Crystal, Herez, Cyrus, Patrimmofi, Astoria, Premium… La liste des consolidateurs du marché des cabinets de gestion de patrimoine, épaulés par des fonds de Private Equity, devient de plus en plus longue. Conséquence : les prix flambent, même si les projets proposés par chacun de ces acteurs diffèrent. Le point sur ce mouvement qui prend de plus en plus d’ampleur.
Rares sont les semaines sans qu’un acteur du marché des CGP n’annonce l’acquisition d’un cabinet. La consolidation du marché s’est accélérée ces derniers mois, sous s’est accélérée ces derniers mois, sous l’impulsion des prises de participation des fonds de Private Equity.Armés de moyens financiers nécessaires à ces opérations, les consolidateurs du marché s’en donnent à coeur joie ! Et ils sont toujours plus nombreux à participer à ce mouvement. On en compte plus d’une dizaine – le groupe Cyrus, Herez, Astoria, Crystal, Carat Capital, le groupe Premium, mais aussi Patrimmofi, Financière d’Orion ou, plus récemment encore, Equance –, tous soutenus par des fonds d’investissement prenant une participation le plus souvent majoritaire. « Les rachats de cabinets se poursuivent à un rythme soutenu, dopés par les fonds de Private Equity. Ce sont aujourd’hui seize acteurs du capital-investissement qui participent à la consolidation du secteur. Ces fonds accélèrent le rapprochement de cabinets et aident les CGP de toutes tailles à se regrouper », note Meyer Azogui, président du groupe Cyrus.Et ces annonces successives donnent des idées aux CGP : « Avec les diverses opérations annoncées chaque mois, il existe un phénomène d’entraînement, d’autant plus qu’il s’agit généralement du bon moment pour les CGP de réaliser leur actif professionnel, d’autant plus que les conditions sont particulièrement bonnes pour eux », observe Bruno Narchal, président et fondateur du groupe Crystal. Particulièrement dynamique depuis l’arrivée d’Apax à son capital, le groupe a, par exemple, réalisé seize opérations de croissance externe au cours des quatorze derniers mois, et d’autres sont en cours de finalisation, dont certaines d’ici fin septembre. Pour mener à bien ces opérations, le groupe s’appuie sur une équipe M&A en interne, dirigée par Benjamin Brochet. Proforma, le groupe Crystal représente aujourd’hui 6,8 milliards d’euros d’encours, 1,2 milliard d’euros de collecte annuelle, 100 millions d’euros de chiffre d’affaires pour plus de trois cent cinquante collaborateurs. L’objectif est de dépasser rapidement les 10 milliards d’euros d’encours.Le groupe Patrimmofi, qui a ouvert son capital à Andera Partners il y a un an, n’est pas en reste. La société présidée par Georges Nemes a récemment acquis le cabinet montpelliérain Asfidia (150 millions d’euros d’encours), dont le fondateur, Hervé Lebas, a rejoint l’équipe comme dirigeant entrepreneur associé du groupe, et plus récemment Haskell Patrimoine, un cabinet parisien dirigé par Frédéric Haskell et doté de 100 millions d’euros d’actifs sous gestion. Auparavant, ce sont Arnaud Dubois & Associates, Hortus Patrimoine, ICF, Institut du patrimoine, Rive Gauche Finance, Solon Entrepreneur Office et Valorial qui avaient rejoint le groupe.
Une activité attractive pour les fonds de Private EquityPour Sébastien Leleu, associé chez Pax Corporate Finance, les prises de participation des acteurs du capital-investissement sont la preuve de la qualité du modèle des CGP : « Pour les fonds de Private Equity, la gestion de patrimoine est une activité attractive, car rentable, et dont le chiffre d’affaires est récurrent et prévisible. Parallèlement, la part de marché des CGP a explosé : les banques de détail ne remplissent plus leur rôle de conseil indépendant, et les banques privées ont augmenté leur seuil d’intervention au-delà de 10 millions d’euros. La base de clients potentiels augmente donc, et les CGP ont toutes les armes pour capter ces nouveaux clients. Aujourd’hui, les conseillers en gestion de patrimoine ne jouent que pour 10 % du marché, contre 20 à 30 % dans d’autres pays européens. Les investisseurs arrivent donc en soutien d’entrepreneurs CGP pour développer des groupes nationaux. » Georges Nemes observe un élargissement des typologies de cabinets soutenus dans leur démarche de consolidation. « Les fonds de Private Equity ont d’abord accompagné les plus grosses structures, puis les acteurs de taille plus modeste. Les tentatives de recrutement s’opèrent à tous les niveaux:les petits cherchant à devenir moyens, les moyens souhaitant devenir gros et les gros, très gros. »Un soutien appréciéPour les consolidateurs du marché, être soutenu par des fonds de Private Equity a de nombreuses vertus. Olivier Farouz, président du groupe Premium, est accompagné dans sa stratégie par Eurazeo, depuis mars 2021, qui a pris le relais de Montefiore. « Nous privilégierons toujours un fonds d’investissement à un industriel, car nous souhaitons rester maîtres de notre développement. » Chez Crystal – dont le capital est majoritairement détenu par Apax Partners (55 %), tandis qu’Ofi et 123 IM cumulent une participation de 17 %, le solde (28 %) étant détenu par une soixantaine de personnes physiques –, Bruno Narchal se félicite de la prise de participation d’Apax : « Il s’agissait de notre premier LBO. Nous en sommes très satisfaits et, avec le recul, nous aurions dû y avoir recours plus tôt. En effet, nous sommes accompagnés par des personnes de grande qualité qui soutiennent notre développement et permettent l’association de nombreux CGP. J’apprécie réellement cette période très enrichissante. » « Pour nos nouveaux associés et pour les futurs, la formule du fonds majoritaire permet d’assurer un juste équilibre entre la valeur d’aujourd’hui et celle de demain – avec un alignement d’intérêts tant sur la valorisation de la société que sur l’horizon de liquidité », ajoute Benjamin Brochet, directeur général délégué du groupe.Dans certaines structures, la prise de participation reste minoritaire, comme c’est le cas chez Cyrus. « Nous avons choisi un modèle où les associés et les salariés restent largement majoritaires puisque nous contrôlons 66 % du capital, expose Meyer Azogui. Lors de l’intégration d’un cabinet, les dirigeants en place deviennent actionnaires du groupe en réinvestissant entre 15 à 40 % du produit de la cession de leur cabinet. »Réaliser des économies d’échelleOutre l’appétit des fonds de capital-investissement pour la rentabilité de l’activité, les raisons de ce mouvement de consolidation sont multiples. Longtemps annoncée, la concentration des acteurs répond notamment à la mise en place d’économies d’échelle, alors que le marché reste très atomisé, avec une majorité de cabinets composés d’une à deux personnes, et que les coûts liés à la réglementation et à la digitalisation ont grimpé en flèche.Selon Sébastien Leleu, « Depuis trois ans, le marché est devenu très actif. Le confinement a mis en lumière le secteur et certains aspects propices à la consolidation. La digitalisation de l’activité et les contraintes réglementaires forcent les cabinets à s’organiser. Or beaucoup de CGP n’ont pas cette volonté et souhaitent se concentrer sur leur activité de conseil patrimonial. Ils ne souhaitent pas passer leur temps à développer des outils ou s’occuper des ressources humaines, ce qui va dans le sens de la mise en commun de ses fonctions supports ».
Des approches diversesCes nouveaux groupes de gestion de patrimoine poursuivent des objectifs qui peuvent varier d’un acteur à l’autre, le tout avec des arguments à faire valoir auprès des cédants différents.Par exemple, pour Cyrus Conseil, acteur historique du mouvement de consolidation actuel, l’objectif est de constituer une marque forte sur le marché. « Cyrus a une ambition forte : créer une marque réflexe de la gestion privée grâce à des expertises reconnues, et à la profondeur et la qualité de notre offre. Pour cela, nous combinons une croissance organique forte et une croissance externe maîtrisée ». Après avoir réalisé quatre acquisitions importantes l’an passé (dont l’acquisition d’Amplegest), le groupe présidé par Meyer Azogui a récemment acquis le cabinet Andésia (basé à Paris, 230 millions d’euros d’encours). Ainsi, depuis l’arrivée de Bridgepoint Development Capital aux côtés de son équipe dirigeante en 2020, le groupe a acquis un total de 4,2 milliards d’euros d’encours pour atteindre 9,3 milliards d’euros gérés pour le compte de cinq mille familles. « A l’exception du rapprochement avec Andésia, nous avons entamé une phase de pause afin de nous concentrer sur la bonne intégration de nos dernières acquisitions, affirme Meyer Azogui. Nous avons en effet doublé de taille l’an passé, et nous nous accordons le temps de permettre aux équipes de se connaître et de mettre en place des synergies. La croissance externe n’a de sens que si elle améliore la proposition de valeur pour l’ensemble des clients du groupe tout en conservant les équipes présentes pour créer ainsi “le meilleur des deux mondes”. » A l’inverse, le groupe Premium crée de toutes pièces son pôle de gestion de patrimoine, aux côtés de ses activités dans l’asset management et le courtage de produits d’épargne. Pour cela, le groupe compte s’appuyer sur les compétences et qualités des hommes et des femmes qui le rejoignent. Olivier Farouz, son président, confie:«Nous visons des cabinets dont les dirigeants ont de belles compétences et surtout des qualités humaines. Le cabinet toulousain Linard-Charbonnel (215 millions d’euros d’encours) en est l’exemple-type, avec à sa tête l’exceptionnelle Hélène Linard-Charbonnel. Ces CGP restent les maîtres à bord de leur structure : nous n’avons pas de volonté de créer une marque commune, car il s’agit le plus souvent de sociétés bien établies localement. Leur bonne réputation nous permet ensuite de nous en servir de consolidateurs au niveau local pour créer des pôles régionaux. Avec nous, ils participent à la création d’un groupe national dont ils bénéficient de la croissance en étant actionnaires. » L’ambition du groupe est d’assurer un maillage territorial. Si le groupe Premium a réalisé une opération pour sa société de gestion Flornoy Ferri (la société de conseil en gestion de patrimoine L’Ibéroise), la structure cherche avant tout à renforcer son pôle CGP. Depuis l’annonce de la création de son pôle gestion de patrimoine en juillet 2021 et le recrutement de Yann Pelard en tant que directeur des opérations du groupe, le groupe Premium a réalisé plusieurs acquisitions : Leone Kapital, Renard Partenaires ou encore I-Kapital (conception de produits structurés). Dernière acquisition en date, le groupe Forward, spécialisé en conseil en gestion privée et institutionnelle, basé à Paris et présent à Aix-en-Provence et Montpellier (15 milliards d’actifs conseillés, dont 600 millions d’euros d’encours placés). Autre exemple, le groupe Crystal poursuit ainsi son développement autour de quatre axes principaux : -la montée en gamme. « Nous souhaitons couvrir l’ensemble des segments de clients jusqu’au luxe, avec la création d’une activité de family office. Cela est très important en termes d’image et pour faire connaître nos expertises », expose Bruno Narchal; - la digitalisation de l’activité, avec la mise en place d’une plate-forme commune à l’ensemble des structures du groupe. Pour cela, Crystal s’était porté acquéreur de la technologie développée par Grisbee et à partir de laquelle un outil propriétaire est développé pour l’ensemble des besoins des clients, associés, CGP, collaborateurs du middle-office…; - la croissance externe. Le groupe a notamment vocation à se renforcer dans des zones géographiques où il n’est pas encore présent, par exemple le Grand Est (Lorraine, Alsace, Bourgogne et Franche-Comté), mais aussi dans les grandes métropoles où il est déjà présent.-l’intégration de structures sur l’ensemble de la chaîne de valeur avec WiseAM pour l’asset management financier en multigestion et l’immobilier, Pierres by Crystal, pour l’immobilier direct (en particulier les opérations de démembrement), et Zenith Capital, pour les produits structurés. « Cela nous permet de mieux maîtriser nos produits qui ont une place significative dans les portefeuilles de nos clients », note Benjamin Brochet; A périmètre constant, le groupe affiche depuis cinq ans une croissance organique de plus de 15 %.
Intégrations verticalesEn effet, outre l’acquisition de cabinets de gestion de patrimoine, certains acteurs se sont lancés dans l’intégration verticale, c’est-à-dire l’acquisition de sociétés de production de produits. C’est le cas depuis de nombreuses années pour le groupe Cyrus, avec Invest AM qui a fusionné avec Amplegest, Eternam ou encore la prise de participation au sein d’Altixia. « L’intégration verticale est une démarche qui tente beaucoup d’acteurs, notamment au niveau des sociétés de gestion. Mais ce mouvement répond aussi au besoin de faire face à la problématique de remise en cause du modèle économique de la profession », précise Georges Nemes.
S’associer à un projet d’envergurePour les cédants, l’opération leur permet le plus souvent de réaliser une partie de leur actif professionnel et d’en réinvestir une autre partie au sein du projet qu’ils rejoignent. L’objectif pour les consolidateurs du marché est ici de pouvoir associer ces CGP à leur projet dans la durée, en s’appuyant sur leurs compétences. Les cédants continuent ainsi d’exercer leur activité en se déchargeant des tâches non productives assumées par le groupe. Chez groupe Premium, le management des cabinets conserve une partie du capital de leur structure en devenant actionnaire. Généralement, le CGP réalise 50 % de cash-out, et investit les deux tiers restant dans le cabinet et le solde dans le groupe. Les cabinets peuvent s’appuyer sur les services du groupe dans les domaines des RH, de la compliance, de la formation, ainsi que sur la société de gestion Flornoy Ferri et sur I-Kapital pour les produits structurés.Chez groupe Crystal, toutes les acquisitions sont réalisées à 100 %. Les CGP réinvestissent une partie du fruit de la cession et bénéficient ainsi du développement de l’ensemble de la structure. « Les CGP qui nous rejoignent poursuivent alors leur activité au sein du groupe, tout en gardant une forte autonomie commerciale et en profitant des synergies en étant libérés de la gestion quotidienne de leur cabinet. La plus grande préoccupation est la bonne intégration des cabinets et de leurs associés, eu égard à notre rythme. C’est la face cachée de l’iceberg », expose Bruno Narchal. Benjamin Brochet poursuit : « Pour cela, nous avons créé une mécanique d’intégration avec l’appui d’un cabinet de consultants lors de l’acquisition des cabinets du Projet Victoire. Leur bonne intégration repose avant tout sur l’humain. C’est pourquoi nos rachats se font fréquemment par cooptation. Avant toute acquisition, nous portons toute notre attention sur les qualités humaines, avant d’envisager les aspects financiers. Il doit s’agir de bons professionnels qui se reconnaissent dans notre projet. En faisant le choix de Crystal, ils s’adossent à un groupe et évoluent au sein de celui-ci. En effet, nous ne nous portons pas acquéreurs de portefeuille secs, car nous souhaitons conserver la relation qu’entretient le CGP avec ses clients et qui constitue sa force vis-à-vis de nos concurrents banquiers. Nos nouveaux associés se soucient du bon passage de relais avec leurs collaborateurs avec lesquels des parcours d’association peuvent être envisagés au sein du groupe. Ce compagnonnage est une des vertus offertes par notre projet. » Tous l’assurent, la croissance externe n’est pas qu’une affaire de gros sous, mais aussi une aventure humaine et entrepreneuriale. « Au sein du groupe Patrimmofi, nous sommes attachés à la qualité des femmes et des hommes que nous rencontrons, confirme Georges Nemes. Nous souhaitons nous associer à des professionnels qui cherchent à s’investir dans un projet, le nôtre, et à donner une nouvelle dimension à leur carrière, non pas ceux qui souhaitent prendre leur retraite ou uniquement maximiser leur prix de cession. » Vers un tassement des valorisations ?Il n’en reste pas moins que les prix de cession ont fortement augmenté, jeu de la concurrence oblige. « Je pense que nous avons atteint un plafond de valorisation:il ne me semble en effet pas logique d’évaluer des cabinets plus chers que les structures qui concourent à leur consolidation !, indique Georges Nemes. Aujourd’hui, les multiples tournent autour de dix à douze fois l’Ebitda, parfois quinze dans des cas exceptionnels, contre sept à huit fois il y a encore un an. Les deux prochaines années devraient encore rester dynamiques, d’autant plus que les banquiers d’affaires sont très actifs dans ce domaine:les CGP sont hyper-sollicités pour revendre leur cabinet, alors qu’auparavant les opérations se réalisaient de gré à gré. » « La période est idéale pour les cabinets de taille intermédiaire (100 à 500 millions d’euros d’encours) avec une bonne dizaine d’acteurs qui sont en phase de déploiement par acquisition, constate Sébastien Leleu. Les cibles les plus recherchées sont des cabinets bien organisés, avec des dirigeants qui souhaitent s’associer à un projet de développement. Il existe une vraie concurrence sur ces cabinets, notamment ceux qui permettent d’acquérir une position géographique forte. Certains cabinets plus petits font aussi l’objet d’une consolidation locale.»Des niveaux de valorisation qui sont voués à rester élevés ? A court terme, oui, selon Sébastien Leleu qui anticipe ensuite une décrue. « D’ici un ou deux ans, les valorisations pourraient baisser, car les acquisitions deviendraient moins stratégiques. » Rompu depuis plusieurs années aux acquisitions, Meyer Azogui juge certains prix déraisonnables : « nous estimons qu’actuellement les prix ne sont pas toujours cohérents. Certains cabinets sont valorisés comme des sociétés structurées, alors qu’ils représentent plus des fonds de commerce. Or un cabinet se valorise également par sa marque, ses process, ses relations interprofessionnelles… Nous sommes passés en deux-trois ans d’un modèle de valorisation fondé sur un multiple de commissions d’encours récurrent à un multiple d’Ebitda ! Est-ce vraiment raisonnable pour un cabinet de quelques dizaines de millions d’euros d’encours, qui plus est dans la conjoncture actuelle ? C’est pourquoi nous sommes de plus en plus sélectifs dans nos acquisitions, notamment sur les qualités humaines et la culture commune des équipes, et leur facilité à rejoindre notre modèle. La bonne intégration est cruciale; empiler des structures ne crée pas une marque. Il faut pour cela un affectio societatis fort, et il convient donc de s’assurer que les dirigeants qui nous rejoignent adhèrent au projet commun et à une vision partagée. » Pour autant, tous les acteurs assurent ne pas surpayer leurs acquisitions. « Aujourd’hui, notre forte croissance organique nous permet d’être très sélectifs dans les dossiers que nous recevons, assure Olivier Farouz. Notre philosophie n’est pas de se lancer dans une course effrénée aux acquisitions, et ainsi de rester mesuré dans les prix d’acquisition. Si les prix demeurent élevés actuellement, la hausse des taux ne sera pas neutre dans les valorisations. Mais la concurrence est telle que les tarifs vont rester élevés avec l’arrivée d’acteurs d’une taille inférieure.»L’objectif du groupe (y compris les branches courtage et asset management) est de représenter 10 milliards d’euros sous gestion, d’ici 2025.
Prochaine étape, la concentration des consolidateurs ?« La prochaine étape pourrait être la consolidation d’acteurs plus gros entre eux », estime Meyer Azogui. D’ailleurs, Olivier Farouz avoue avoir « pensé à un rapprochement avec un autre gros acteur. Cela peut avoir du sens dans le futur, mais aujourd’hui nous restons focalisés sur les acteurs de taille plus petite, bien établis, et avec des dirigeants agiles et motivés ». Benjamin Brochet estime également que « la fusion entre gros acteurs est possible. Cela s’est vu dans d’autres secteurs. Nous sommes aujourd’hui la première génération de consolidateurs, et avons tous un ADN assez marqué, ce qui rend la compétition agréable et qui fait que les discussions ne reposent pas toujours sur le prix de cession. Toujours est-il qu’il reste encore beaucoup à faire car le marché est profond avec une multitude de petits cabinets. » Ces mouvements entre gros acteurs pourraient être initiés après les premières sorties de fonds, « mais tout dépendra du nombre d’acteurs moyens – entre 500 et 800 millions d’euros d’encours – qui vont émerger et qui pourraient intéresser les leaders du marché, estime Georges Nemes. Je ne suis d’ailleurs pas certain que cette concentration se fasse uniquement avec l’appui de fonds de Private Equity, certains industriels pourraient en effet être tentés de créer, par croissance externe, une branche de conseil en gestion de patrimoine. »
« Un mouvement de consolidation et non de concentration »Pour Julien Seraqui, récemment réélu président de la CNCGP, le mouvement de marché actuel est la preuve que les CGP gagnent et continueront de gagner des parts de marché.
Investissement Conseils : Quel regard portez-vous sur le mouvement de consolidation du marché des CGP ?Julien Seraqui : Ce mouvement est la preuve que notre marché est en forte croissance. Il est le seul où se développent des acteurs plus puissants, dont le nombre augmente. La situation est idyllique:les CGP captent des parts de marché, tant sur le conseil que sur la collecte d’épargne. Les membres de la CNCGP représentent une centaine de milliards d’euros d’encours; si le rythme de croissance actuel se maintient, ils attendront 300 milliards d’ici 2030.
Les petites structures sont-elles vouées à disparaître ? Je ne le pense pas : au contraire, leur nombre augmente. Il s’agit davantage d’un mouvement de consolidation du marché autour de groupes plus importants et solides que d’un mouvement de concentration, c’est-à-dire de réduction du nombre d’acteurs.
Faut-il craindre l’arrivée de ses fonds de Private Equity ?Pas du tout ! Pourquoi avoir des réticences vis-à-vis de ces acteurs, alors que nous conseillons des fonds de Private Equity chaque jour à nos clients ? Les fonds d’investissement ont bien compris que notre marché était en croissance et que le modèle économique des CGP était sécurisé. Le potentiel est énorme sur la clientèle patrimoniale qui va de 50 000 euros à 5 millions d’euros d’actifs placés. Les groupes de CGP sont de mieux en mieux armés pour répondre aux besoins de ces clients.
Pourrait-on assister à des introductions en Bourse de CGP ?Pas dans un avenir immédiat, car il s’agit toujours de cabinets à taille humaine dont le chiffre d’affaires atteint une centaine de millions d’euros. Mais pourquoi pas d’ici cinq à dix ans ?
« Cela va très (trop ?) vite… » Le président de La Compagnie des CGP, Philippe Feuille, se veut vigilant face à l’arrivée de fonds de Private Equity. Il faut selon lui veiller à ce que les CGP ne perdent pas leur âme… Investissement Conseils : Quel regard portez-vous sur l’arrivée des fonds de Private Equity sur le marché des cabinets de CGP ?Philippe Feuille : Ce qui me soucie avec l’arrivée massive de ces fonds, c’est le bon suivi des clients finaux. En particulier les petits porteurs:seront-ils toujours bien suivis ? Attention à ce que les gros cabinets ne deviennent pas des banques privées, avec leur lot d’avantages, mais aussi d’inconvénients, en particulier l’industrialisation des process à outrance… Ce mouvement me rappelle celui de l’industrie alimentaire, avec l’arrivée des grandes surfaces qui devaient éliminer les petits commerçants. Il est difficile de savoir comment cela va tourner pour le marché des CGP, mais la vigilance est de mise car cela va très (trop ?) vite… Néanmoins, il est vrai que notre activité intéresse de plus en plus d’acteurs, ce qu’on n’aurait pas imaginé il y a quelques années en arrière. Je considère néanmoins que faire entrer à son capital un fonds d’investissement va à l’encontre du choix initial qu’ont fait les CGP de travailler de façon indépendante.
Parallèlement, la dynamique des créations de cabinets est très bonne…Tout à fait, de plus en plus de jeunes se lancent. A la Compagnie, nous avons enregistré une hausse de 11 % de nos effectifs sur les six premiers mois de l’année et les demandes d’adhésion continuent d’arriver. Ces nouveaux entrants arrivent tous avec la volonté d’assurer un suivi de proximité et régulier de leurs clients pour les accompagner dans leurs projets de vie, ce qui est le coeur du métier de CGP.