Alors que le marché du logement a montré sa résilience en 2020, la crise rebat les cartes sur le territoire, avec l’accélération des villes moyennes et la ruée vers l’ouest. Le marché reste toutefois soumis à des choix politiques pas toujours favorables aux investisseurs. L’analyse de la Fnaim.
#Conjoncture : Prix, transactions, taux d’intérêt, crise économique, décrochage Paris-province…Le marché du logement s’est montré une nouvelle fois particulièrement résistant, avec un volume de transactions en légère baisse, mais qui reste sur l’année 2020 au-dessus du million de ventes. De leur côté, les prix (arrêtés au 10 juin 2021) résistent, toujours soutenus par le niveau très bas des taux d’intérêt. Alors, quel impact aura eu la crise sanitaire et ses confinements sur le marché immobilier ? Un changement des comportements et des attentes : les zones rurales et les villes moyennes se sont montrées les plus dynamiques et il y a eu, indéniablement, une ruée vers le littoral et l’Ouest.
La pierre a remarquablement résisté en 2020
Malgré un léger décrochage par rapport au record de l’année 2019 (1 067 000 ventes), le volume de transactions est resté en 2020 au-dessus du million, en s’établissant à 1 024 000 ventes. Au-dessus donc des années précédentes.
Plus marquant encore, sur un an à fin mars 2021, la FNAIM dénombre 1 080 000 ventes, en hausse de 4% sur un an. Preuve que le marché est resté particulièrement dynamique malgré les épreuves.
La hausse des prix reste significativeDe même, en valeur, les prix au 2ème trimestre 2021 (au 10 juin 2021) se sont non seulement maintenus, mais ils ont poursuivi leur progression, à +5,1%, alors que, parallèlement, l’inflation s’est établie à 1,4 %.
Au niveau national, le prix moyen du mètre carré s’établit à 2 892 €. Plus précisément, à 3 916 € pour les appartements (+5%) ; et à 2 364 € pour les maisons (+5,2%).
C’est sur les maisons que la hausse apparaît la plus indicative, preuve du regain d’intérêt pour ces dernières depuis la crise sanitaire. A titre de comparaison, les prix au m² des maisons n’avaient augmenté que de 2,6% au 2ème trimestre 2020 et de 1,4% au 2ème trimestre 2019.
Paris décroche, les villes moyennes et la France rurale décollentLa synthèse occulte de fortes disparités, en particulier entre la capitale et le reste du territoire. A Paris, les prix ont pour la première fois depuis plusieurs années connu un léger repli à -0,9%, et atteignent, pour les appartements, les 10 371 euros du mètre carré. En Île-de-France, la progression est de 3,5 %, à 6 377 € le mètre carré pour les appartements, et de 6,1 % à 3 566 € pour les maisons. En province, les prix progressent significativement aussi, de 5,7% pour l’ensemble des biens. Dans les DOM (hors Mayotte), ils augmentent de 2,4%.
Marqueur du changement, ce sont les zones rurales et les villes moyennes qui se montrent les plus dynamiques. Alors que les prix étaient en augmentation de « seulement » 0,7 % en zones rurales et 3,4% pour les villes moyennes sur un an au 10 juin 2020, ils augmentent de 2 ,4 % pour les zones rurales et de 7,2 % sur un an au 10 juin 2021.
En parallèle, les métropoles sont moins dynamiques (« seulement » + 3,6% d’augmentation des prix au m² sur un an), avec des disparités : +6,2 % à Dijon sur un an, +5,6% à Ajaccio et + 5,5 % à Orléans et Rennes. A Bordeaux, la hausse n’est plus que de 2,2% sur un an.
Corollaire de ces différences, la surface achetable (pour un bien de 60 m²) augmente légèrement à Paris (+1,2 m²), alors qu’elle recule dans l’ensemble des autres villes à l’exception de Toulouse où la surface reste exactement la même.
Ce décrochage de Paris, par rapport à la France rurale et aux villes moyennes, est l’indicateur marquant de l’effet de la crise sanitaire sur le parcours immobilier des Français.
#Politique : Réussir la rénovation énergétique ou faire face à une pénurie de logements ?Alors que le Sénat vient d’achever l’examen du projet de loi Climat et Résilience, force est de constater qu’il a conforté l’ambition écologique d’un texte qui n’en manquait déjà pas, tout en insufflant une nécessaire dose de pragmatisme. Avant l’étape décisive de la Commission Mixte paritaire, la FNAIM invite les parlementaires à préserver cet équilibre. L’affichage d’objectifs climatiques ne doit pas l’emporter sur le réalisme des mesures votées. La FNAIM rappelle la réalité du parc frappée par les mesures du projet de loi, tout en soulignant que le paysage est en mouvement puisque « 40 % des biens vont changer de classe entre l’ancien et le nouveau DPE », qui entre en vigueur le 1er juillet 2021.
Loi Climat et résilience & nouveau DPEAlors que les députés avaient introduit une interdiction de location des logements classés E en 2034, en complément de l’interdiction de location des F et G à horizon 2028, sans mesure convaincante d’accompagnement pour les bailleurs ou les copropriétés, le Sénat a reporté l’interdiction sur les logements E à 2040, tout en prévoyant des dispositifs ambitieux d’accompagnement de la rénovation des F et G, ce dont se félicite la FNAIM.
Dans le seul parc privé locatif, 70% de ces biens énergivores sont situés en copropriété. Ce sont des petites superficies (60% des biens de moins de 30 m²) et des logements anciens (70% des logements datant d’avant 1948 ; 55% des logements construits entre 1949 et 1974). Les biens F et G actuellement loués dans le parc privé représentent 1,7 million de logements, 22% du parc ; les biens E représentent 1,9 millions de logements supplémentaires, 26% du parc privé locatif.
Les biens énergivores ne sont d’ailleurs pas forcément ceux que l’on croit. Avec la réforme du DPE, entrée en vigueur au 1er juillet 2021, 40 % des biens vont changer de classe entre nouveau et ancien DPE : près de 200 000 logements chauffés au gaz et 600 000 chauffés au fioul qui n’étaient pas classés F ou G le deviendront. Ces biens sont d’abord situés dans des départements ruraux et/ou montagnards, également touchés par les mesures sur les véhicules.
Un accompagnement financier nécessaireAutres requêtes de la FNAIM : que les ménages et les copropriétés concernés soient accompagnés financièrement dans le cadre de ces nouvelles obligations. Elle salue les mesures adoptées par le Sénat, qui vont dans le sens d’une préservation du parc privé locatif et propose :
- de ne pas envoyer de mauvais signal aux bailleurs en préparant un accompagnement financier réservé à une « rénovation performante » trop souvent techniquement irréalisable. Tous les logements ne pourront pas atteindre les seuils A ou B du DPE. Une rénovation performante, c’est celle qui permet de sortir du statut de « passoire thermique »
- De maintenir les mesures votées au Sénat : doublement du déficit foncier pour les travaux de rénovation énergétique, extension du Denormandie aux logements classés F et G, renforcement des outils juridiques (congé pour travaux, simplification du PPT, portabilité du fonds travaux)
Garantir à long-terme les dispositifs MaPrimeRénov', l’Eco-PTZ En ligne de mire : quelle offre pour loger les Français demain ?Plus les contraintes sont nombreuses (permis de louer, encadrement des loyers…), plus la tentation est forte de louer son bien pour une courte durée via une plateforme. D’où une reprise de la location touristique depuis janvier 2021. L’offre de logements à vendre est en baisse de 26 % sur six mois. Une pénurie sur le neuf, mais également sur l’ancien.
Pour la FNAIM, le retour des investisseurs institutionnels sur le segment résidentiel, espéré par beaucoup, comme alternative, n’est pas sans soulever quelques interrogations. L’État peut-il raisonnablement compter sur eux au détriment des petits épargnants ? Sont-ils la solution au défi de la rénovation énergétique de logements éparpillés sur le territoire, et de lutte contre la pénurie de l’offre ?
Alors que la campagne présidentielle 2022 se profile, la FNAIM espère que le logement occupera une place centrale dans les débats à venir et appelle à une simplification de l’investissement locatif du particulier et du paysage réglementaire des bailleurs…