L’essor du Private Equity immobilier

01/09/2024 - source : Investissement Conseils

Le Private Equity immobilier déploie ses ailes. Longtemps réservé aux investisseurs professionnels, le capital-investissement s’est ouvert au grand public. Sur un marché de la pierre atone, les performances élevées et les stratégies d’arbitrage, agiles et opportunistes permettent aux particuliers de profiter des meilleures opportunités du marché.

Longtemps réservé aux initiés, le Private Equity immobilier bénéficie d’une fenêtre de marché particulièrement favorable à son déploiement à plus grande échelle. Ces fonds d’investissement financent la promotion immobilière comme les opérations de marchands de bien (rénovation, transformation), ou encore, les projets de recyclage urbain. « Le Private Equity va chercher, à l’intérieur d’un même fonds, toutes les stratégies immobilières permettant aux gestionnaires d’arbitrer sur les marchés les plus rentables », résume Céline Aussenac, responsable ingénierie et développement produits de Stellium Placement, filiale de Finzzle group. Plus diversifiés que le Crowdfunding et complémentaires aux SCPI, les fonds de Private Equity (FCPR, FPCI, FPS) séduisent les investisseurs non-averses au risque (perte de capital, illiquidité) et en quête d’une performance élevée, jusqu’à trois fois plus que les véhicules « classiques ». A l’inverse du Public Equity, le Private Equity consiste à souscrire dans des sociétés privées non cotées, sous la forme d’actions ou d’obligations.Selon Céline Aussenac, le Private Equity « a la qualité d’offrir une option d’investissement qui intervient à différents niveaux d’une opération immobilière : très en amont, dès la promotion ou, plus tard, à l’étape de la construction ou de la réhabilitation, jusqu’à la commercialisation du bien… Avec les risques structurels et conjoncturels que chacune de ces étapes implique – qualité de la signature ou du projet, blocages juridico-règlementaires, fluctuations des prix de marché, etc. ». Mal connus du grand public, ces produits ont bénéficié de la digitalisation accélérée par le Covid qui a facilité leur accès et leur compréhension par une clientèle non avertie. Depuis trois ans, les platesformes d’investissement contribuent largement à la démocratisation du capital-risque en simplifiant les procédures de souscription et la recherche d’informations sur ces fonds. Preuve de l’intérêt suscité : les nouveaux véhicules se multiplient et ils sont plus nombreux à être éligibles aux unités de compte des contrats d’assurance vie et des PER.

Ouverture du marchéLessor du Private Equity 01Historiquement détenu par les institutionnels, le marché s’ouvre depuis une quinzaine d’années aux investisseurs privés. C’est, toutefois, la directive AIFM de juillet 2014, autorisant la commercialisation de véhicules faisant appel à l’épargne privée, qui a ouvert le ticket de souscription des fonds de Private Equity au plus grand nombre en abaissant son montant minimum (à partir de 1 000 euros), auparavant fixé à 100 000 euros. « Les particuliers sont appelés à participer au financement de l’immobilier non coté, dans des phases permettant une création de valeur autre que locative », précise Mehdi Gaiji, président d’Horizon AM. La société de gestion propose trois fonds de Private Equity dédiés à l’immobilier tournés vers les professionnels et prévoit de lancer, prochainement, son premier FCPR. « Contrairement aux SCPI, le Private Equity n’est pas uniquement basé sur une logique de Buy & Hold (achat/détention), mais plutôt de Buy & Sell (achat/revente), où la création de valeur repose sur un repositionnement ou une transformation de l’actif sur des cycles de production à court terme, entre deux et cinq ans », indique le président.Le risque de ces opérations s’évalue en fonction de leur durée. Oscillant de cinq à dix ans dans le cadre d’un fonds de Private Equity, la période d’investissement (et d’illiquidité) doit être suffisamment longue (minimum sept ans) pour absorber les à-coups et aléas de marché. « Tout l’enjeu du Private Equity est de réaligner constamment la maturité financière du fonds aux maturités opérationnelles, dans une logique de capitalisation et de plus-value à la sortie de l’investissement », rappelle Mehdi Gaiji.Les fonds Horizon AM financent les projets immobiliers dans les phases d’amorçage, ainsi qu’aux stades A et B. Eligibles à l’article 150-0 B ter du CGI permettant de bénéficier d’un report d’impôt sur la plus-value de valeurs mobilières lors de l’apport des titres à une société contrôlée, ces véhicules répondent aux problématiques d’optimisation fiscale et visent des TRI moyens de 6 à 8 %.

Un moteur de performanceAlors que les mutations du secteur immobilier ont été accélérées par l’épidémie de Covid, il est intéressant d’associer les murs à l’exploitation pour pouvoir performer en matière de rendement, estime Jean-Baptiste Pracca, fondateur de Mata Capital IM. « Le Private Equity finance des modèles d’immobilier exploité et aménagé avec des services, à l’image de l’hôtellerie ou du coworking, qui répondent à l’évolution de la demande des utilisateurs », constate-t-il. Le phénomène s’étend au résidentiel, à travers le développement des résidences de coliving ou de programmes immobiliers mixtes. Il y a six ans, la société de gestion a racheté le groupe Dalmata Hostpitality, qui gère quarante-cinq établissements d’hébergement économique situés en Ile-de-France et dans les métropoles françaises, mais a également investi dans le commerce avec l’acquisition de la société d’exploitation des magasins outlet Marques Avenue. Elle accompagne, en outre, un industriel de la blanchisserie pour l’acquisition de son immobilier d’exploitation.Jean-Baptiste Pracca défend une gestion dynamique du patrimoine de ses fonds, piloté pour délivrer des rendements dépassant 10 % quand les SCPI plafonnent à 6 %. « Dans un environnement de taux élevés, il faut trouver des leviers pour générer plus de performances », soutient-il. Mata Capital IM finalise actuellement une levée de fonds de 100 millions d’euros pour son véhicule d’investissement value-added Alpha Opportunities II, soit 20 % de plus que son premier millésime, Alpha Opportunities, clôturé en 2022. Structuré sous forme de SLP (société de libre partenariat), ce fonds diversifié se distingue en étant éligible en unité de compte dans un contrat d’assurance-vie français. Il cible des actifs en France et en Allemagne et vise un portefeuille d’une dizaine d’actifs, dont la valeur unitaire se situe entre 5 et 20 millions d’euros. Sa première acquisition devrait se réaliser avant la fin de période de la souscription qui se terminera le 30 juin 2024.

Couple rendement-risque optimalEnjeu majeur du Private Equity immobilier, la juste rémunération du risque est aujourd’hui rendue plus difficile par la hausse du coût de la dette bancaire qui obère la marge financière des opérations.A cela s’ajoutent les aléas de la construction (prix des matériaux, barrières administratives, défaillances des entreprises du secteur du bâtiment, retards de chantier, etc.) qui peuvent impacter le prix de revient de l’opération. « Il faut rappeler aux investisseurs non professionnels que le monde obligataire n’est pas sans risque », souligne Gérald Prouteau, directeur associé en charge du développement de Pierre Premier Gestion, qui place la viabilité des projets immobiliers comme premier critère de sa stratégie d’acquisition. « En tant que société de gestion, nous devons créer des produits qui présentent un couple rendement-risque optimal, tout en tenant compte du facteur temps avec, pour objectif, la liquidité de l’actif à la sortie, notamment dans les stratégies marchands et value-add », explique-t-il. En 2022, la société a commercialisé le FCPR PPG Valeur Immo, avec une souscription minimum de 25 000 euros (clôturée le 27 décembre 2023) et éligible au 150-0 B ter.Actuellement en phase de déploiement de capitaux, l’équipe de gestion sélectionne des opérations dont le taux de rendement interne cible, net de tous frais et impôts, est supérieur à 7 %. « Nous avons lancé ce véhicule avec une stratégie flexible, pour l’adapter aux cycles de l’immobilier et à la raréfaction des fonciers, qui nous oriente de plus en plus vers la réhabilitation », précise le directeur. Le fonds a collecté un peu moins de 17 millions d’euros fin 2023, légèrement en deçà des 20 millions d’euros espérés, mais cumule 8,6 millions d’euros d’investissement à ce jour. « Le statut FCPR ne permettant pas d’acquérir plus de 40 % des droits de vote ou du capital d’une société-cible, la société de gestion recherche d’autres partenaires pour compléter ses tours de table et financer les projets sélectionnés », rappelle Gérald Prouteau.Pour son prochain fonds d’investissement, la société de gestion privilégierait une approche opérationnelle « sur mesure », dans une logique de club deal, sur une durée courte. « L’immobilier étant devenu un marché de spécialistes, la défense du capital des épargnants doit primer sur une promesse de performance rendue plus aléatoire depuis la hausse des taux d’intérêt », résume-t-il.

Outil de diversificationLessor du Private Equity 02Pour limiter les risques du capital-investissement, mieux vaut aller chercher la diversification à l’intérieur des fonds et ne pas surexposer son portefeuille. « La part de Private Equity au global ne doit pas représenter plus de 10 à 15 % du patrimoine de l’investisseur », conseille Céline Aussenac, rappelant que l’épargnant n’a pas de regard, à la souscription, sur le détail des projets immobilier financés par de tels fonds, ce qui requiert une bonne dose de confiance dans la société de gestion de Private Equity.De son côté, Stéphane van Huffel, directeur général de Netinvestissement et de Leemo, confirme : « Sur un marché de l’immobilier non coté qui tourne au ralenti, l’absence de liquidité de ces placements reste le risque majeur. Il s’agit en effet de fonds qui, d’une part, n’apportent aucune garantie de capital ni de rendement et, d’autre part, mobilisent l’épargne des investisseurs pour une durée de cinq à huit ans et dont la date de sortie de l’opération et la valeur du bien au débouclage demeurent incertaines ». Stéphane van Huffel met également en garde les particuliers sur les produits qui délivrent du rendement, promettant ainsi « le meilleur des deux mondes » entre performance élevée et revenus réguliers. « Lorsqu’un fonds propose une prime d’émission et distribue aux investisseurs la plus-value générée sur le dividende, il n’est pas certain de retrouver la revalorisation du bien à la revente », prévient-il. De la même façon, il appelle à la vigilance sur les contrats d’assurance-vie qui peuvent aussi être frappés d’illiquidité. « Le Private Equity est un produit exposé aux effets de leviers, présentant un risque de dévaluation de sa valeur liquidative, où l’investisseur est actionnaire d’un fonds et non propriétaire d’un bien », précise le directeur.Ces recommandations énoncées, le capital-risque reste, selon lui, un bon outil de diversification, dès lors que le choix du fonds est adapté au profil de l’investisseur et à sa stratégie patrimoniale.« Ces produits doivent être proposés avec toutes les précautions possibles pour éviter les déconvenues vécues sur d’autres marchés, comme le financement participatif ou la cryptomonnaie », assure Stéphane van Huffel.

Profondeur de marchéLessor du Private Equity 03En parallèle de la loi de finances pour 2020, la loi Pacte a instauré de nouvelles conditions pour les opérations d’apport-cession à une holding. Les structures de capital investissement (FCPR, FPCI, SCR, SLP) sont devenues éligibles au mécanisme du report d’imposition pour les entrepreneurs.Cette évolution législative a élargi le marché du Private Equity immobilier à un nouveau profil d’investisseurs. « La profondeur du marché s’est accrue. Ces fonds tournés vers l’économie réelle sont distribués par de plus en plus de partenaires, et les encours en portefeuille augmentent », constate Guillaume Donnedieu de Vabres, Senior Partner chez Elevation Capital Partners, la société de gestion du groupe Inter Invest qui gère, à ce jour, près de 500 millions d’euros d’encours.Elle propose trois fonds de Private Equity immobilier à la commercialisation : deux FPCI actions, dont un Evergreen offrant une liquidité au bout de cinq ans, accessibles à partir de 100 000 euros pour une clientèle professionnelle, et un FCPR obligataire à partir de 3 000 euros, destiné au grand public. Ce fonds sera aussi décliné dans une version dédiée à l’assurance-vie, en cours de référencement auprès d’assureurs français.« La loi Industrie verte de 2023, qui va rendre obligatoire d’intégrer une part d’actifs non cotés sur des contrats d’assurance-vie et plans d’épargne-retraite (PER) en gestion pilotée, nous incite à emprunter cette direction afin de proposer une gamme complète et complémentaire de solutions d’investissement en phase avec les évolutions économiques, réglementaires et sectorielles », affirme le dirigeant.Les fonds Elevation Capital Partners investissent ainsi sur l’ensemble des activités immobilières (réhabilitation, immobilier géré, hôtellerie), afin de répondre aux grandes dynamiques du marché immobilier (politique zéro artificialisation nette, flex-office, coliving, etc.), dans une logique de diversification et de dilution du risque.

Promotion immobilièreLa promotion immobilière est le premier secteur à bénéficier de la puissance et de l’agilité du Private Equity et de ses nombreuses portes d’entrée (prise de participations, financement via une société de projet, portage foncier, etc.).Spécialisé dans le portage foncier, Horizons AM achète des actifs pour le compte de promoteurs nationaux et les revend à un prix déterminé en amont. Cette approche lui apporte une visibilité sur la date de sortie de ses fonds d’investissement et de sa liquidité. « Si la réussite d’un portage foncier repose sur l’obtention du permis de construire, une mauvaise projection initiale de la création de valeur de l’opération fait courir un risque encore plus grand à l’investisseur. D’où la nécessité d’anticiper au maximum et de maîtriser le foncier avant sa revente », explique Mehdi Gaiji.La société de gestion s’est associée avec les grands noms de la promotion, tels que Bouygues Immobilier, Cogedim ou Nexity. « En portant les projets immobiliers des promoteurs, nous leur permet-tons d’acquérir des actifs prime et concurrencés à des conditions attractives. En contrepartie, nous mettons en place des garanties pour nous assurer de la solvabilité des opérateurs », ajoute le président.La société finance aussi des grands projets d’aménagement urbain en phase de pré-promotion, dès les premières consultations avec les acteurs de l’urbanisme. « Nous sommes présents lorsque les aménageurs ont besoin de céder des fonciers à des tiers », précise le président. Horizon AM a ainsi financé deux cent mille mètres carrés de projets d’aménagement, dans une démarche opportuniste. « Nous allons chercher des actifs très en amont, où la création de valeur est la plus risquée, comme des terrains à bâtir situés dans des zones d’activité en devenir ou des friches foncières en attente de PLU ou de validation urbanistique », explique-t-il. La société participe, entre autres, au financement d’un vaste projet d’aménagement d’un nouveau quartier à Louveciennes, dans les Yvelines. Précommercialisé à hauteur de 85 %, ce programme immobilier mixte de cent-trente mille mètres carrés regroupera du logement privé et social, une résidence services seniors, des commerces et un data center.

Esprit de « club »Traditionnellement positionnée sur des clubs deals d’investissement au capital de PME et ETI « lower mid-cap » et d’opérations immobilières à création de valeur avec des tickets unitaires s’élevant entre 1 et 10 millions d’euros, la Compagnie Lebon s’est appuyée sur cette double expertise pour entrer de plainpied dans le Private Equity Immobilier en reprenant 41 % des parts du promoteur parisien Eliasun.Ce développement s’intègre dans une évolution stratégique plus large des métiers d’investissement du groupe qui construit son activité sur des expertises de niche, avec des souscripteurs intégrés en tant que partenaires au travers de clubs et de partage d’expertises.Les deux autres verticales déployées par le groupe sont des fonds d’entrepreneurs Private Equity implantés dans les régions françaises – Re-Sources Capital – et des fonds « multi-club-deal » ciblant des opérations large cap internationales aux côtés de grands gérants européens et américains. La mise en place de cette double approche, à la croisée de l’accompagnement de PME et de la valorisation immobilière « correspond à un besoin important dans un secteur très capitalistique. Pourtant, ces deux expertises sont rarement combinées, requérant chacune une culture de l’investissement et de l’approche du couple risque-retour très spécifique et souvent opposée », indique Philippe Aoun, directeur général de la Compagnie Lebon. Concernant la promotion immobilière, « les opérateurs ont un besoin vital de capitaux propres pour se développer – même si le modèle français de la Vefa allège ces besoins –, tandis que leur métier est la sécurisation de fonciers, puis la gestion et la commercialisation des programmes. Dans un contexte de marché qui permettra aux plus résilients d’émerger, nous apportons à Eliasun les capitaux nécessaires et accompagnons son dirigeant dans ses interrogations quotidiennes pour faire face aux grands changements de ce secteur », poursuit le président. Le fonds finance plus d’une quinzaine d’opérations développées en partenariat avec les mairies et les aménageurs, puis vendues en bloc (notamment en logement locatif intermédiaire) ou aux particuliers (accession classique et TVA à 5,5 %).Sur le modèle de ce premier dossier de « plate-forme », mixant l’accompagnement au capital d’un partenaire immobilier et la création d’un véhicule dédié aux opérations immobilières de ce partenaire, le groupe réfléchit à de nouvelles opérations similaires adressant d’autres segments du marché immobilier. « De nombreux acteurs développent des modèles d’immobilier géré, que ce soit en résidentiel (résidences étudiantes, seniors, coliving, etc.), en tourisme (hôtellerie, camping, etc.) ou dans des secteurs tertiaires tels que les parcs d’activité, le stockage, les centres médicaux, et bien d’autres. L’association de la maîtrise de l’exploitation et de la détention des murs, permet de maximiser la création de valeur et de faire évoluer les actifs et les services en fonction des attentes du marché », selon Philippe Aoun.La Compagnie Lebon a bâti sa stratégie sur sa conviction d’une « convergence progressive de l’investissement dans l’usage et dans les murs », ainsi que sur un profil d’opérations financières permettant d’améliorer ses retours, et celui de ces co-investisseurs, grâce à la croissance de l’opérateur et de sa valeur en complément du travail autour des actifs immobiliers. « Comme pour nos opérations d’accompagnement des PME, nos projets immobiliers s’inscrivent au cœur de leur territoire », ajoute le dirigeant. Ces investissements de « plate-forme » sont accessibles à partir de 200 000 euros à un tour de table d’investisseurs convaincus par les opérations, entrant par la même occasion dans le cercle de partenaires auquel le groupe ouvre chacune de ses opérations. Une exclusivité assumée par la Compagnie : « nous ne souhaitons pas transformer nos savoir-faire en produit simplement financier et multiplier les petits tickets anonymes. Nous recherchons des partenaires avec lesquels créer une vraie proximité, partager nos visions de l’investissement et ses valeurs, et croiser nos expertises pour mieux investir et accompagner », explique Philippe Aoun. Avec Eliasun, la Compagnie prévoit un déploiement de 10 à 20 millions d’euros.

Mesures de sûretéLes actuelles difficultés rencontrées par les acteurs de la promotion poussent certains acteurs du Private Equity immobilier à affiner leur stratégie.C’est le cas d’Entrepreneur Invest, avec le FCPR Entrepreneurs & Immobilier particulièrement innovant, puisqu’il est le seul FCPR sur le marché et qu’il est Evergreen. Avec 120 millions d’euros d’actifs sous gestion, ce fonds a financé plus de soixante-dix projets en France et en Europe (Luxembourg et Pays scandinaves) depuis 2020 et investi plus de 125 millions d’euros. « A l’étranger, les banques sont moins puissantes qu’en France et laissent volontiers les investisseurs privés financer les projets et les lois fiscales sont plus avantageuses », indique Frédéric Zablocki, président et cofondateur d’Entrepreneur Invest. Depuis deux ans, la société de gestion s’est toutefois concentrée sur les opérations de marchands de biens en renforçant les mesures de sûreté. « La frilosité des banques nous ouvre des opportunités. Nous nous substituons à elles pour financer les petits projets de 5 à 6 millions d’euros, avec un niveau de sûreté de premier rang », explique le président. Son second fonds immobilier, le FPCI Entrepreneurs Opportunités Immobilières a pour vocation de jouer le market timing pour saisir les meilleures offres de marché, en conservant une grande sélectivité dans le choix des actifs et des opérateurs qu’il accompagne. Et pour cause. Pour Frédéric Zablocki, le Private Equity connaît une année de transition, intéressante pour les investisseurs, mais marquée par une crise de confiance des clients particuliers, notamment échaudés par le retournement du marché des SCPI en 2023. Une défiance qui, cependant, commence à s’estomper à mesure que la courbe des taux d’intérêt régresse. « Nous prenons le relais de l’immobilier physique et de la pierre-papier, avec une dimension renforcée d’appréciation des actifs dans la durée, recherchée par les Français », note le président.En mai, la société a lancé le FPCI Entrepreneurs Opportunités Immobilières, dédié au financement d’opérations value-added dans les grandes villes françaises. Ouvert à la souscription jusqu’au 31 décembre prochain, ce fonds est accessible à partir de 100 000 euros, avec une maturité de six ans prorogeable deux fois un an. Il prévoit de limiter ses positions à 20 % par opérateurs, en ciblant une dizaine de projets.

Stratégies « value-added »Lessor du Private Equity 04Dans le sillon de la loi Climat et résilience, les stratégies value-added, qui visent à créer de la valeur par la réhabilitation d’actifs immobiliers, ont le vent en poupe.Engagé dans cette voie depuis 2016, le groupe Mimco déploie ses investissements dans cinq pays européens (Luxembourg, Allemagne, France, Espagne et Portugal). « Ce sont les restructurations et les reconversions d’actifs les plus lourdes qui vont délivrer le maximum de valeur », assure Paul-Eric Perchaud, directeur Real Estate et Private Debt de Mimco Asset Management. Avec plus d’1 milliard d’euros d’actifs sous gestion et d’opérations en cours de développement, répartis dans dix-huit fonds d’investissement collectifs (Private Equity, club deals, capital-investissement/dette privée), la société mise sur la revitalisation urbaine, incluant une composante industrielle et logistique, avec une vision durable et responsable. En 2020, Mimco a été l’un des signataires des Principes pour l’investissement responsable (PRI) soutenus par les Nations unies, puis de la Déclaration mondiale 2021 des investisseurs aux gouvernements sur la crise climatique.Tous les fonds de droit français gérés par le groupe sont labellisés ISR. En 2024, le portail numérique Mimco Platform, agréé prestataires de services d’investissement (PSI), a été lancé à destination du grand public, proposant des tickets à partir de 10 000 euros. Avec un objectif:élargir la cible de sa clientèle en simplifiant le parcours d’investissement grâce au digital. « L’achat d’immeuble en club deal implique une grande réactivité entre le moment de la levée de fonds et l’acquisition. Pour accélérer le processus, nous avons injecté de la technologie pour compresser le temps le plus possible », décrit le directeur. La société vise les 250 millions d’euros de collecte pour ses fonds français et luxembourgeois d’ici trois ans, à raison d’un ou deux clubs deals par mois.Deux club deals commercialisés sur la plate-forme portent sur des actifs à restructurer:un immeuble résidentiel reconverti en appartements touristiques à Lisbonne (projet Santos Townhouse, à partir de 10 000 euros, en obligations pour un rendement de 12 %, payé à la fin de l’opération) et un immeuble mixte de bureaux, hôtel et services au Luxembourg (à partir de 100 000 euros en Equity pour un rendement de 10 % payé à la fin de l’opération).

Création d’un nouveau fondsNé en avril dernier, le nouveau FCPR CityMakers #1, lancé par Foncière Magellan et Baltis, lui aussi 100 % digitalisé, est un nouvel entrant sur le marché du développement et du recyclage urbain. Le fonds investit dans des sociétés d’exploitation immobilière liées aux nouveaux usages (santé, éducation, coworking, habitat partagé, tiers lieux, hôtellerie durable, etc.) et soutient des opérations immobilières à travers des plates-formes de financement participatif en France et au sein de l’Union européenne.City Makers #1 cible à la fois les investisseurs particuliers et institutionnels. Eligible au PEA-PME et à l’assurance-vie, dans un horizon de placement de six ans, il vise une collecte de 50 millions d’euros et un rendement annuel de 7 %, avec un montant des prises de participation oscillant entre 1 et 5 millions d’euros par projet. Proposant des projets situés à 85 % au cœur des régions françaises, ce fonds commun de placement à risque est accessible à partir de 5 000 euros pour les particuliers et de 100 000 euros pour les investisseurs institutionnels. « Nos clients avaient encore du mal à franchir le cap du Private Equity à cause de la notion de risques qu’ils ne maîtrisaient pas. L’accessibilité de nos tickets et le référencement de notre FCPR auprès des assureurs devraient lever ces verrous », relate Guillaume Hilaire, directeur général délégué du développement du groupe Magellim.Le fonds a notamment établi un partenariat avec l’opérateur de coworking Gustave Collection et accompagne le développement de son offre de bureaux « haute-couture » en France et à l’international. Quatre ouvertures ont déjà eu lieu à Paris. « Nous finançons la montée en compétences de l’opérateur par la réalisation de travaux et l’apport en besoin en fonds de roulement (BFR). En contrepartie, nous nantissons le bail durant six à neuf ans, qui nous assure une garantie sur le flux et la trésorerie de l’exploitant », précise le directeur. Les actifs sélectionnés par le fonds City Makers #1 se situent en centre-ville, dans une logique de construire « la ville sur la ville ». Les maisons de santé sont adossées aux hôpitaux, dans les métropoles françaises. Quant aux établissements situés hors de France, ils sont, quant à eux, sélectionnés par les plates-formes locales.

Revaloriser les actifs décotésPrécurseur sur le marché du recyclage urbain, le groupe Novaxia s’est positionné sur le Private Equity dès 2020, avec le fonds Novaxia One, un fonds dédié au recyclage urbain tout terrain et toutes classes d’actifs confondues, éligible au 150-0 B ter.« De nombreux family offices et monteurs d’opérations immobilières viennent nous trouver pour constituer des clubs deals autour du recyclage urbain. Les entrepreneurs s’y intéressent pour des raisons fiscales, mais surtout pour sa performance », constate M athieu Descout, membre du directoire de Novaxia Investissement. Pour ce dernier, le capital-investissement est un mode de financement particulièrement adapté aux réhabilitations. « Les SCPI, qui sont de gros détenteurs d’actifs, ne peuvent injecter plus de 15 % de leur capitalisation dans les travaux de réhabilitation. A l’inverse, le Private Equity a plus de marge de manœuvre et peut dédier l’intégralité de l’épargne immobilière investie et bloquée durant toute la durée du fonds pour réaliser des opérations d’envergure à forte valeur ajoutée », analyse le directeur.Alors que l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN) veut limiter l’artificialisation des sols, le financement de la rénovation du parc immobilier français apparaît, selon lui, comme « une manne » dont les particuliers peuvent désormais profiter. « Même si les volumes investis dans la pierre ont baissé de 57 % en 2023, il n’y a jamais eu autant d’argent qui sera alloué à de futurs investissements », observe-t-il.Le groupe vient d’ouvrir un club deal qui investira dans des actifs tertiaires à prix décoté, essentiellement des bureaux. « Il faut profiter de la suroffre de bureaux franciliens et des quelque 4,8 millions de mètres carrés inoccupés dans la région, qui selon l’Institut de l’épargne immobilière et foncière (Ieif), pourront atteindre 10 millions en dix ans, du fait de la pérennisation du télétravail », soutient Mathieu Descout.Ce nouveau mode d’investissement en club deal devrait dupliquer la logique de l’UC Novaxia R qui investit dans des immeubles de bureaux en zone périurbaine pour les recycler en hébergements ou en actifs gérés et en capter toute la valeur avec des objectifs de performance par club deal supérieurs à 15 % de TRI.

Exploitation hôtelièreLessor du Private Equity 05Sur un marché de l’hôtellerie au beau fixe, qui continue à afficher des taux d’occupation importants et des prix à la nuitée élevés, le Private Equity immobilier est un outil d’investissement privilégié, qui allie la performance liée à l’exploitation à la sécurité de la pierre. Avec une demande d’hébergement qui croît plus vite que l’offre en France et en Europe, et des centres-villes d’agglomération saturés en réserves foncières, la profondeur de marché est réelle et déroule un terrain de jeu prisé des investisseurs en Private Equity. Après avoir lancé, en 2022, le FPCI Convert Hotel, un fonds dédié à la réversibilité des actifs hôteliers, la société de gestion Extendam a ouvert à la souscription le FPCI Convert Plus qui couvrira l’Europe.Accessible à partir de 100 000 euros, ce fonds a vocation à renouveler le parc vieillissant des hôtels de centre-ville et les transformer en nouveaux formats immobiliers concentrant hôtellerie et résidence longue durée, et des parties communes qui accueilleront des commerces de proximité, bars et restaurants. Le fonds, qui prévoit douze opérations ciblées, travaille actuellement sur des opportunités investissements en Belgique, en Espagne et en France. « Nous rachetons à bon prix des actifs en bout de cycle d’investissement. La création de valeur repose sur le repositionnement et/ou le rafraîchissement de ces établissements et l’arrivée de nouveaux exploitants », explique Jean-Marc Palhon, président d’Extendam. Pour la clientèle retail des CGP (à partir de 5 000 euros), Extendam propose un FCPR éligible aux comptes-titres et aux contrats d’assurance-vie, semi-obligataire et foncier. « Ce fonds sera investi aux deux tiers dans l’hôtellerie et un tiers dans des obligations cotées », précise le président. La société de gestion s’est fixée pour objectif cible des TRI bruts de 12 à 15 % par opération d’investissement et, selon les fonds, des performances nettes entre 7 et 10 %. « Notre force réside dans notre capacité à aller chercher des actifs partout en Europe, là où la pénurie de marché est la plus forte et les besoins importants:principalement dans l’hôtellerie économique et milieu de gamme », conclut Jean-Marc Palhon.

Un fonds opportunisteAvec plus de vingt-cinq opérations réalisées en dix ans, la société de gestion Eternam a investi plus de 500 millions d’euros dans la reprise ou le développement d’hôtels en France et en Europe.Fin 2022, Eternam a lancé le FPCI Alcyon 2, successeur d’Alcyon 1. « Le second opus de ce véhicule a pour objectif de constituer un portefeuille d’hôtels, murs et fonds diversifié, allant de l’établissement deux étoiles à quatre étoiles, avec une performance annualisée cible supérieure à 7 % », annonce Jonathan Donio, directeur général délégué d’Eternam. Le fonds, qui a déjà collecté 30 millions d’euros, doit clôturer sa période de souscription fin juin. En complément, la société de gestion prévoit de lancer un nouveau club deal, avec un nombre restreint d’investisseurs, pour l’acquisition d’un hôtel de cinquante chambres au cœur de Paris.Par ailleurs, afin de tirer profit d’un contexte de marché favorable aux acheteurs, Eternam opte pour la diversification en commercialisant un nouveau fonds immobilier opportuniste, le FPCI Solstice, dont l’ambition est de déployer des fonds sur tous types d’actifs, avec une priorité accordée aux zones les plus tendues comme Paris intra-muros. Ce véhicule accessible à partir de 100 000 euros, éligible au dispositif du remploi des plus-values de cession (150-0 B ter), a pour objectif d’investir en fonds propres des tickets compris entre 5 et 15 millions d’euros par opération. « Si la hausse des prix moyens de l’hôtellerie est venue contrecarrer celle des taux et maintenir la valeur de ces actifs, il n’en est pas de même sur le marché des bureaux qui subit d’importantes corrections. Nous souhaitons faire bénéficier à nos clients de ce momentum de marché exceptionnel, où les vendeurs sont contraints de vendre à prix cassés », annonce Jonathan Donio.Le FPCI Solstice aura une durée de détention de sept ans.

Activités de spécialistesActeur historique du financement des PME françaises, la société 123 IM s’est, dès 2010, intéressée au marché du tourisme et plus particulièrement de l’hôtellerie et de l’hôtellerie de plein air (camping).En quinze ans, elle a investi plus de 400 millions d’euros dans le secteur et revendique une réelle expertise sur ce marché très convoité par les investisseurs, mais réservé aux connaisseurs. A travers des fonds dédiés, 123 IM prend des participations dans des hôtels murs et fonds (l’immobilier représentant 50 % environ du financement global). La société a, en effet, été l’un des premiers opérateurs à associer l’immobilier et le fonds de commerce pour offrir un rendement-risque équilibré à ses clients. « Nos fonds accompagnent des entrepreneurs de l’hôtellerie sur une durée en moyenne de quatre à cinq ans. C’est le temps nécessaire pour accompagner un projet de développement ou de rénovation, et pour le porter à maturité. Nous sommes également très présents sur l’hôtellerie de plein air, marché plus confidentiel, mais offrant de belles perspectives de rendement », explique Xavier Anthonioz, président d’123 IM.En effet, depuis dix-huit mois, ce dernier recommande d’investir dans les campings qui représentent une valeur-refuge plus résiliente que l’hôtellerie traditionnelle, et présentent moins de concurrence. Les fonds spécialisés de la société visent des rendements nets de 7 à 8 %. Le FPCI 123 Hospitality Selection, ouvert aux clients avertis vise, quant à lui, jusqu’à 10 % de rendement net. En parallèle, la société commercialise également un fonds de dette privée généraliste, 123 Corporate, exposé jusqu’à 40 % à la dette du secteur immobilier et éligible à l’assurance-vie. « Pour maintenir un bon équilibre rendement-risque, nous travaillons à augmenter les gages de sécurité, avec des garanties à première demande et des cautions personnelles des entrepreneurs », ajoute le président. Il annonce également l’arrivée d’un nouveau club deal sur le secteur des campings, qui vise un coupon annuel de 5 % et un rendement cible net de 9 % par an sur quatre ans.Depuis plusieurs années, 123 IM s’est concentrée sur des groupes immobiliers et hôteliers de plus grosse envergure, portants des projets de développement plus importants.Un « fly to quality » destiné à préserver le profil de rendement-risque visé pour ses clients.

Lexique- Le Private Equity immobilier est un investissement dans des sociétés non cotées, qui interviennent dans le secteur de l’immobilier.

- Le FCPR (fonds commun de placement à risques) est un véhicule d’investissement ouvert aux investisseurs privés (à partir de 1 000 €).

- Un FPCI (fonds professionnel de capital-investissement) est un véhicule de placement réservé aux investisseurs avertis (à partir de 100 000 €).

- Un FIA : fonds d’investissement alternatif.

- Un FPS : fonds professionnel spécialisé.-La SLP (société de libre partenariat) est un véhicule sociétaire visant à faciliter les opérations de capital-investissement.