Acteur historique du marché des CGP, Generali affiche une belle croissance de son activité depuis le début de l’année et réaffirme son objectif de diversifier l’épargne des investisseurs. Entretien avec Hugues Aubry, membre du comité exécutif de Generali France, en charge du marché de l’épargne et de la gestion de patrimoine, et Corentin Favennec, directeur des partenariats de Generali Patrimoine.
Investissement Conseils : Quel regard portez-vous sur votre marché ?Hugues Aubry : Il est très positif ! 2024 devrait être une année record pour l’assurance-vie en France, avec environ 15 milliards d’euros de collecte brute par mois depuisle début de l’année, soit 107 milliards d’euros sur les sept premiers mois de l’année. A ce rythme, nous pourrions atteindre les 160 à 180 milliards d’euros d’ici la fin de l’année, contre 153 milliards l’an passé. Ce retour vers l’assurance-vie est logique, après des années 2022 et 2023 durant lesquelles les épargnants s’étaient orientés vers des produits bancaires à la rémunération à court terme attrayante. Or depuis le début de l’année, les anticipations d’inflation se sont inversées et la courbe des taux est redevenue plus « classique ».Qu’en est-il pour Generali Patrimoine ?H. A. : Notre compagnie dispose d’un positionnement unique sur le marché français, avec une position de leader auprès des « tiers distributeurs » (conseillers en gestion de patrimoine, courtiers internet et FinTechs, banques privées et régionales) représentant 70 à 72 milliards d’euros d’encours sur un total de 80 milliards pour Generali France. Nous avions anticipé ce retour vers l’assurance-vie dès l’automne 2023, et nous avons eu la volonté d’être offensifs sur le premier semestre 2024 en mettant l’accent sur nos fonds en euros, avec des boosts sur les versements. Ceux-ci ont été prisés par nos partenaires et leurs clients, et nous ont permis de nous refinancer à des taux attractifs. En effet, cette stratégie a payé car nous avons collecté environ 7 milliards d’euros bruts sur ce semestre sur nos contrats français, avec un bel équilibre entre UC et fonds en euros (47 % d’UC), contre 6,5 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année passée. Que ce soit globalement sur le marché ou chez Generali France, après une année 2023 placée sous le signe des rachats sur les fonds en euros, notamment dus aux offres bancaires de court terme, les flux nets de Generali France depuis le début de l’année sont positifs à + 2,5 milliards d’euros, dont 1 milliard sur les fonds en euros et 1,5 milliard sur les unités de compte en ligne avec les années précédentes. Cette hausse de la collecte se retrouve également sur nos contrats luxembourgeois, avec une collecte brute qui dépassera le milliard d’euros en 2024, contre environ 900 millions d’euros habituellement. En effet, Generali Luxembourg est notre filiale qui s’arrime en cohérence avec nos produits développés en France et qui s’adresse à une autre typologie de clients, notamment mobiles géographiquement. Dans les prochains mois, nous nous attendons à un retour des flux sur les contrats de capitalisation, les personnes morales ayant, à juste titre, saisi l’aubaine sur les offres bancaires. De même, nous nous attendons à une augmentation du taux d’épargne des ménages en raison, malheureusement, des tensions politiques et géopolitiques.Et sur le marché des CGP ?Corentin Favennec : D’un point de vue global, l’activité de nos partenaires CGP est en forte progression avec une croissance moyenne de 5 % sur la période 2018-2022, contre 1 % pour le marché. L’an passé, notre collecte via les CGP a atteint 2,6 milliards d’euros, en hausse de 6 %, et depuis le début de l’année nous avons d’ores et déjà dépassé ce niveau. Comme toujours, les CGP ont su s’adapter aux variations de marché en diversifiant les actifs de leurs clients avec le fonds eurocroissance pendant la période de taux bas, mais aussi les produits structurés, les actifs réels… Cette année, ils ont su orienter leurs clients vers les fonds en euros boostés, tout en continuant à diversifier leurs allocations vers les UC via des produits de taux (fonds datés, fonds monétaires, produits structurés), mais aussi des fonds de Private Equity et d’infrastructures. Tous ces éléments démontrent la pertinence de notre stratégie développée lors de la période de taux bas, notre nouveau modèle épargne, qui est toujours une réalité chez nous. Celle-ci est tournée vers la diversification et se matérialise dans notre collecte par les « trois-tiers » : un tiers sur nos fonds en euros, un tiers sur des unités de compte traditionnelles et liquides et un tiers sur des solutions alternatives (actifs réels, produits structurés, fonds croissance). Nous poursuivons notre stratégie d’élargissement des supports en UC, notamment sur la partie des actifs réels, tout en assurant la conformité de cette offre avec Value for Money. H. A. : Par ailleurs, nous estimons que le mouvement de consolidation du marché des CGP est sain. Ces entités sont aujourd’hui traitées chez nous comme des grands comptes et nous avons dû nous adapter à leur modèle. Parallèlement, de plus en plus de cabinets se créent, avec une approche toujours plus professionnalisée. Il est clair qu’avec de tels mouvements, le marché des CGP est promis à un bel avenir.Justement, les actifs non cotés ont-ils trouvé leur public ?C. F. : Nous avons développé notre offre d’actifs réels et modernisé notre fonds croissance dès le lendemain de la promulgation de la loi Pacte. Les actifs non cotés sont appréciés, notamment notre fonds d’infrastructures qui approche les 800 millions d’euros d’encours, mais aussi notre fonds de Private Equity qui atteint près de 300 millions d’euros d’encours. Nous prévoyons prochainement d’enrichir notre gamme avec un fonds de dette privée immobilière avec Generali Real Estate et un fonds de dette privée avec Lumyna. D’autres solutions d’investissement gérées par des sociétés externes au groupe vont également venir compléter notre offre. H. A. : La loi industrie verte va nous aider à encore plus orienter les clients vers ce type de support. Nous ne sommes qu’au début du développement des actifs privés dans le patrimoine des Français.Vous êtes aussi un précurseur sur le fonds en eurocroissance…H. A. : Nous avons toujours cru en ce support en lançant notre premier fonds croissance en 2014, et nous y croyons toujours, même s’il est vrai qu’il a plus d’intérêt en période de taux bas. La loi Pacte a permis de simplifier ce produit en permettant d’afficher une seule valeur liquidative. Le fonds croissance doit faire partie de la palette des produits proposés par les CGP. Chez Generali, la promesse d’offrir un surplus de performance se traduit avec des performances au rendez-vous pour G Croissance 2020 (+ 3,67 % en 2023).Qu’en est-il pour la pierre-papier ?C. F. : Depuis plus d’un an, ce marché s’est retourné, avec notamment un désamour profond pour les fonds investis sur le marché des bureaux. Nous notons toutefois un intérêt des investisseurs pour les produits thématiques ou lancés récemment. Néanmoins, la collecte est globalement en forte baisse sur les SCPI et SC. La question reste de savoir si nous sommes arrivés au point bas du marché. Nul ne le sait, mais toujours est-il qu’une diversification dans l’immobilier fait toujours sens dans une allocation globale. Notre vocation reste de pouvoir offrir toute la palette de solutions aux épargnants et la diversifier.Un mot sur le développement de Generali Wealth Solutions (GWS), votre filiale lancée il y a bientôt quatre ans ?H. A. : C’est justement dans cet objectif d’insuffler une forte culture d’UC – aussi bien pour notre distribution propre que pour la distribution intermédiée – que nous avions créé cette filiale de gestion de portefeuille patrimoniale présidée par Alessandra Gaudio. Elle propose des solutions d’investissement déléguées en architecture ouverte (gestion pilotée, gestion sous mandat, fonds dédiés), la conception de produits structurés, la sélection d’unités de compte, mais aussi des services d’ingénierie patrimoniale. Elle gère aujourd’hui autour de 1,8 milliard d’euros d’encours portés à la fois par le développement des réseaux internes (réseau salarié et agents généraux), mais aussi auprès des partenaires externes (CGPI et FinTechs), qui apprécient l’expertise et l’accompagnement des équipes.Des évolutions du côté de vos services digitaux ?C. F. : Sur le plan du digital, nous sommes en train de réaliser une refonte de notre outil Nomineo, pour le moderniser et continuer à apporter de nouveaux services. Notre volonté est d’accompagner la dynamique du marché avec comme objectif d’être les leaders dans la satisfaction de nos partenaires et de nos clients. Nous avons plus de vingt années d’expérience dans ce domaine. Aujourd’hui, il ne s’agit pas d’innover pour innover, mais de pouvoir gérer de façon dématérialisée des problématiques complexes, de proposer un outil ergonomique et fiable, ce qui nécessite d’investir en continu.