Crédit immobilier : quelles évolutions ? Les bonnes pratiques pour obtenir un financement

20/04/2023

Dans un contexte de contraintes réglementaires fortes, d’inflation et de remontée des taux d’emprunt, les banques durcissent leurs conditions d’octroi de crédits immobiliers. Comment préparer son projet et constituer son dossier pour mettre toutes les chances de son côté ?


Une remontée brutale des taux d’emprunt

Depuis le début d’année 2022, le marché du crédit immobilier a beaucoup évolué. « Il s’agit en réalité d’un retour à la normale », explique Pierre Féquant, Directeur des comptes stratégiques chez Valorissimo. « Nous sortons d’une décennie pendant laquelle le robinet du crédit était grand ouvert, c’est cette situation qui était exceptionnelle. » Cécile Roquelaure, Directrice des études chez Empruntis, souligne l’évolution nette des taux de crédit : « En janvier 2022, la moyenne sur 20 ans s’établissait à 1 % et les banques parvenaient à faire de la marge. Cela a permis une hausse très forte des prix de l’immobilier. Aujourd’hui, le taux est remonté à 3 % en moyenne sur 20 ans et les banques n’ont plus de marge. Pour les emprunteurs, cette hausse a un impact direct sur leur pouvoir d’achat puisqu’il a baissé de 14 à 18 % selon les profils. »


Un durcissement des conditions d’octroi

Depuis 2015, le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) parlait d’un emballement du marché du crédit immobilier. Il est intervenu plus fermement fin 2021 en posant des contraintes strictes : taux d’endettement maximal établi à 35 % (assurance emprunteur comprise), durée d’emprunt de 25 ans maximum, excepté si l’on achète un logement devant subir une réhabilitation importante ou si l’on investit dans la construction neuve. La durée maximale est alors portée à 27 ans.

Ces recommandations du HCSF sont devenues des obligations auxquelles les banques ont dû se plier à compter du 1er janvier 2022. « Les établissements bancaires pratiquaient déjà un taux d’endettement plafonné à 33 % », observe Cécile Roquelaure, « ce point a donc peu changé. En revanche, l’intégration de l’assurance emprunteur dans le calcul est contre-intuitive puisque le législateur a fait en sorte que l’on puisse changer de contrat facilement, afin de diminuer ses cotisations au bout de quelques mois. Cette contrainte pèse désormais sur le calcul du taux d’endettement. »


Taux d’usure et critère environnemental, entre contrainte et protection

Fixé par la Banque de France, le taux d’usure a vocation à protéger les emprunteurs d’éventuels taux abusifs de part des établissements prêteurs. Or, son faible niveau au cours des derniers mois, conjugué à la hausse des taux de crédit, a contribué à durcir encore les conditions d’emprunt car les banques sont plus sélectives. Résultat ? De nombreux dossiers de demandes de prêts immobiliers ont été bloqués. « Comme les règles fixées par le HCSF, le taux d’usure apparaît comme une contrainte mais c’est avant tout un moyen de protection réglementaire », souligne Pierre Féquant.

La contrainte environnementale est un autre changement récent pour les investisseurs. « Le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) d’un logement ancien est maintenant étudié de près par les banques car l’acquéreur doit être en mesure de financer les travaux de rénovation. C’est une tendance favorable pour l’environnement et qui doit encourager les investisseurs à opter pour le neuf plutôt que l’ancien », explique l’expert de Valorissimo.


À qui les banques prêtent-elles ?

Les deux experts s’accordent à dire que les « dossiers normaux » sont ceux que les établissements bancaires accompagnent le plus volontiers. « Il existe une prime au crédit pour une population intermédiaire, qui présente des revenus pérennes, un apport de 10 % du prix du bien, une gestion irréprochable de ses comptes et une épargne de sécurité pour faire face aux imprévus de la vie », constate Cécile Roquelaure. « Les ménages modestes, en CDI mais qui ne disposent pas de cet apport de 10 %, ont beaucoup de difficulté à emprunter. »


Optimiser son dossier d’emprunt

Pour préparer un projet immobilier, il est important d’étudier sa capacité d’emprunt dès le début des recherches. Pour Cécile Roquelaure, la simulation réalisée par le conseiller bancaire est une première approche qui ne pourra être effectuée qu’après la signature du compromis. « Pour avoir la meilleure visibilité sur son projet et éviter les déceptions après la signature d’un compromis de vente, il faut exiger une étude complète et pas une simple simulation », recommande-t-elle.

Disposer d’un apport minimal de 10, 12, ou 15 % du montant du bien est aujourd’hui nécessaire, aussi bien pour un investissement locatif que pour l’achat d’une résidence principale. « Cet apport permet aussi de réduire le taux d’endettement et de faire passer un dossier plus facilement », souligne Pierre Féquant, qui insiste néanmoins sur l’importance de conserver un minimum de liquidités de côté, pour faire face aux aléas de la vie.

Tous les leviers à disposition des emprunteurs doivent être étudiés. Le prêt à taux capé, qui limite les variations du taux, peut être pertinent pour mener un projet d’investissement locatif. On pensera aussi au prêt à paliers si l’on a déjà souscrit un premier crédit, ou encore au prêt à taux semi-fixe pour sécuriser une première période lors d’un achat de résidence principale. « Il est important d’être bien accompagné pour envisager un montage financier optimal. Les prêts aidés sont également à prendre en compte. Le PTZ est par exemple un vrai coup de pouce accordé aux ménages », appuie Cécile Roquelaure. Il est par ailleurs essentiel d’adapter son assurance emprunteur selon son projet et ses besoins réels (achat en couple ou seul, investissement locatif ou non).

Si la mise en concurrence des banques est toujours intéressante, Pierre Féquant souligne l’intérêt de s’adresser à sa banque en priorité. Enfin, il peut être intéressant de faire appel à un courtier qui saura défendre au mieux un dossier grâce à son réseau de partenaires bancaires et son expertise financière. « Ses marges de négociation sont les mêmes qu’il y a un an », conclut Cécile Roquelaure.