APICIL AM - Au feu les pompiers

12/04/2023 - source : Patrimoine 24

« Il y a des décennies où rien ne se passe, et il y a des semaines où des décennies se produisent » disait Lénine. Les semaines que nous venons de passer ne s’y prêtent pas à ce point, mais avec une autre échelle temporelle le parallèle est pertinent, puisque nous ne parlerons pas (ou peu !) banques centrales / inflation / récession. Remarquez, il est presque ironique de citer un révolutionnaire communiste russe pour commencer une lettre sur les marchés financiers.

Le mois de mars aura été marqué par des turbulences sur la planète bancaire. Le spectre de 2008 étant dans les esprits de tous les investisseurs, et surtout des banquiers centraux, les corrections et interventions ne se sont pas fait attendre. Quelques rappels s’imposent bien que la presse nous a suffisamment alimenté sur la chute de la Silicon Valley Bank (SVB), Signature Bank, ainsi que le rachat (sauvetage ?) de Crédit Suisse. Pourtant les phénomènes sont différents.

Il est d’abord évident que la stabilité de l’écosystème repose exclusivement sur la confiance. Confiance des épargnants en la capacité de leur banque à leur retourner leurs dépôts sur demande. Pour SVB, c’est une crise de liquidité à laquelle a dû faire face la banque. Ne pouvant satisfaire les demandes de retraits massifs de nombreux clients au profil composé du triptyque Tech-Blockchain-Startup (combo gagnant pour lever des fonds il n’y pas si longtemps), la banque spécialisée du domaine doit liquider à perte une partie de son portefeuille obligataire, lourdement dévalorisé par la remontée brutale des taux. La chute, sans jeux de mots, on la connaît. Les institutions fédérales FED, Trésor américain, et FDIC tentent de contenir l’hémorragie. Bilan des courses, la réserve fédérale débloque 350 Md$ de liquidités à travers différents guichets en une semaine (collatéralisé en partie).

Une semaine plus tard, c’est au tour de Crédit Suisse de voir ses dépôts fondre, accentué par la pression des réseaux sociaux, agissant comme une caisse de résonance, et attaqué de toutes parts sur les marchés (actions, primes de défaut…). Crédit Suisse est la brebis galeuse du troupeau des banques qualifiées comme systémiques. Polémiques autour du management, résultats financiers hasardeux, blanchiments, défaillances de contrôles, mauvais choix stratégiques… Les raisons, valables ou non, ne manquaient pas pour s’attaquer à la banque au logo ailé. C’est finalement la mauvaise communication de son actionnaire, la Banque National Saoudienne, qui ne souhaitant pas remettre la main au pot, a déclenché les hostilités. Son président a depuis été débarqué (a démissionné pardon). La banque suisse sera finalement rachetée par son principal concurrent UBS, au prix de 76 cts de CHF l’action pendant le week-end (quasi 3 fois moins que le cours de clôture). On parlera de crise de solvabilité, et de confiance encore, pour cette semaine noire ayant achevé 167 années d’existence... Depuis, les esprits se sont échauffés sur les cours de Deutsche Bank, en vain. L’action de la banque allemande est revenue au point de départ. Les flux massifs, le fameux « bank run », se stabilisent la dernière semaine du mois, avec des sorties de dépôts qui s’établissent à 1 Md$, contre 185 Md$ la semaine précédente, aux profits des plus grandes banques et fonds monétaires.

Il est évident que le cycle quasi sans précédent de hausse des taux que nous vivons (quasi sans précédent puisqu’il faut remonter au début des années 80 sous l’ère Volcker pour battre ce « record »), ne se fera pas sans conséquences majeures. L’impact du resserrement monétaire, sur les conditions de financement et sur l’économie réelle, surgit comme la face cachée de l’iceberg.

Un mois qui a été donc consacré aux événements micro-économiques, permettant de redécouvrir les règles prudentielles de Bâle III et la composition du bilan des banques. Les indicateurs économiques, faisant habituellement la pluie et le beau temps sur les marchés, ont été relayés au second plan. Nous retiendrons la publication des PMI globalement bons en Zone euro, mais contrastés dans le détail (le PMI manufacturier demeure en zone de contraction à 47.1). L’inflation « cœur » continue son petit bonhomme de chemin et ressort à 5.7% en mars (+0.1%), mis à mal par les prix alimentaires notamment. La FED et la BCE ont effectivement remonté leurs taux de 25 et 50 bps, respectivement. Les conditions de crédit se resserrent naturellement à l’issue des récents événements. L’espoir que le taux pivot soit imminent, et de voir les banquiers centraux en faire moins, est ravivé.

 

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