Depuis sa création en 2016, le Label ISR a considérablement gagné en notoriété, à mesure que la demande de fonds ISR s’est renforcée. Cependant, à l’origine ambitieux, le label a progressivement été dépassé par les progrès de la finance durable. Dans ce contexte, et face à la menace croissante d’écoblanchiment, des travaux de refonte du référentiel ont été lancés en 2021 et ont abouti à un nouveau référentiel, entré en vigueur le 1er mars 2024. Au-delà de l’adaptation nécessaire des fonds labellisés aux nouvelles exigences, ces dernières supposent aussi des ajustements dans les rangs des CGPI.
Une refonte ambitieuse, fondée sur trois axes
La réforme du label a été lancée en 2021, à la suite d’un rapport de l’Inspection Générale des finances. Après 18 mois de travaux et deux consultations publiques, le comité du Label ISR a proposé en juillet 2023 ses recommandations définitives au ministre chargé des Finances, qui assure la tutelle du label.
Trois axes majeurs ont été retenus :
* Les critères de sélectivité ont été renforcés. Les gérants doivent désormais exclure de leur univers d’investissement initial les 30% de valeurs qui affichent les plus faibles notes ESG, contre 20% précédemment. Une pondération d’au moins 20% pour chaque pilier E, S et G est maintenant souhaitée et de nouvelles « poches » d’exclusion ont été définies (une grande partie des énergies fossiles, le tabac, l’armement non-conventionnel, les paradis fiscaux…). Les exigences en matière de gestion des controverses, d'engagement actionnarial et de politique de votes ont aussi été renforcées, en cohérence avec une gestion responsable des investissements.
* La prise en compte systématique de la double matérialité, avec la mesure des effets des piliers E, S et G sur la performance des portefeuilles des fonds mais aussi des potentielles incidences négatives, dans ces trois domaines, des entreprises dans lesquelles ils investissent. Les fonds doivent également choisir, parmi les indicateurs d’incidences négatives de la SFDR, au moins l’un des deux indicateurs ESG qu’ils doivent « surperformer » par rapport à leur univers d’investissement.
* Le renforcement des exigences du label au regard des enjeux climatiques, sujet incontournable pour toute démarche ESG aujourd’hui. Le référentiel prévoit l’exclusion des émetteurs ayant des activités liées au charbon, à l’exploitation d’énergies fossiles non-conventionnelles, ou développant de nouveaux projets d’exploration, d’exploitation et de raffinage d’énergies fossiles (conventionnels et non-conventionnels), ainsi que ceux ayant des activités de production d’électricité trop fortement émettrices de gaz à effet de serre. En outre, les fonds vont devoir analyser les plans de transition des entreprises qui présentent des enjeux climatiques, avec notamment une exigence de 15% de plan de transition alignés sur l’accord de Paris dès 2026.
Le nouveau référentiel est entré en vigueur le 1er mars 2024 pour les nouveaux fonds candidats, plusieurs étaient en cours de labellisation dès mai 2024. Les fonds déjà labellisés, eux, auront jusqu’au 1er janvier 2025 pour mettre à jour leur stratégie s’ils souhaitent conserver leur certification.
Comment les conseillers de gestion peuvent-ils accompagner leurs clients et les aider à investir de manière responsable avec le label ISR ?
Dans cette période de transition, les CGPI jouent un rôle crucial. Voici quelques leviers qu’ils peuvent aujourd’hui activer pour guider les épargnants et les aider à comprendre l’essence de ces différents changements :
Rester informé :
Pour guider leurs clients et leur proposer des solutions d’investissement pertinentes, les CGPI doivent être au fait des nouvelles règles et des nouveaux critères du label ISR. Une bonne compréhension de ces changements leur permettra de fournir des conseils précis et pertinents à leurs clients.
Pour cela, les professionnels peuvent s’appuyer sur des webinaires dédiés ou des bulletins d’information. Le comité du label ISR reste également disponible à travers le site internet du label pour répondre à toutes les questions sur la refonte et ses nouvelles exigences, mais aussi sur le processus de certification.
Ils devront continuer à suivre activement le marché et s’engager auprès des sociétés de gestion pour mieux comprendre leur processus d’adaptation face aux nouvelles règles du référentiel et assurer le suivi des certifications. Ces informations peuvent s'avérer précieuses pour conseiller les clients et prendre des décisions d'investissement éclairées.
Sensibiliser les clients :
Les conseillers de gestion vont également faire face à un enjeu de pédagogie auprès de leurs clients. Si les épargnants s’intéressent de plus en plus à l’ISR, beaucoup sont encore mésinformés sur le sujet et ont encore des idées reçues sur l’investissement responsable, la réalité des outils et leviers à sa disposition, ainsi que sa contribution au développement d’une économie plus durable. La refonte récente du label ISR apporte de nombreuses modifications, il est donc clé que les CGPI s’en emparent afin de pouvoir informer leurs clients des changements et potentielles répercussions sur leurs investissements.
Pour les clients qui ont déjà des fonds labellisés dans leur portefeuille, un examen de la part du conseiller semble nécessaire afin d’identifier les fonds labellisés en cours de mise à jour, ou les fonds qui vont choisir de ne plus être labellisés, pour procéder aux ajustements nécessaires et s’assurer que les portefeuilles respectent toujours les objectifs déterminés par l’épargnant.
Dans le cas des épargnants qui n’auraient pas encore fait le choix de l’investissement responsable, la nouvelle version du label ISR offre de nombreuses opportunités au conseiller de présenter les avantages de ce type d’investissement, qui vise notamment à concilier performance financière et extra-financière.
Ainsi, rester informé des évolutions du marché de l’investissement responsable, telles que la mise à jour des exigences du label ISR, représente une opportunité pour les CGPI d’apporter une véritable valeur ajoutée à leurs clients, associant transparence, pédagogie et sensibilisation, et ainsi gagner en crédibilité auprès de ces derniers.