En une dizaine d’années, Agripower est devenu l’un des acteurs majeurs de la méthanisation en milieu agricole. Désormais cotée, la société a bénéficié du soutien de Vatel Capital à chacune des étapes de son développement.
En 2012, Eric Lecoq fondait Agripower, une société spécialisée dans la méthanisation individuelle et collective en milieu agricole, soutenue à plusieurs reprises dans son développement par Vatel Capital. Introduite en Bourse en 2019, il en a quitté la direction générale, il y a plus de deux ans, puis la présidence en fin d’année dernière.
Adapter l’offre au marché français
Lorsqu’il crée Agripower à Carquefou, près de Nantes, Eric Lecoq part d’une feuille blanche. Auparavant, il avait déjà opéré dans le domaine des énergies renouvelables, notamment le solaire thermique et le photovoltaïque. Accompagné de trois anciens collaborateurs, cet ingénieur physicien de formation décide de se lancer « alors que l’aventure du photovoltaïque français tourne au drame », note Eric Lecoq. Durant deux ans, il construit son projet, s’approprie les méandres administratifs et apporte les réponses techniques à ses projets de méthanisation en compagnie de Weltec Biopower.
« Lors de notre création, poursuit-il, la méthanisation était surtout développée en Allemagne qui avait dix ans d’avance sur la France. Néanmoins, la matière première entrante était différente (lisier et fumier de ferme). Plus fibreuse en France, il fallait trouver la solution pour mieux l’incorporer. Autre aspect, le biogaz produit est très agressif (teneur en H2S) : il nous a donc fallu réaliser des unités en inox plutôt qu’en béton. En partant de zéro et avec peu de moyens, j’ai dû travailler en synergie avec le monde agricole, en particulier les coopératives (comme Triskalia ou Agrial) avec lesquelles un modèle gagnant-gagnant a été mis en place. Avoir peu de moyens nécessite de pousser l’imaginaire et de savoir bien utiliser chaque euro dépensé. »
Parallèlement, il décide alors de se lancer sur les unités individuelles de méthanisation de petites tailles pour un cheptel entre cent et deux cents bovins, en multipliant leur commercialisation afin de s’assurer une base d’activité pérenne. Les solutions sont alors packagées pour réduire les coûts et temps d’installation, mais aussi les opérations de maintenance.
Multiplier les petites unités
Parallèlement, il participe également à la création de grosses structures collectives qui lui permettent de démontrer son savoir-faire de fabrication d’unité et sur différents intrants (pour une production de 250 kW à 2 MW). « En nous concentrant sur la vente de petites unités, cela nous permettait d’éviter de travailler sur les gros dossiers qui ne se font finalement pas, mais aussi de nous concentrer sur quelques projets très techniques », précise Eric Lecoq.
Les ventes de petites unités progressent lentement, au rythme d’une par mois, puis s’accélèrent pour atteindre une toutes les semaines jusqu’à plusieurs chaque semaine. Progressivement, l’entrepreneur fait son trou, y compris auprès des autres parties prenantes de ses projets que sont les banquiers et assureurs de ses clients.
Outre le monde agricole, Agripower s’adresse également à l’industrie pour la transformation des biodéchets. « Le traitement de leurs déchets est un centre de coûts pour eux ; nous l’avons transformé en matière première : aussi bien du gaz, de l’électricité que du CO2 utile qu’ils réutilisent. »
Un accompagnement en continu
Rapidement, il sollicite Vatel Capital et la BPI. Il explique : « Je n’avais pas de grands moyens financiers et lorsqu’on débute, il est difficile d’être suivi par les banques. La BPI et Vatel Capital, que je connaissais de mes précédentes expériences professionnelles, m’ont permis d’amorcer mon projet. L’accompagnement en Private Equity est fondamental pour que des aventures entrepreneuriales comme Agripower puissent voir le jour. Et cette valeur ajoutée n’est pas que financière ».
Un premier financement, via une ligne d’obligations convertibles pour un montant de 150 000 euros est ficelé. Deux années plus tard, une seconde ligne, pour un même montant, est mise en place.
En 2016 et 2018, deux financements obligataires purs ont été souscrits via la plate-forme de Crowdfunding Vatel Direct. Quant à Vatel Capital, elle s’est également positionnée en tant que garante lors de l’introduction en Bourse de la société en 2019 qui lui a permis de lever 16 millions d’euros. « Aujourd’hui, il ne reste qu’une fin de ligne obligataire à rembourser », précise Eric Lecoq.
Il poursuit : « Je connaissais Vatel Capital de mes précédentes expériences et les ai informés de mon projet dès le début. Ces dirigeants sont très accessibles – le président de Vatel a été mon interlocuteur principal –, et les équipes qu’ils ont recrutées sont à leur image. Ils connaissent les entreprises et les entrepreneurs avec leurs ambitions, les doutes et les besoins qui les escortent au quotidien. Cette compétence et cette proximité offrent un cycle décisionnel court et une aide qui n’est pas que financière. Sans être intrusifs, ils ont su m’apporter leur soutien dans les périodes difficiles, mais aussi permis de gérer la périlleuse phase d’hyper-croissance que nous avons connue. Au-delà du pacte d’actionnaires et échéances à respecter, entre un entrepreneur et son financier, les choses se bâtissent avec confiance : se dire les choses constitue la première pour surmonter les difficultés. »
Matthieu Lambert, directeur général délégué de Vatel Capital, expose pour sa part : « Chez Vatel, nous avons su créer des expertises dans certains domaines, comme la santé, le tourisme, mais aussi les énergies renouvelables. Le chemin parcouru avec Agripower nous a ouvert la porte du monde agricole, où existe une barrière à l’entrée à la fois culturelle et administrative. Désormais intégré à cet univers, cela nous a permis de réfléchir plus globalement sur cet environnement pour, demain, lancer de nouvelles offres d’investissement. Le cas d’Agripower est révélateur de notre savoir-faire qui repose sur trois points : accompagner des entrepreneurs sur le long terme, dans un secteur que nous connaissons et toujours de façon minoritaire, le plus souvent en quasi-fonds propres, ce qui est le plus vertueux pour l’investisseur final. Nous n’avons décidé d’accompagner Eric dès sa première levée de fonds car nous connaissions ses qualités d’entrepreneur pour respecter le business plan qu’il avait défini ».
Cap sur l’Europe
Aujourd’hui, c’est plus d’une centaine d’unités qui fonctionnent dans l’Hexagone. La technologie est devenue mature et l’avenir s’oriente vers l’hydrogène vert. Agripower poursuit sa croissance, au-delà de nos frontières. Selon son fondateur, cette IPO apporte de la crédibilité vis-à-vis des clients et permet d’attirer des talents. « J’ai su être le dirigeant qui a permis à la société de se développer en France et qui a permis de prouver la pertinence du modèle. J’ai considéré que je n’étais plus celui qu’il fallait pour porter son développement à l’international », conclut Eric Lecoq, aujourd’hui membre du conseil d’administration. l
Procédés et vertus de la méthanisation
La méthanisation est une technologie basée sur la dégradation par des micro-organismes de la matière organique animale ou végétale (les intrants), en conditions contrôlées et en l’absence d’oxygène (réaction en milieu anaérobie). Une partie de la matière organique est dégradée en biogaz, principalement du méthane.
La méthanisation permet de valoriser des déchets issus des exploitations agricoles (effluents d’élevage, résidus de cultures, cultures intermédiaires…), des collectivités (déchets verts ,déchets de cuisine et restauration collective, déchets d’assainissement…) et des industries agroalimentaires (graisses végétales ou animales, laiterie, caves vinicoles…). Les intrants sont triés, brassés et chauffés pendant quelques semaines dans un digesteur (enceinte privée d’oxygène). Cette dégradation aboutit à la production d’un produit humide riche en matière organique partiellement stabilisée, le digestat, généralement envisagé pour un retour au sol après séparation de phases, et de biogaz, mélange gazeux saturé en eau à la sortie du digesteur et composé d’environ 50 à 65 % de méthane, de 20 à 50 % de gaz carbonique et de quelques gaz traces.
Le biogaz ainsi produit par la fermentation pourra être valorisé après transformation en biométhane carburant ou gaz naturel après épuration, odorisation et injection dans le réseau ; en production électrique ou chaleur par cogénérationn puis injection dans le réseau ou pour augmenter l’autonomie de l’exploitation par la production de chaleur après combustion.
Source : www.agripower-france.com