C’est l’aboutissement d’une « success story ». La capitalisation de Tesla a franchi le seuil symbolique des 1 000 milliards de dollars ce lundi 25 octobre. La société, dirigée par son charismatique milliardaire, a rejoint le club fermé des entreprises de ce niveau de valorisation : Apple, Microsoft, Aramco, Alphabet et Amazon. Elle est devenue la 6ème capitalisation mondiale en détrônant Facebook, dont le titre est en retrait de 17% depuis le 7 septembre, et changera de nom pour Meta, en référence au metavers. Elon Musk est ainsi devenu l’homme le plus riche du monde depuis cet été, avec une fortune désormais estimée à plus de 292 milliards de dollars. Il creuse l’écart avec l’ancien numéro un, Jeff Bezos, crédité de 196 milliards de dollars.
Pourtant, Tesla était quasiment en faillite en 2008, sauvée par une prise de participation de Daimler. À l’époque, le constructeur allemand avait investi dans un tour de table 50 millions de dollars pour 10% du capital. S’il n’avait pas vendu ses titres pour 800 millions de dollars en 2014, cette ligne représenterait aujourd’hui plus de 100 milliards de dollars, soit quasiment la totalité de sa valeur en bourse (90 milliards d’euros) !
Tesla et le marché est une histoire qui commence en juin 2010 par son introduction en bourse, avec une action dont le cours est fixé à 17 dollars, donc une capitalisation de 2 milliards de dollars, soit 500 fois moins que celle d’aujourd’hui ! En tenant compte du seul split de 5 pour 1 du 31 août 2020 et des différentes augmentations de capital, un particulier, ayant investi seulement 1 000 dollars à l’IPO, disposerait actuellement d’un joli magot de 316 780 dollars, contre 5 367 dollars (dividendes réinvestis) pour une somme identique placée sur la bourse américaine (selon l’indice Standard & Poors 500). En réalité, les chiffres commencent à s’affoler à partir de mars 2013, dès le lancement de la Model S. C’est un véhicule, dont le premier prix est fixé en Europe à 64 760€ et qui affiche des performances inédites pour une motorisation électrique, avec 370 kilomètres d’autonomie pour la série de base. Ce succès est salué par le marché avec une performance boursière depuis 2010 qui passe de 100% à plus de 1000% en 6 mois. L’étape suivante arrive avec la commercialisation du modèle 3 en juillet 2017, avec un maximum de 600 kilomètres d’autonomie et son chargeur ultra-rapide en 30 minutes. Cela se traduit par une performance qui bondit à plus de 2000% à cette date. Par la suite, le titre a été victime d’une traversée du désert qui durera jusqu’en mai 2019. Depuis, nous assistons actuellement à la fulgurante troisième vague, qui porte à 31 678% la performance historique cumulée depuis 2010. Cette ascension est due à l’expansion à l’international et une production qui décolle. Fondamentalement, le point mort est atteint, avec un bond de la profitabilité. Après une perte opérationnelle de 5,8 milliards de dollars en 2019, les profits en dollars devraient passer de 2,5 milliards en 2020 à plus de 6 milliards cette année et à 9,3 milliards en 2022. Les perspectives sont donc prometteuses. L’éternel problème avec ce titre est sa valorisation, avec un multiple prix sur bénéfice par action de 178 pour cette année et 128 fois l’année prochaine. Or, le secteur se paie entre 5 et 10 fois pour les plus gros concurrents et cette prime ne se justifie pas par la faible notation ESG à 24/100, selon Vigeo Eiris… La cause du récent rebond est liée à l’annonce d’une méga commande de plus de 100 000 véhicules par le loueur Hertz, dans un contexte où de nombreux spéculateurs avaient d’importantes positions à la baisse. Ainsi, un record de 5 milliards de dollars de primes de calls (options d’achats) ont été échangées lundi dernier. Les vendeurs se sont rachetés pour solder leurs pertes. L’énorme succès de Tesla est également synonyme de cauchemars pour les hedge funds depuis de longues années.
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par Arnaud Benoist Vidal, Analyste macroéconomique - Gérant du fonds Arc Actions Santé Innovante
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