La loi Climat a changé la donne sur le marché de l’ancien, contraignant de nombreux propriétaires-bailleurs à rénover, et parfois à vendre leur bien immobilier obsolète.
Une aubaine pour les investisseurs, à condition de bien négocier le prix d’achat, d’évaluer correctement le budget travaux et de ne pas hésiter à activer les leviers fiscaux qui participent à générer de la valeur.
Au pied du mur. La loi Climat et résilience interdisant la mise en location des logements les plus énergivores – progressivement depuis le 1er janvier 2023 – et gèle la révision des loyers des logements notés F ou G au DPE, a fait l’effet d’une douche froide pour les particuliers. Déjà contraints par le durcissement des conditions de crédit et la hausse des taux d’intérêt, les propriétaires de biens anciens redoutent de ne plus pouvoir dégager les revenus fonciers suffisants pour rentabiliser leur opération immobilière. Entre le risque de dérapage du budget travaux, la hausse exponentielle de la taxe foncière sur les locations saisonnières dans les zones touristiques, ou encore, l’éventuel rabot fiscal à venir sur la location meublée:le marché de l’immobilier ancien a aujourd’hui de quoi décourager les investisseurs. « Les propriétaires-bailleurs sont pris en tenaille entre un rendement dégradé par la hausse des taux et des prix de l’immobilier en baisse dans les grandes villes. Même s’il est encore rentable dans les villes moyennes, l’investissement locatif n’est plus la poule aux œufs d’or qu’elle a été ces dernières années dans les grandes métropoles », constate Martin Menez, président de Bevouac.
Pourtant, la demande locative s’emballe, catalysée par les difficultés des ménages à accéder à la propriété. « Nous n’avons jamais aussi bien loué sur notre plateforme qu’aujourd’hui, avec des délais qui n’excèdent pas deux semaines, partout en France », note le président. La plate-forme locative Bevouac annonce ainsi délivrer plus de 7,67 % de rendement brut en moyenne à ses investisseurs, acquéreurs d’un patrimoine qui a vu ses prix s’apprécier de 58 % en moyenne depuis 2019.
Alors que le marché du neuf se grippe et s’éteint, l’ancien rénové ouvre de nouvelles perspectives aux investisseurs sur le plan fiscal.
A condition de bien calibrer son opération et d’anticiper chaque étape de la revalorisation de son actif.
Passoires thermiques : piège ou bon plan ?
Confronté à un cadre réglementaire de plus en plus contraignant, certains propriétaires de passoires thermiques sont tentés de revendre. L’occasion pour les investisseurs de réaliser des bonnes affaires ? Oui, mais seulement si l’on achète au bon prix. « Les marges de négociation sont plus importantes sur les passoires thermiques que pour le reste du marché. Parmi les opportunités que nous sélectionnons, un logement classé F ou G se négocie en moyenne 16,7 % moins cher », note Martin Menez qui table sur une nouvelle baisse de prix sur les logements obsolètes au fil des mois.
Plus un bien est en mauvais état, plus la décote sur le prix de vente doit être importante. « Les petites villes où le coût du foncier est faible, à moins de 1 000 euros le mètre carré, sont à exclure. En revanche, dans les villes où les prix de l’immobilier s’établissent entre 2 500 et 3 000 euros le mètre carré, la décote sur les passoires thermiques est suffisante pour absorber le coût des travaux », démontre le président.
Il rappelle que pour passer d’une étiquette G à E dans un T2, dans des villes telles que Nancy, Rennes ou Angers, il faut compter en moyenne 378 euros le mètre carré, 420 euros pour passer de G à D et 510 de G à C. Autre difficulté : l’évaluation du montant des travaux. « Déterminer et chiffrer de façon précise le montant des travaux à réaliser nécessite l’accompagnement d’un professionnel. Or les entreprises spécialisées dans la rénovation énergétique sont de plus en plus difficiles à trouver », constate Martin Menez. Une nouvelle complexité à appréhender par les investisseurs.
Valeur verte versus décote brune
Les propriétaires devraient, toutefois, tirer les fruits de leurs efforts. « Même dans un contexte baissier, le marché récompense le fait de rénover un bien et d’améliorer son DPE. Les investisseurs qui prennent le risque de réaliser des travaux, avec tous les aléas que cela implique, se verront le plus souvent rémunérés en plus-value à la sortie », assure Thierry Vignal, président de Masteos, pour qui chaque euro investi dans les travaux rapporte en moyenne deux euros de plus-value.
A la valeur verte s’oppose désormais la notion de décote brune, pour les logements les plus mal notés au DPE. « Si l’idée est de générer de la plus-value par les travaux, alors il faut viser les biens en mauvais état et négocier une décote à l’achat qui correspond a minima au montant des travaux envisagés, conseille Thierry Vignal. Les sites d’estimation en ligne proposent souvent une fourchette basse et une fourchette haute du prix au mètre carré d’un lieu. La fourchette basse donne l’objectif du prix à l’achat, et la haute l’objectif de revente, idéalement -15 % à l’acquisition et + 15 % à la revente, par rapport au prix moyen observé. » Mais attention à ne pas s’emballer:les vendeurs qui ne sont pas pris à la gorge ne sont généralement pas prêts à brader leur bien, sous prétexte qu’il est énergivore. « Le marché ne prend pas encore au sérieux le calendrier réglementaire. Le rétropédalage du gouvernement sur les audits énergétiques, les modifications successives du DPE (diagnostic de performance énergétique) et les potentielles dérogations ou exemptions, voire un report d’échéance évoqué par le ministre Bruno Le Maire, sont autant d’annonces qui ont décrédibilisé le discours officiel », concède Thierry Vignal. Le calcul de la rentabilité d’un investissement locatif, à l’aune de la nouvelle donne énergétique devient plus subtil. Le facteur travaux s’ajoutant à l’équation, il faut aller chercher des rendements plus élevés, tout en minimisant le risque. « Le potentiel financier d’une ville se niche dans les anomalies statistiques qui affichent un équilibre entre le rendement, la demande locative, le revenu médian par habitant, la taille du marché et la tension sur les transactions », résume Thierry Vignal. Masteos a ainsi établi un classement des dix villes répondant à ces caractéristiques, par ordre de rentabilité : Dunkerque, Montauban, Metz, Niort, Cholet, Colmar, Arles, Orléans, Thionville et Albi.
Une vision à 360 degrés
Pour optimiser son placement, une préparation solide du projet immobilier s’impose. « Il convient d’analyser l’opération sous trois angles – l’aspect technique, incluant l’enveloppe travaux, l’aspect financier et l’aspect fiscal – et avoir une vision à 360 degrés de l’investissement », rappelle Alexandra Nabet, CGP, membre de l’écosystème Neofa. En fonction du type de location (nue ou meublée), du mode de détention du bien, de la situation fiscale et patrimoniale de l’acquéreur, mais également, des qualités intrinsèques de l’actif, le montage juridique et financier recommandé ne sera pas le même. Aussi, opter pour une société civile immobilière (SCI) à l’impôt sur le revenu (IR) ou à l’impôt sur les sociétés (IS) n’aura pas les mêmes effets sur l’utilisation et la taxation du bien.
Une SCI à l’IS permet la location meublée, puisqu’elle présente un caractère commercial. L’exploitation devra obligatoirement être assujettie à l’impôt sur les sociétés. La SCI aura la possibilité d’amortir fiscalement ses biens immobiliers, ce qui représente un puissant levier fiscal en neutralisant la totalité des recettes issues de la location du bien, durant toute la durée de l’amortissement. En revanche, la plus-value de cession est calculée sur le prix d’acquisition duquel est retranchée la valeur nette comptable (toutes les années d’amortissement), ce qui augmente l’imposition sur la plus-value. La SCI perd donc le bénéfice de l’abattement pour la durée de détention. A l’inverse, pour la location nue dans la SCI à l’IR, tout comme la détention en indivision, l’imposition remonte aux associés personnes physiques, elle est dite translucide fiscalement, ce qui rend la fiscalité très vite confiscatoire (jusqu’à plus de 60 % pour les tranches d’imposition élevées), même s’il est possible de déduire des charges (travaux, frais notaire, taxe foncière, assurances). « Cette option ne présente pas d’avantage fiscal spécifique, mais elle est un excellent outil patrimonial, offrant une grande liberté dans la rédaction des statuts – certaines décisions peuvent être prises par le gérant de la société selon les pouvoirs donnés par les statuts. Les autres décisions sont prises en assemblée d’associés, facilitant la gestion mais également la transmission aux conjoints ou enfants. Elle est donc un bon moyen de gérer et administrer le bien en respectant la quote-part de chaque associé, notamment au moment de revente », explique Alexandra Nabet.
Les liens entre associés vont également déterminer le choix de la structure juridique (SC, Sarl, etc.) à adopter et des leviers fiscaux à activer pour optimiser et valoriser l’actif immobilier.
Dispositif Denormandie, le mal-aimé ?
Equivalent du Pinel dans l’ancien, le Denormandie n’a pas rencontré le même succès que le célèbre dispositif dans le neuf. « La loi part d’une bonne intention, mais son intérêt reste limité dans la mesure où l’investissement est dirigé vers des zones géographiques qui manquent de dynamisme », observe Martin Menez. De fait, s’il offre les mêmes réductions d’impôts que le Pinel, moyennant des durées de location définies (10,5 % pour six ans, 15 % pour neuf ans et 17,5 % pour douze ans), le dispositif porte sur seulement deux-cent-vingt-deux villes éligibles au plan Action cœur de ville. Il ne s’applique qu’à partir du moment où le montant des travaux représente, au minimum, 25 % du coût total de l’opération et impose un plafond de défiscalisation de 5 500 euros par mètre carré. « L’Etat a fléché l’épargne des particuliers pour la revitalisation des villes où les investisseurs ne vont pas et dont l’économie locale n’est pas suffisamment développée. Le manque d’attractivité de la majeure partie des communes concernées affaiblit le dispositif », ajoute le président. Résultat, l’offre de biens éligibles au Denormandie est quasi inexistante et peu séduisante pour les particuliers.
La fin des avantages Pinel en décembre 2024 pourrait cependant rebattre les cartes et créer un effet de report vers le Denormandie. « Longtemps resté dans l’ombre du Pinel, le Denormandie est de plus en plus évoqué par les conseillers en gestion de patrimoine qui peinent à trouver des programmes éligibles au Malraux ou aux monuments historiques », constate Loïc Guinchard, directeur commercial de Buildinvest, convaincu que le dispositif survivra au Pinel. « N’ayant jamais vraiment démarré, il ne peut que prendre son essor dans les années à venir dans la mesure où de nombreuses villes ont besoin de rénover leur immobilier », ajoute-t-il, rappelant que toute incitation fiscale visant à valoriser l’immobilier ancien s’inscrivait dans le sens de l’histoire (il a d’ailleurs été reconduit jusqu’au 31 décembre 2024).
En outre, le Denormandie est la première porte d’entrée aux dispositifs fiscaux dédiés à la rénovation pour les investisseurs, dont les revenus oscillent entre 50 000 et 75 000 euros par an, avec un ticket moyen à 350 000 euros.
Pour Loïc Guinchard, sur un marché de la rénovation en plein boom, le dispositif Denormandie révèle son plein potentiel, aux côtés des dispositifs Malraux et monuments historiques. « Il génère de la valeur après travaux et applique les avantages de l’immobilier neuf à des actifs de caractère, situés en hypercentre des villes et à des emplacements premium », assure-t-il. .
Le Malraux se démocratise
Pour les férus de belles pierre, la loi Malraux encourage la rénovation d’immeubles à caractère historique ou esthétique. Ce dispositif donne droit à une réduction d’impôt calculée sur le montant des travaux de restauration engagés, à hauteur de 30 % pour les immeubles situés dans un site patrimonial remarquable, avec PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) approuvé, les QAD (quartiers anciens dégradés) et les quartiers conventionnés NPNRU (nouveau programme national de renouvellement urbain), ou de 22 % pour les immeubles situés dans un site patrimonial remarquable avec PVAP (plan de valorisation de l’architecture et du patrimoine) approuvé ou dont le programme de restauration a été déclaré d’utilité publique. Le montant des travaux est plafonné à 400 000 euros pour quatre années consécutives. Ces avantages sont conditionnés à une obligation locative de neuf ans, sans plafond de loyer, ni de ressources. Les travaux doivent prendre en charge la restauration de l’intégralité de l’immeuble et sont contrôlés et suivis par un architecte des Bâtiments de France. S’adressant aux contribuables dont les revenus annuels s’élèvent entre 75 000 et 100 000 euros, pour un ticket d’entrée moyen de 450 000 euros, le Malraux tend à se démocratiser à travers de nouvelles offres. « Dans ces temps où l’obtention de financement est devenue plus difficile et les enveloppes d’investissement se réduisent, nous avons lancé cette année deux gammes de produits abordables, n’excédant pas 300 000 euros, à destination d’un autre profil d’acquéreurs », annonce Laurent Demay, directeur prescription grands réseaux du groupe François Ier.
Une orientation stratégique qui coïncide avec la fin programmée du Pinel. Le groupe propose ainsi une opération Le Couvent des Sœurs en Malraux 30 % à Tréguier, en Bretagne, à partir de 136 000 euros, dont 90 % de quotepart de travaux, soit 127 000 euros qui permettront une réduction d’impôt de 38 000 euros sur quatre ans, soit 9 000 euros par an, reportable trois ans. La Maison des anciens Comtes de Provence, une opération Malraux à 22 %, est également en cours de commercialisation, à Brignoles, dans le Var, à partir de 189 000 euros, avec une quote-part travaux de 90 %. « Avec ces programmes, nous ciblons les tranches d’imposition plus faible et offrir une alternative complémentaire aux investisseurs », précise Laurent Demay.
Monument historique, une niche payante
Dans le sillon du Malraux, la loi monument historique a vocation à encourager la restauration des biens immobiliers remarquables, classés monument historique ou inscrits à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques (ISMH) – les travaux doivent respecter les prescriptions de l’architecte des Bâtiments de France.
Ce dispositif permet de déduire des impôts sur le revenu l’ensemble des charges liées aux travaux de rénovation et à l’entretien du bien, jusqu’à un maximum de 45 % du montant pour la tranche d’imposition la plus forte. Cette déduction est limitée à 200 000 euros par an, si le bâtiment n’est pas ouvert au public au moins cinquante jours par an, dont vingt-cinq jours entre avril à septembre inclus, ou quarante jours entre juillet et septembre inclus. En revanche, contrairement au Malraux, il n’exige pas d’obligation de location.
Marché de niche, la loi monument historique cible tout particulièrement les contribuables possédant un taux marginal d’imposition (TMI) élevé (à partir de 40 %) ou qui ont touché un revenu exceptionnel (vente d’une entreprise, prime professionnelle, etc.). « Le dispositif monument historique est un outil de destruction d’impôts efficace, qui vient en déduction du revenu global annuel, sans limite ou plafonnement », confirme Loïc Guinchard.
Un investisseur imposé à 45 % qui aurait acquis, pour exemple, un bâtiment classé monuments historiques à 300 000 euros et réalisé 250 000 euros de travaux sur trois ans, réalisera une économie d’impôts de 112 500 euros (45 000 euros en année 1, 45 000 euros en année 2 et 22 500 euros en année 3).
Autre avantage, le dispositif fiscal monument historique permet, sous certaines conditions, l’exonération des droits de successions et de donations. Pour cela, les héritiers doivent signer une convention à durée indéterminée et la faire valider par le ministère de la Culture. « La loi monument historique est un investissement conséquent et pérenne, qui consiste à générer de la valeur à travers une proposition patrimoniale de qualité et participe à la restauration du cœur historique de nos villes », résume Laurent Demay.
Déficit foncier, un succès grandissant
Pour les multi-investisseurs déjà imposés sur des revenus fonciers, le déficit foncier est un bon moyen de diminuer leur impact fiscal.
Véritable succès commercial, ce mécanisme qui ne s’applique qu’à la location nue vient, en effet, gommer le résultat foncier positif des propriétaires-bailleurs. Seule condition : cumuler un montant de travaux et de charges suffisant pour que la déduction soit efficace. « L’objectif du déficit foncier est de créer de la charge pour obtenir un déficit important. C’est un outil intéressant quand il s’agit de sortir d’une passoire énergétique. Le montant total des travaux envisagés sur les trois prochaines années permettra d’optimiser cette déduction fiscale, tout en valorisant son patrimoine », explique Safia Tomasino, directrice de réseau chez Imodirect. Ces travaux peuvent aussi bien concerner la rénovation (remise à neuf d’un bien obsolète), l’isolation (changement de chaudière ou de fenêtres, installation d’une pompe à chaleur, isolation des murs et du plafond, nouveau système de ventilation, etc.) et l’embellissement (peinture, décoration, etc.) d’un actif immobilier. Le propriétaire peut bénéficier soit d’un abattement de 30 % sur ses revenus locatifs, soit déclarer ses charges au réel (prêt immobilier, intérêt d’emprunt, taxes foncières, frais d’agence, etc.).
Cette seconde option permet d’imputer 10 700 euros par an, reportable sur six à dix ans. Le régime du déficit foncier est un engagement sur trois ans qui nécessite d’avoir des liquidités ou de passer par un financement. Pour déclarer au réel, le propriétaire doit reprendre l’ensemble des factures déductibles des impôts (les charges courantes), ainsi que tous les frais liés aux travaux, diagnostics énergétiques et audits, devis et factures d’artisans. « L’option forfaitaire est parfaitement adaptée aux contribuables qui enregistrent peu de charges fixes. En revanche, la déclaration au réel présente un vrai intérêt dans le cadre d’une stratégie d’amélioration et valorisation du patrimoine », indique Safia Tomasino, rappelant que, dans ce cas de figure, « le coût des travaux doit être supérieur à l’abattement fiscal et reportable durant trois ans, ce qui permet d’étaler les dépenses et d’optimiser son déficit dans le temps. » Si la loi Climat et résilience et ses échéances fixées à 2025, 2028 et 2031 participent à l’engouement du grand public pour le déficit foncier, l’entrée en vigueur, en avril 2023, du rehaussement du montant déductible au titre du déficit foncier, à hauteur de 21 400 euros, pour les travaux de rénovation énergétique, a été un élément déclencheur. Trois conditions sont requises pour bénéficier de cette bonification : réaliser ces travaux entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2025, que le devis ait été accepté après le dépôt de l’amendement en novembre 2022 et que ces rénovations fassent basculer des biens de classe E, F ou G en classe A, B, C ou D au 31 décembre 2023. « L’objectif est d’accomplir le maximum de travaux d’ici à l’interdiction de location pour les logements classés G », note Safia Tomasino. Une aubaine fiscale pour les propriétaires de passoires thermiques pour lesquelles le prix d’une rénovation énergétique, pour un bien classé G, se chiffre entre 8 000 et 10 000 euros du mètre carré.
Solutions clés en main
Il est également possible d’investir dans l’ancien sans, nécessairement, avoir recours à un dispositif fiscal. Les incertitudes réglementaires et les difficultés de financement ont réduit le nombre de candidats à la défiscalisation. L’occasion pour les opérateurs de formuler de nouvelles offres spécifiquement dédiées à la rénovation de l’immobilier ancien et qui touchent un plus large public.
C’est notamment le cas d’Histoire & Patrimoine qui a lancé, en septembre dernier, la marque Jouvence. Partie du constat tiré par Alain Taravella, patron de la maison-mère, Altarea, que « l’ancien, c’est l’avenir », la filiale spécialiste du dispositif monuments historiques a développé une offre immobilière « prête-à-habiter » pour répondre aux besoins urgents de rénovation énergétique des logements.
Cette solution repose sur quatre étapes : l’identification des biens anciens énergivores afin de les sauver et les conserver dans le paysage urbain, l’optimisation des pièces et des futurs lieux de vie par des architectes d’intérieur, la rénovation totale du bien avec des entreprises locales conformément au cahier des charges de la marque et l’emménagement du nouveau résident. « Avec Jouvence, nous proposons une offre inédite d’appartements totalement rénovés et remis aux normes, conjuguant le charme de l’ancien et le confort du neuf et à l’efficacité énergétique retrouvée », annonce Rodolphe Albert, président d’Histoire & Patrimoine. La marque vise une autre typologie de clientèle que celle des dispositifs Malraux ou monuments historiques, à 50 % d’investisseurs qui ne veulent pas d’optimisation fiscale, mais plutôt arbitrer sur leur portefeuille d’actifs.
Avec un coût de travaux avoisinant les 1 500 euros le mètre carré et des biens ne dépassant pas le million d’euros à l’achat, et accessibles à partir de 350 000 euros, Jouvence entend ouvrir le marché de l’ancien rénové. « L’objectif est de rénover le bien sans changer son plan ni sa typologie, d’améliorer son DPE et d’obtenir une valorisation de ses éléments patrimoniaux pour un prix de vente total estimé entre 5 et 10 % au-dessus des prix du marché », précise Rodolphe Albert, convaincu que dans l’ancien, la vraie valeur réside dans les travaux.
L’offre Jouvence a été déployée sur trois programmes livrés cet été, représentant quarante-quatre logements:six appartements situés à Bordeaux, trente-et-un à Cannes et sept à Hyères. Trente-six logements seront livrés, d’ici la fin de l’année, dans un immeuble du XIVe arrondissement de Paris.
Le groupe s’est fixé pour ambition de commercialiser deux mille lots d’ici trois ans et d’ajuster son offre en fonction des besoins du marché.
Travaux, on sait quand ça commence…
Investir dans l’ancien avec travaux peut néanmoins être stressant, voire décourageant, pour les particuliers.
Pour les accompagner dans leurs démarches, la plate-forme Masteos propose, elle aussi, une offre packagée, via sa filiale travaux et son réseau d’artisans, aux investisseurs. Moyennant une commission de 6 % du prix net vendeur du bien, la société s’occupe de la gestion du chantier et l’assure, sélectionne des devis de travaux à des prix compétitifs, propose un « pack meubles », ainsi qu’une solution de gestion locative. « Le bâtiment est un secteur à très fort taux de sinistralité, avec près de la moitié des chantiers qui finissent en contentieux, ou connaissent des retards ou dépassements de devis. Pour sécuriser son opération immobilière, mieux vaut payer un intermédiaire qui indemnise les propriétaires en cas de problème et lui apporte une réponse juridique et financière, le cas échéant », Thierry Vignal.
Parmi les services à la carte proposés par Masteos, figurent, notamment, l’aide à trouver un bien et à la transaction chez le notaire, la réalisation de la structuration fiscale ou du dossier bancaire si besoin, la relecture du compromis de vente et/ou de l’offre de prêt, la mise aux normes énergétiques, l’ameublement, la location et la comptabilité, et la fiscalité locative. Le volet travaux peut, parfois, devenir problématique lorsqu’il se heurte à la copropriété. « Dès lors que l’on touche à un élément structurel de l’immeuble – mur porteur, fenêtre, façade, cloison, etc. –, cela nécessite l’accord de la copropriété et la tenue d’une assemblée générale pour voter l’autorisation ou non des travaux après étude du contrôle de structure », explique Thomas Prud’Homoz, notaire associé chez KL Conseil. Certains travaux nécessaires à l’amélioration du DPE, et parfois à la location du bien, peuvent être refusés par les colocataires, contraignant, dans le pire des cas, les propriétaires à vendre leur bien avec une décote. « Si, dans la perspective de valorisation d’un bien, il est impossible de réaliser d’importants travaux, c’est tout le business plan de l’investisseur qui s’effondre », prévient le notaire.
A contrario, certains travaux d’isolation risquent de faire perdre des mètres carrés, et donc de la valeur, au bien immobilier. « Toute rénovation énergétique aura un impact sur la surface du logement et devra être considérée en fonction du prix au mètre carré. Le jeu n’en vaut pas toujours la chandelle », concède Thomas Prud’Homoz. Pour ce dernier, le meilleur moyen de s’assurer une plus-value à la revente reste d’acheter à un bon prix, en deçà des valeurs du marché.
Solliciter les aides de l’Etat
Les propriétaires qui souhaitent réaliser les travaux par eux-mêmes peuvent, toutefois, bénéficier d’aides de l’Etat et de dispositifs de financement en lien avec la rénovation énergétique.
Pour une maison individuelle, les investisseurs en personne physique – les SCI ou Sarl familiales sont exclues – sont éligibles aux certificats d’économies d’énergie (CEE) et au dispositif Coup de pouce rénovation globale qui offre une bonification conséquente, dès lors que l’on enregistre un gain énergétique de plus de 55 %, facile à atteindre pour les étiquettes F et G. Cet avantage est cumulable avec l’aide publique MaPrimRénov’, ouverte aux propriétaires bailleurs jusqu’à trois logements en plus de leur résidence principale.
Des logements qui devront ensuite être loués pour de la résidence principale. « Ce dispositif ayant une vocation sociale, l’Anah est vigilante sur l’utilisation du bien et va s’assurer que le propriétaire loge son locataire dans un habitat décent et pas trop énergivore », souligne Etienne Duhot, responsable projet chez l’expert en rénovation énergétique Hellio.
En revanche, les appartements en copropriété ne donnent pas droit à une aide individuelle, hormis les mono-gestes de type isolation par l’intérieur, remplacement d’une menuiserie ou changement d’un système de chauffage.
Problème, ces rénovations isolées peinent à obtenir un gain énergétique suffisant. « A l’échelle d’un immeuble collectif, les bailleurs devront plutôt chercher des aides sur le bâtiment entier, telles que le Coup de pouce rénovation globale pour l’ensemble de la copropriété. Mais pour cela, il faut que tous les propriétaires, ainsi que le syndic, s’impliquent et engagent un audit énergétique, obtiennent la validation de l’assistance à maître d’ouvrage, puis établissent un projet à trois ans, avec engagement financier et répartition des charges au tantième», précise Etienne Duhot. Parents pauvres de la rénovation, les appartements situés dans les combles et au rez-de-chaussée : « plus il y a de surfaces donnant sur l’extérieur, plus le DPE sera mauvais », ajoute-t-il.
Il existe également un autre pan d’aides à ne pas négliger : les aides locales ou régionales qui soutiennent l’investissement dans des audits énergétiques ou financiers, ainsi que des forfaits travaux (installation d’une pompe à chaleur, par exemple) jusqu’à 10 000 euros. « Le socle de ces aides est défini en fonction du gain énergétique et s’aligne sur les aides publiques », souligne Etienne Duhot.
Enfin, l’éco-prêt à taux zéro ouvert aux propriétaires-bailleurs demeure intéressant en période de taux élevés. « Pour un projet de rénovation évalué à 60 000 euros, le propriétaire bénéficiera de 44 000 euros d’aides et un reste à charge de 16 000 euros. Financé avec un éco-prêt à taux zéro sur cinq ans, cela lui reviendra à 150 euros par mois », calcule le responsable. Pour ce dernier, le montant des aides, par rapport au budget travaux et au prix d’achat déterminera le financement adapté. « Il faut prendre en compte que le coût des travaux et de la main-d’œuvre augmente. Avant l’achat, une étude thermique s’impose pour évaluer le retour sur investissement après travaux et la viabilité économique du projet », conseille-t-il.
Une chose est sûre, l’amélioration des performances énergétiques valorisera d’autant le bien. « Selon le guide de la valeur verte des logements après rénovation publié par les Notaires de France, un saut de classe correspond à une revalorisation du prix, en moyenne, de 5 % », indique Etienne Duhot. Si à Paris, les écarts de prix sont faibles, dans les régions où l’impact climatique est important (dans le Sud-Ouest, par exemple), la différence est de l’ordre de 30 à 35 % entre une étiquette A et G, de 12 % entre B et C et 20 % entre F et G:soit un écart de valeur moyen de 32 %. « Les agents immobiliers constatent que la consommation énergétique est le troisième critère de recherche d’un bien, après le prix et l’emplacement », observe le spécialiste. Dont acte pour les bailleurs.
SCPI fiscales, options de diversification
Alternatives à l’investissement dans la pierre, les sociétés civiles en placement immobilier (SCPI) fiscales disposent des avantages de la pierre-papier (confort de gestion, mutualisation des risques et diversification des actifs), tout en tirant profit des dispositifs fiscaux dédiés à la rénovation. « Pour les primo-investisseurs, les SCPI fiscales dans l’ancien sont une option à envisager. En confiant l’achat du bien et la réalisation des travaux à une société de gestion, ils peuvent réaliser un premier achat sans connaître les soucis liés à l’immobilier », note Jérémy Schorr, directeur commercial de Bienprévoir.fr et de Primaliance.
Produits marginaux au regard des SCPI de rendement, ces véhicules ont une durée de vie de quinze ans et impliquent un engagement sur le long terme. « Les SCPI fiscales présentent une chronologie séquentielle, en plusieurs phases. La collecte dure deux à trois ans, suivie de l’achat des immeubles, de leur mise en location, puis de leur liquidation après douze à treize ans. Le porteur de parts doit donc être conscient qu’il s’agit d’un placement quasi-illiquide et, qui plus est, qu’il peut perdre son avantage fiscal en cas de sortie anticipée. En outre, la revente de gré à gré se fera avec un risque de forte de décote, de 30 à 40 % », prévient Franck Temim, conseiller en investissements financiers au cabinet Franck Temim. Côté distribution, les SCPI fiscales délivrent un rendement autour de 1,5 %, contre 4,5 % pour une SCPI de rendement, mais elles ouvrent l’accès à un immobilier résidentiel de qualité à un prix abordable, affichant un ticket d’entrée à partir de 5 000 euros, pour un niveau de souscription moyen d’une dizaine de milliers d’euros. « Les SCPI permettent de calibrer de façon plus précise, en fonction du prix de part, son investissement et ne nécessitent pas de passer par un financement bancaire, même si cela reste possible avec une poignée de partenaires bancaires », rappelle le conseiller. Dans le cadre d’une stratégie de diversification d’un portefeuille, les SCPI fiscales sont un bon moyen de réduire sa fiscalité, tout en profitant des avantages des SCPI de rendement.
La société de gestion Urban Premium commercialise trois SCPI fiscales couvrant l’ensemble du marché de la rénovation : la SCPI Denormandie Urban Vitalim 4 qui, pour une souscription de 50 000 euros, annonce une économie d’impôt cumulée de 10 500 euros sur douze ans ; la SCPI Malraux Urban Prestigimmo 5, ciblée sur le cœur de ville et diversifiée (commerces, habitation) qui offre une réduction d’impôt de 5 400 euros, soit 18 % du montant souscrit de 30 000 euros et 18 000 euros de travaux ; et la SCPI déficit foncier Urban Pierre 6 qui, pour 50 000 euros de souscription, 20 000 euros de revenus fonciers et 27 000 euros de travaux, propose une économie fiscale de 12 744 euros sur deux ans pour les TMI à 30 % et de 16 794 euros pour les TMI à 45 %. A noter que Urban Vitalim 4 et Urban Pierre 6 sont classés article 8 en application des dispositions du règlement Disclosure (SFDR), avec pour objectif des notes DPE a minima de D après travaux de réhabilitation, d’amélioration ou de transformation, avec une moyenne à C.
Investir dans l’ancien : y aller… ou pas ?
Valeur verte ou décote brune, selon Jérémy Schorr, « il se dessine, au fil des mois, une distinction de plus en plus forte entre les bien rénovés, évalués au juste prix, ceux qui vont au-delà du cahier des charges et qui bénéficient d’une surcote et tous les biens obsolètes, dévalorisés ». Fort de ce constat, l’investisseur prêt à se lancer dans la rénovation peut encore tirer son épingle du jeu. « Je crois profondément que les contraintes de la loi Climat et résilience vont devenir des moteurs du marché, en accélérant la rotation entre les propriétaires qui souhaitent vendre leur bien et les investisseurs qui veulent bénéficier du déficit foncier ou, tout simplement, des avantages du régime du loueur en meublé non professionnel (LMNP) et de son mécanisme d’amortissement, pour la location meublée », affirme Stéphane van Huffel, directeur général de Netinvestissement, un site Internet de conseil en gestion de patrimoine. Pour ce dirigeant, face à un marché du neuf sclérosé, seul l’ancien peut sauver l’investissement immobilier et locatif, grâce à sa profondeur de marché. Et les opérateurs l’ont bien compris. « Nous n’avons pas fini de voir naître des innovations et des offres commerciales spécifiques à l’ancien rénové », pressent-il.
Un changement de paradigme qui modifie le prisme de l’investissement en y intégrant de nouveaux critères de valeur et de performances énergétiques.
Transformer le bureau en hôtel
Valoriser le patrimoine français sous-capitalisé, telle est la mission d’Archides, spécialiste de la transformation et de l’exploitation de surfaces de bureaux en suites hôtelières haut de gamme à Paris. Ciblant les actifs à l’identité visuelle forte et aux caractéristiques patrimoniales d’exception (monuments historiques, bâtiments classés à l’inventaire des monuments historiques ou protégés par la Ville de Paris), le groupe opère les travaux de réhabilitation et de réaménagement nécessaires à la remise aux normes énergétique et architecturale, puis de l’exploitation de tout ou partie de ces biens. « Nous valorisons par les travaux les actifs de bureaux vacants, sous-utilisés ou obsolètes, détenus par des propriétaires privés, familles, petites foncières ou institutionnels », explique Raphael-Elie Lorin, directeur immobilier d’Archides.
Créée en 2017, la société a mis au point une équation économique qui repose sur l’amortissement des travaux sur dix ans et l’activité hôtelière, tout en versant une rente au propriétaire. « La première motivation des propriétaires est de retrouver le rendement que ne délivre plus le bureau grâce au transfert de valeur vers l’hôtellerie », ajoute-t-il. Détenant une centaine d’adresses en région parisienne, pour une valeur de plus de 150 millions d’euros d’actifs sous gestion, Archides se concentre sur les pôles d’attractivité touristiques – Le Louvre, tour Eiffel, Champs-Elysées, Notre-Dame et les grandes artères haussmanniennes – et les pépites historiques.
Deux programmes en Malraux et monuments historiques
Eligible au dispositif Malraux/déficit foncier
Le 15 rue du Puits à Honfleur (Calvados)
-Trois lots disponibles de type T3 duplex
-De 389 400 euros (51,92 m2) à 515 900 euros (75,80 m2)
-Quote-part de travaux:58 %
-Ratio du foncier:41 %
Opérateur:Buildinvest
Eligible au dispositif monument historique/déficit foncier
Ancien Hôtel
- Dieu à Coutances (Manche)
- Du studio au T3
- Quote-part de travaux : 93 %
- Date de livraison : 2025
Opérateur : groupe François Ier