligatoire, un PERo plus précisément) : le souscripteur ne peut pas s’y opposer.
La transformation peut également être décidée par l’employeur : le salarié (souscripteur) est informé, mais ne peut pas s’y opposer. L’employeur doit également informer les salariés des conséquences de ce transfert, des caractéristiques du nouveau plan et des différentes avec le contrat article 83 (CMF. art. L. 224-40, IV bis ; depuis le 25 octobre 2023 : loi du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte). Le souscripteur peut aussi choisir de transférer les sommes qu’il détient sur son contrat article 83 vers son PER individuel uniquement s’il n’est plus salarié de l’entreprise (CMF. art. L. 224-40, I, 7° ; CSS. art D.242-1).
Pourquoi transférer son contrat article 83 vers un PER ?Pour améliorer les conditions de sortie en capital
Ce n’est pas pour pouvoir bénéficier d’une sortie en capital. En effet, les sommes investies sur un contrat article 83 font l’objet d’une rente viagère (pas de sortie en capital) et le transfert sur un PER individuel (ou la transformation en PER entreprise) ne permet pas de sortir en capital. En effet, les sommes issues du contrat article 83 sont versées dans le compartiment 3 dit compartiment « versements obligatoires » du PER, compartiment qui ne sort qu’en rente.
Une expertise et des échanges avec les différentes parties prenantes sont en cours afin d’étudier la possibilité et la pertinence d’ouvrir la sortie en capital au compartiment 3 du PER (RM Di Filippo, 3 octobre 2023, n° 5681).
Ce n’est pas non plus pour les cas de sortie anticipée, puisque le transfert d’un contrat article 83 vers un PER ne permet pas de sortir l’épargne lors de l’achat de sa résidence principale (en effet, les sommes sont transférées dans le compartiment 3 « versements obligatoires », qui ne peut pas être débloqué par anticipation pour l’achat de la résidence principale). Le transfert permet seulement de bénéficier d’un cas supplémentaire de sortie anticipée pour expiration des droits à chômage faisant suite à une démission ou une rupture conventionnelle (et pas uniquement suite à un licenciement comme c’est le cas sur un contrat article 83).
Certains contrats article 83 ont été transférés sur un Perp (avant le 1er octobre 2020), puis vers un PER. Les sommes à l’origine sur le contrat article 83, qui devaient être versées dans le compartiment 3 « versements obligatoires » du PER, ont donc été versées dans le compartiment 1 « versements volontaires » car provenant d’un Perp (CMF. art. L. 224-40, II, 1°).
Ce double transfert a pour effet de pouvoir sortir les sommes détenues originairement sur un contrat article 83 en capital au moment de la retraite ou, de manière anticipée, lors de l’achat de la résidence principale.
Ce système, bien que matériellement possible, est contestable, car contraire à l’intention de la loi qui impose une sortie en rente pour les sommes issues des versements obligatoires des contrats articles 83.
Par ailleurs, les frais de transferts sont dus deux fois, puisqu’il y a deux transferts (5 % maximum à chaque transfert), et les versements sont considérés comme des versements déduits (car le titulaire n’a pas renoncé à la déduction) et donc taxés à la sortie du PER (les primes sont taxées au barème de l’IR et les intérêts au PFU).
Pour une meilleure gestion financière du contrat
Le PER permet d’accéder à une offre plus vaste et plus concurrentielle que le contrat article 83 (unités de compte, titres vifs, OPCVM, SCI, fonds euros, etc.), ainsi qu’à la gestion pilotée par horizon afin de sécuriser l’épargne à l’approche de la retraite.
Le transfert vers un PER peut également permettre de sortir d’un contrat article 83 à faible rendement ou avec des frais de gestion trop élevés.
Pour l’entreprise, la transformation en PER entreprise permet de bénéficier du forfait social réduit à 16 %, voire d’une exonération de forfait social (au lieu d’un taux à 20 %) si le PER prévoit une gestion pilotée.
Enfin, le transfert à titre individuel des sommes détenues sur un contrat article 83 vers un PER individuel permet au salarié ayant quitté l’entreprise de regroupement l’ensemble de son épargne-retraite sous un même contrat.
Pour transmettre son épargne en cas de décès
L’épargne accumulée sur le PER peut être transmise en capital aux bénéficiaires désignés (et pas uniquement en rente, comme c’est le cas des contrats article 83). Attention, la fiscalité en cas de décès sur un PER est plus lourde que la fiscalité applicable au contrat article 83.
Le transfert en pratique
Transformation en un PER obligatoire (PERo)
En cas de transformation décidée par la compagnie ou par l’entreprise, le coût et les modalités sont préétablis : en principe les frais ne sont pas facturés au salarié.
Transfert individuel (vers un PER individuel)
Le souscripteur peut transférer les sommes qu’il détient sur son contrat article 83 vers son PER individuel (PERin) : ce transfert n’est possible que si le salarié n’est plus tenu d’adhérer au contrat article 83, c’est-à-dire s’il n’est plus salarié de l’entreprise (CSS. art. D.242-1).
Le transfert permet en principe de distinguer l’origine des versements : les versements volontaires intègrent le compartiment 1 « versements volontaires », les versements obligatoires intègrent le compartiment 3 « versements obligatoires ». Si le gestionnaire ne peut pas ventiler entre les différents types de versement, l’intégralité des sommes intègre le compartiment 3 « versements obligatoires ». Les frais de transfert peuvent aller jusqu’à 5 % maximum si le contrat article 83 a moins de dix ans. Au-delà de dix ans, il n’y a aucuns frais de transfert (C. ass. art. R. 132-5-3, [ancien art. R. 331-5]). A compter du 24 octobre 2024, les frais de transfert des anciens contrats ne pourront pas excéder un montant fixé par décret (CMF. art. L 22440 I bis).
Le nouveau gestionnaire doit informer le titulaire, avant le transfert, des caractéristiques du PER individuel et des différences entre le contrat article 83 et le PER (CMF. art. L. 224-40, III, al 1).
Dans quels cas faut-il conserver son contrat article 83 ?
Dans certains cas, il est préférable de conserver son contrat article 83 :
- si, au moment du départ en retraite, l’encours du contrat article 83 est inférieur à 38 000 € (en cas de départ à la retraite à 62 ans) ou 35 000 € (en cas de départ à la retraite à 64 ans) : il est possible de sortir en capital en intégralité (sur accord de la compagnie d’assurance), avec une taxation à 7,5 % après un abattement de 10 % et aux prélèvements sociaux à 17,2 % (cas des « faibles rentes », c’est-à-dire des rentes inférieures à 110 € par mois ; C. ass. art. A 160-2) ;
- si le contrat article 83 offre des garanties complémentaires plus intéressantes, notamment en prévoyance ;
- si le souscripteur souhaite optimiser fiscalement la transmission de son épargne. Les capitaux détenus via un contrat article 83 sont transmis aux bénéficiaires en rente (et non en capital comme sur un PER) ; cependant, la fiscalité en cas de décès sur un contrat article 83 est plus faible que sur un PER, notamment en cas de décès après 70 ans : sur un contrat article 83, les capitaux bénéficient d’un abattement de 152 500 € par bénéficiaire dès lors que les primes ont été versées avant 70 ans (CGI. art. 990 I) ; sur un PER, la fiscalité des capitaux-décès dépend de l’âge du souscripteur au moment de son décès (et non de son âge à la date de versement des primes) : en cas de décès après 70 ans, un abattement global de 30 500 € s’applique puis de droits de succession (CGI. art. 757 B) ; ainsi, le transfert du contrat article 83 vers un PER peut être pénalisant en cas de décès après 70 ans.
Références
CMF. art. L. 224-1 ; L. 224-4 1° à 6° ; L. 224-5 ; L. 224-20 ; L. 224-25 ; L. 224-27 al 2 ; C. ass. art. A 160-2 ; L. 132-23 ; L. 142-3 ; C. mutualité art. L. 223-22 ; C. travail art. L. 3335-2 ; C. ass. art. R.331-5 ; C. ass. art. D. 242-1 al 9 ; loi de finances pour 2017, art 60, II K ter ; loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte) art. 71. III.