Le désamour des investisseurs pour les bureaux profite aux classes d’actifs alternatives. Avec leurs rendements élevés et leur stratégie opportuniste, ciblée sur des micromarchés porteurs, elles viennent doper la performance d’un portefeuille sur un marché de l’immobilier atone. Sous réserve d’une gestion proactive et d’une vigilance accrue…
Une année noire pour la pierre. Le volume global d’investissement en immobilier d’entreprise en France a reculé de 51 % en 2023, s’élevant à 14,3 milliards d’euros, contre 29,4 milliards en 2022 et une moyenne décennale de 29,2 milliards. « Ces chiffres en forte baisse sont le fruit de trois facteurs convergents. D’abord, de l’attentisme des investisseurs face au réajustement des prix et nos analyses montrent que, pour l’heure, nous avons parcouru l’essentiel du chemin sur la catégorie core mais pas encore sur les actifs secondaires et obsolètes. Ensuite, du retour en force des obligations qui, après une rapide correction de valeurs, font de la concurrence à l’immobilier. Enfin, d’une surallocation de l’immobilier dans les portefeuilles des investisseurs institutionnels qu’ils cherchent, pour l’instant, à alléger», analyse Christian de Kerangal, directeur général de l’Institut de l’épargne immobilière et foncière (Ieif).Ainsi, depuis 2020, la part des bureaux dans l’investissement ne cesse de baisser, passant de 66 % en 2020 à 45 % en 2023, principalement en Ile-de-France, où ils régressent de 57 % en 2020 à 33 % en 2023. « La France est le pays européen qui investissait le plus dans les bureaux, accompagnant ainsi la tertiarisation de l’économie. Depuis la crise sanitaire, l’avenir des actifs situés en périphérie, devenus moins attractifs avec la montée en puissance du télétravail et le ralentissement de la croissance de la population active, est questionné. Un grand nombre de bureaux font l’objet d’un ajustement de prix », explique le directeur.
Conséquences d’un marché chahutéLe désengagement des investisseurs sur le bureau profite aux classes d’actifs alternatives (logistique, santé, hôtellerie). Ainsi, la part de la logistique et des locaux d’activités augmente sensiblement depuis 2018, avec une accélération à partir de 2021, soit 8 % en moyenne entre 2014 et 2017, 14 % en moyenne entre 2018 et 2020 et 23 % en moyenne entre 2021 et 2023. De même, la part de l’hôtellerie et du tourisme bondit en 2023, atteignant les 14 %, contre 5 % en moyenne entre 2017 et 2021. A la marge, la croissance de la part des commerces de périphérie (retail parks, zones d’activités commerciales) est passée de 4 % en moyenne, entre 2014 et 2020, à 8 % en 2022 et 2023. Enfin, si l’investissement des investisseurs institutionnels en résidentiel, qui s’est élevé à 2,8 milliards d’euros en 2023, dévisse de 52 % par rapport à 2022 (à 5,7 milliards), les volumes investis en résidences gérées et coliving n’ont, quant à eux, reculé que de 16 %, à 1,1 milliard d’euros.Ne représentant encore qu’une petite part des investissements, les actifs alternatifs devraient continuer à s’accroître dans les mois et années à venir. « Si les investisseurs institutionnels conservent des allocations immobilières à hauteur de 5 % à 6 % de leur portefeuille – et rien ne pousse à envisager le contraire –, ces fonds seront fléchés de façon plus diversifiée, y compris les marchés de niche porteurs de valeur et de croissance », assure Christian de Kerangal, qui anticipe un rééquilibre des allocations en bureaux de 60 à 40 % d’ici dix ans, dont une bonne part sera toutefois redirigée vers le résidentiel, et notamment, les actifs gérés.
Bien choisir sa SCPISur le marché de la pierre-papier qui enregistre 7,7 milliards d’euros de collecte brute (5,7 milliards de collecte nette) en 2023, le report des investissements en bureaux vers d’autres classes d’actifs plus performantes s’observe aussi. Les SCPI diversifiées, santé et éducation, et logistique et locaux d’activité représentent près des trois-quarts de la collecte brute du quatrième trimestre 2023 (1,24 milliard d’euros), tandis que la part des SCPI bureaux diminue à 20 %, contre 33 % pour l’ensemble de l’année. Les taux de distribution des SCPI à prépondérance logistique et locaux d’activité s’élèvent à 5,9 %, contre 4,1 % pour les SCPI à prépondérance bureaux. Les SCPI santé Pierval Santé (Euryale AM) et Primovie (Primonial REIM), et la SCPI logistique et locaux d’activité Activimmo (Alderan) figurent parmi les véhicules qui ont le plus collecté en 2023, dans un contexte de corrections des valeurs et de décollecte massive.La part de la SCPI Primovie a ainsi été dévaluée de 8,9 % en février dernier, sur la base des valeurs d’expertise du 31 décembre 2023.Une aubaine pour les investisseurs opportunistes, selon Stéphane van Huffel, fondateur de Net-investissement. « Les véhicules historiques soumis à la décote sont à regarder aujourd’hui. Ils démontrent la réactivité des sociétés de gestion pour remplir leurs objectifs de distribution, au profit des épargnants. Ces corrections de valeur ont permis de nettoyer les portefeuilles et offrent des conditions d’entrée attractives aux nouveaux porteurs de parts », assure-t-il, convaincu de la profondeur du marché de la santé auquel ces SCPI viennent ajouter des domaines connexes, tels que la petite enfance et l’éducation. Pour ce dernier, le « portefeuille idéal » se compose aujourd’hui d’un ou deux grands véhicules, complétés par un bouquet de petites SCPI agiles, positionnées sur des classes d’actifs alternatives, porteuses de rendement. « Les actifs alternatifs sont de bons éléments de diversification », confirme-t-il.Reste à bien cibler ces marchés de niche qui nécessite l’expertise de spécialistes, à l’image de l’hôtellerie ou de la logistique qui évolue de plus en plus vers les data centers et les bâtiments industriels. Des perspectives prometteuses, mais qui requièrent de nouvelles approches et une gestion proactive des portefeuilles.
Intérêt pour la logistiqueClasse d’actifs historiquement alternative, représentant environ 10 % des volumes investis en immobilier, la logistique occupe une part de plus en plus importante dans les portefeuilles. « Sur la moyenne des cinq dernières années, les actifs logistiques et locaux d’activité ont capté 20 % des investissements en France et 30 % en Europe. Nous sommes en retard par rapport au reste du monde », affirme François Le Levier, directeur logistique chez CBRE.Selon la dernière étude mondiale publiée par le cabinet de conseil en immobilier d’entreprise, l’actif logistique est privilégié par les mille plus grands investisseurs du monde en 2024. Signe de l’intérêt croissant pour ce marché. En conséquence, la demande a fait s’envoler les prix et s’effondrer les taux de rendement, avec une prime de risque inférieure au coût de l’argent, écrasée par l’inflation. Après une rapide correction des valeurs, faisant passer le taux de rendement prime de 3,20 % en 2021 à 4,75 % en 2024, le marché s’est stabilisé en valeur avec une demande supérieure à l’offre. A noter, la vente pour 200 millions d’euros du portefeuille Olympe, comprenant six plates-formes logistiques de classe A, à Axa IM Alts par Virtuo Industrial Property.Si la demande placée, s’élevant à 3,6 millions de mètres carrés en 2023, a légèrement baissé (la moyenne historique à dix ans dépasse les quatre millions) sous l’effet du recul de la consommation des ménages, les perspectives de développement sont nombreuses : la rareté du foncier et de l’offre neuve qui va s’accentuer avec la loi zéro artificialisation nette (ZAN) du 20 juillet 2023 et la moindre délivrance des autorisations ICPE (installations classées protection de l’environnement), la progression du e-commerce, mais également, la stratégie de réindustrialisation de la France qui nécessite l’achat et l’exploitation de locaux semi-industriels, ou encore, la logistique urbaine et les data centers. Des tendances de fond et conjoncturelles qui soutiendront les rendements et loyers des actifs logistiques.
Retour des investisseursMalgré ses fondamentaux solides, le secteur n’a pas échappé au retournement du marché immobilier et à la baisse des investissements, en retrait de 60 à 70 % sur la logistique en 2023, face à la hausse des taux d’intérêt, désormais fixés à 4 %. Alors que la Banque centrale européenne (BCE) vient d’annoncer une «probable»première baisse des taux d’intérêt en juin et un « processus de désinflation » en cours, les investisseurs reviennent sur le marché. Pour Vincent Sadé, directeur du Capital Deployment de Prologis France, c’est le moment d’acheter. « Le retour des acheteurs d’actifs core+, voire core, attirés par des taux prime pouvant atteindre les 5 %-5,25 %, va redonner du dynamisme au marché et tirer les prix vers le haut », assure-t-il, observant, déjà, une reprise anticipée des opérations sur les grands volumes, entre 100 et 150 millions d’euros. Ce dernier est convaincu que la valeur des actifs logistiques continuera à s’apprécier… A condition d’acheter à un taux raisonnable et que ces bâtiments aient un potentiel de réversion locative. De la logistique urbaine en région parisienne aux entrepôts XXL, Prologis déploie une stratégie d’acquisition large, ciblant à la fois les bâtiments existants et de nouvelles réserves foncières pour construire des entrepôts. Fin 2022, l’entreprise a déboursé 1,585 milliard d’euros pour s’offrir le portefeuille Crossbay, soit 1,1 million de mètres carrés (dont deux cent mille en France), répartis sur cent vingt-huit bâtiments de logistique urbaine et six nouveaux projets situés dans sept pays européens. Face à la raréfaction du foncier, Prologis a fait de la logistique à étages un enjeu d’avenir et un axe de développement majeur dans les mégalopoles mondiales.
Enjeu de réindustrialisationProfitant d’un momentum à l’investissement particulièrement attractif, la SCPI Log In de Theoreim a délivré un taux de distribution brut de 6,21 % en 2023, pour un montant de capitalisation atteignant près de 108 millions d’euros, au 31 décembre dernier, et une valeur de reconstitution qui s’est appréciée de 2,80 %. « Nous avons très bien collecté sur notre SCPI, en achetant lorsque les prix étaient déjà corrigés et les taux de rendement significativement relevés », se réjouit Gaëlla Hellegouarch, présidente de Theoreim. En 2024, la SCPI prévoit de collecter 100 millions d’euros, de conserver son taux de distribution cible de 6,20 % et de déployer des capitaux en Allemagne, au Royaume-Uni, en Espagne, au Portugal et en Irlande. « Si la logistique bénéficie d’une très forte dynamique c’est parce qu’elle est accompagnée par une volonté européenne de réindustrialisation », affirme la présidente.Tandis que la délocalisation devient moins avantageuse financièrement, 74 %, des entreprises se déclarent prêtes à rapatrier leur site de production en France ou en Europe et limiter les distances entre les lieux de fabrication, de stockage et de livraison. Une restructuration de la chaîne logistique qui passe par le développement d’actifs ou la réhabilitation de friches industrielles. En outre, les bâtiments industriels et logistiques sont moins gourmands en énergie et moins coûteux à « verdir » que les bureaux, et offrent des surfaces adaptées à l’installation de panneaux solaires ou de bornes électriques : un argument écologique qui pèse pour les investisseurs engagés dans une démarche RSE (responsabilité sociétale des entreprises).
Renouveau de l’hôtellerie… et du plein-airContre-réaction au Covid, le « revenge travel » s’installe dans la durée, profitant pleinement au secteur du tourisme. A fin 2023, le taux d’occupation atteignait 67,7 %, le prix moyen des chambres 119,90 euros, et le RevPar (revenu par chambre disponible) 81,20 euros, en hausse de 15,6 % sur un an.Les volumes investis sur le marché en 2023 s’élèvent à près de 2,5 milliards d’euros, portés par de belles transactions, telles que la cession du Palace des Neiges, à Courchevel, vendu à La Société des bains de mer, et le Novotel Lyon Confluence racheté par le groupe Castellet Hospitality. Le rachat par Atland Voisin du portefeuille Tohapi confirme l’appétit croissant des investisseurs pour l’hôtellerie de plein air. Le premier trimestre 2024 s’inscrit dans cette tendance, avec 900 millions d’euros de transactions en cours de finalisation recensées par CBRE.Selon Sami Mendil, directeur investissement hôtels chez CBRE, 2024 est marquée par la création de fonds dédiés à l’hôtellerie et l’arrivée d’acteurs du Private Equity, intéressés aussi bien par les murs que par le fonds de commerce de ces actifs, surtout lorsqu’ils sont exploités par des jeunes pousses de l’industrie hôtelière, à l’image de Paris Society ou The Experimental Cocktail Group. En 2023, l’hôtellerie a représenté 14 % des investissements immobiliers, contre 6 à 8 % les autres années, affichant un taux de rendement moyen entre 6 et 7 %. Cet engouement repose aussi sur une motivation fiscale, comme le rappelle Laura Ben-Ibgui, responsable des transactions hôtelières chez JLL : « Le régime de faveur fiscal du remploi de l’article 150-0 B ter du CGI, permettant de bénéficier d’un report d’imposition de la plus-value mobilière en réalisant un apport-cession de titres dans une holding, a rendu attractif l’investissement hôtelier ». En outre, la dimension «statuaire»de ces placements, en particulier dans l’hôtellerie de luxe, séduit de nombreux investisseurs.
L’impact des JO 2024Portée par les performances remarquables du tourisme, la SCPI Atream Hôtels a enregistré une activité record en France en 2023. Le véhicule a maintenu le prix de sa part et a affiché un taux de distribution de 5,30 %, en hausse de 0,26 % comparé à 2022. Il vise une collecte de 50 millions d’euros, d’ici décembre.Pascal Savary, président d’Atream, anticipe une très bonne année 2024, au regard des prévisions de réservation pour l’été. Un dynamisme qui devrait perdurer jusqu’en 2025 : « dans un environnement économique et géopolitique anxiogène, les Européens ont besoin de vacances et de bulles de décompression », soutient-il, rappelant que l’industrie du tourisme en France représente plus de 250 milliards d’euros de chiffre d’affaires par an et plus de 2,5 millions d’emplois non délocalisables sur le territoire.A ces fondamentaux s’ajoute l’effet catalyseur des jeux Olympiques de Paris qui va impacter le marché dans les mois et les années à venir, et attirer une clientèle touristique internationale, accroissant d’autant la fréquentation des établissements hôteliers.Un défi à relever pour les exploitants. « L’offre devra être à la hauteur des attentes. Les prix ne pourront pas monter au ciel et en contrepartie de ces hausses, les établissements doivent améliorer la qualité des services et des prestations proposées », ajoute Pascal Savary qui se montre très sélectif dans sa stratégie d’acquisition.Après avoir cédé son premier actif en 2023, l’hôtel Mercure de Niort, la SCPI Atream Hôtels devrait enrichir son portefeuille de trois nouveaux établissements (deux en Allemagne et un en France) en 2024.
2024 : une année de normalisation ?Profitant de la bonne santé du tourisme, le marché des appart-hôtels se porte bien. En 2023, le groupe Adagio annonce 20 % de croissance avec 1,7 million de clients accueillis dans les cent-trente appart-hôtels de son réseau.2024 sera, selon Xavier Desaulles, CEO d’Adagio, une année de normalisation et de rééquilibrage entre la clientèle loisirs, qui représente désormais 60 % des réservations, notamment en haute saison, et des voyageurs d’affaires qui reviennent avec la programmation des salons professionnels, tout au long de l’année. « Nous devons être en mesure de tenir notre promesse d’une offre de moyen-long séjours à notre clientèle d’affaires », affirme le CEO qui prévoit de réserver des hébergements pour ses clients fidèles, au sein de son réseau, même au plus fort des grands événements sportifs et culturels de cette année.Adagio a lancé un plan de rénovation de ses sites, sur cinq ans, visant à améliorer l’expérience client et valoriser ses tarifs. Le réseau, qui a ouvert cinq nouveaux établissements (à Toulouse, Lyon, Montpellier, Gans et Anvers) en 2023, parie, en outre, sur la complémentarité avec la marque Accor et ses hôtels Ibis, Novotel ou Mercure. « Nous proposons à nos investisseurs la meilleure combinaison possible pour rentabiliser le bâti au mètre carré en, mutualisant l’accueil et les services tout en diversifiant les risques », explique Xavier Desaulles. Le groupe lorgne l’international en 2024, avec l’ouverture d’un combo Novotel-Adagio à Abidjan, en Côte d’Ivoire, ainsi qu’un flagship de son concept de coliving dans le quartier Whitechapel, à Londres.
Opportunités en immobilier de santéSoutenu par la démographie, les besoins d’une population vieillissante en matière de soins et santé, ainsi que par la diminution des financements publics, l’immobilier de santé reste un marché convoité, même si, là aussi, les volumes investis ont baissé en 2023. « La hausse des taux, qui impacte les rendements, tout comme les attaques qui ont visé les groupes Orpea et Korian ont freiné les investisseurs dont une partie se détourne des Ehpad au profit des cliniques et des maisons de santé », constate Florence Semelin, directrice investissement résidentiel et actifs gérés chez JLL.L’engouement pour les résidences seniors tend à décroître également, face à des taux d’occupation moins élevés qu’attendus, notamment en région Ile-de-France. La baisse de la concurrence sur le marché de la santé offre aux investisseurs de belles opportunités. « Le ralentissement du secteur permet d’aller chercher des produits médicalisés à des taux de rendements pouvant dépasser les 7 % », confirme Frédéric Delleaux, Founding Partner de Lifento.La société a investi 400 millions d’euros en cinq ans dans une trentaine d’actifs de santé situés en France, en Allemagne, en Italie et au Portugal. En Italie, elle vient de lancer, à Castelfiorentino, au cœur de la Toscane, la construction d’un Ehpad de 7 760 m2, proposant cent-soixante lits. « Il est important d’adapter le parc immobilier aux nouvelles technologies et façons de soigner », ajoute l’associé. Lifento finance également des projets immobiliers mixtes d’avenir, les « hospitels », hôtels hospitaliers, comme celui d’Amiens qui accueille les patients avant ou après leur séjour à l’hôpital, leurs familles, mais aussi les chercheurs, médecins et professionnels en lien avec l’hôpital.
Construire l’hôpital du futurAvec la SCPI Pierval Santé, véhicule qui a le plus collecté en 2023, avec 417,6 millions d’euros de capitaux (3,2 milliards de capitalisation), soit 5,47 % du total de la collecte brute des SCPI l’an dernier, Euryale poursuit les investissements dans la médecine du futur.La SCPI a acheté trente nouveaux actifs en 2023 et huit établissements acquis en Vefa lui ont été livrés au dernier trimestre. La société de gestion vient, par ailleurs, de signer un partenariat stratégique avec le groupe Elsan, leader de l’hospitalisation privée en France. Cet accord prévoit la construction d’un hôpital (l’hôpital privé de Moselle) de 33 000 m2, qui devrait voir le jour au troisième trimestre 2026, pour un investissement global de 150 millions d’euros. « Nous voulons aller au-devant des besoins des patients, et anticiper l’évolution du marché et des équipements de santé à travers des projets de développements immobiliers, tels que cet hôpital du futur », explique Thierry Scheur, directeur général opérationnel d’Euryale Services.Au 31 décembre 2023, Pierval Santé détenait deux-cent-cinquante-six actifs, répartis dans huit pays européens, mais également au Canada, où Euryale a réalisé un premier investissement de 20 millions d’euros dans la résidence Les Ecluses Saint-Lambert sur la rive sud de Montréal. Axé sur le concept de « résident-partenaire », cet hébergement médicalisé de deux-cent-cinq lits est exploité par le groupe Excelsoins, pour un bail de vingt-cinq ans ferme.Une source d’inspiration pour Euryale, qui n’exclut pas de contribuer à importer en France des concepts basés sur les modèles de soins les plus avancés, éprouvés dans d’autres pays, et qui renouvelle et modernise l’offre de santé existante.
Options de diversificationPour sa SCPI Foncière des Praticiens, Foncière Magellan cible les petits actifs identifiés dans les territoires qui vont accueillir les praticiens (maisons de santé, cabinets médicaux, laboratoires, cliniques), ainsi que les activités périphériques autour de l’hôpital. Une mixité des usages qui stabilise les revenus locatifs de la SCPI. Dans une optique de diversification, le véhicule investit aussi dans les structures de soins de suite et réadaptation (SSR), les centres de remise en forme et les laboratoires de production de médicaments.Pour 2024, Foncière Magellan se veut optimiste sur le maintien de la collecte et vise les 300 millions d’euros de capitalisation, pour un rendement à long terme supérieur à 5,10 %. « Tous les voyants du marché de la santé sont au vert pour poursuivre la densification de notre maillage en France et en Belgique », annonce Guillaume Hilaire, directeur du développement de Foncière Magellan. Aux commandes de la SCPI Cristal Life, dont la capitalisation s’élève à 107,81 millions d’euros en 2023, la société Inter Gestion REIM s’est forgée une conviction sur une approche quotidienne de la consommation de soins. « Nous sélectionnons nos actifs selon un double impératif de proximité et de solidité des modèles économiques, avec deux objectifs : créer de la valeur à long terme et délivrer de la performance stable », indique Franck Inghels, directeur de la distribution d’Inter Gestion REIM. La SCPI vient d’acquérir un regroupement de cabinets de chirurgiens-dentistes dans le centre-ville de Caen, pour un taux de rendement acte en mains de +7 %, un laboratoire d’analyses médicales à Lille, sous l’enseigne Biolam, à un taux de 6,98 %, et une micro-crèche à Reims, à un taux de +7 %.
Nouvel appétit pour le colivingMicromarché de la classe d’actifs résidentielle, le coliving a capté 428 millions d’euros d’investissements en 2023. Les principales transactions qui ont rythmé l’année ont été l’acquisition d’une résidence d’habitat partagé XXL en restructuration, près de Genève, dans la commune française d’Archamps (Haute-Savoie), par Uxco Group pour 90 millions d’euros, l’achat d’une résidence de 12 775 m2, à Courbevoie (Hauts-de-Seine), auprès d’Emerige par le groupe Kley, ou encore l’acquisition en Vefa par Ares Management d’une résidence exploitée par la marque Nomo (Nomad & Modern), développée par Bouygues Immobilier à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), pour 65 millions d’euros.Pour Nathan Zappelli, directeur général de la plate-forme Wally, les rendements annuels générés par les actifs de coliving, de 6 à 9 %, aiguisent l’appétit des investisseurs. D’autant que le modèle a su évoluer. « D’abord réservé aux jeunes actifs, ce mode d’habitat s’adapte à tous les cycles de vie, de vingt à quatre-vingt-dix ans, avec des offres ciblant les publics seniors, les célibataires ou les familles monoparentales », constate-t-il.Pour ouvrir ce marché détenu à 95 % par des institutionnels aux particuliers, la plate-forme Wally propose d’investir dans des projets de coliving via des achats d’obligations à partir de 10 euros. Doté d’une grande profondeur, le marché a pour particularité d’englober toutes les formes d’habitat serviciel, de la maison de centre-ville d’une dizaine de chambres aux grands paquebots, à l’image de la résidence Ecla, située à Palaiseau dans l’Essonne, qui offre mille-quatre-cents logements. Si 50 % de l’offre se concentre dans l’Ile-de-France, elle se développe aussi beaucoup en région. « Même dans les villes moyennes, où il y a un fort besoin de logements temporaires pour les actifs, le coliving a toute sa place », assure Bénédicte Coulon, responsable de marché chez Adéquation.
Rénover les actifs anciensEn se focalisant sur la rénovation des biens anciens, Colodge veut apporter une réponse à la pénurie de logements, conséquence de la crise de la construction.S’adressant aux investisseurs semi-professionnels, pour un ticket d’entrée de 100 000 euros, l’entreprise organise des clubs deals pour financer ses opérations. « Notre modèle consiste à transformer des maisons en espaces partagés de dix à vingt chambres et de créer de la valeur ajoutée après travaux, pour un rendement bonifié d’environ 20 % par rapport à une location classique», explique Thomas Schmider, fondateur de Colodge. Selon l’emplacement de ces actifs, le rendement délivré est compris entre 6 à 8 %. L’entreprise détient, en 2024, une petite trentaine de maisons situées dans toute la France et projette d’atteindre les deux-mille-cinq cents chambres, à terme. Elle a pour partenaires des entreprises comme OVH, Orange ou La Redoute qui louent, soit quelques chambres, soit l’intégralité de ces actifs pour loger leurs salariés. Spécialiste de la colocation, Colocatère, à travers sa marque Finvest Immo, propose une approche clé en main sur des petites surfaces dans l’ancien, à destination des primo-investisseurs en LMNP.Pour un ticket d’entrée à 100 000 euros, l’entreprise délivre un rendement triple net allant de 4 à 6 %. La gestion locative inclut des services personnalisés auprès des occupants, proches de la conciergerie. Présente dans trente villes françaises, l’entreprise s’engage, par ailleurs, à améliorer le DPE des biens qu’elle réhabilite. « Nous voulons avoir un coup d’avance sur les réglementations énergétiques et sur les conditions d’octroi de prêt immobilier, qui incluent désormais le DPE, appliquées par les banques », explique Christophe Baudat, directeur général du groupe Colocatère.
Fin de la récréation ?Si le coliving séduit les investisseurs grâce à ses actifs bien placés, la qualité de ses prestations, l’optimisation de ses surfaces et le montant de ses loyers, le modèle commence à soulever des critiques de la part des élus locaux, sur un marché locatif en forte tension dans les grandes villes.
Tout comme le régime LMNP et la location meublée, le marché pourrait voir, à l’avenir, son évolution freinée par un cadre réglementaire et juridique plus restrictif. Redoutant que les biens en colocation ne phagocytent l’offre locative et tirent les prix vers le haut, certaines villes, à l’instar de Lyon ou de Marseille, se sont clairement exprimé en faveur d’un durcissement de la législation. « Pour les appartements en coliving situés dans des copropriétés, il est fort à parier qu’à terme, une modification du cadre juridique vienne siffler la fin de la récréation », prévient Antoine Monnet, directeur des opérations value-add chez Aestiam, convaincu que ce type de biens ne pourra pas remplacer la totalité de l’offre de logement traditionnel.
Crowdfunfing et immobilier fractionnéOpter pour une solution de financement alternative est une aussi façon de diversifier sa stratégie d’investissement. Le crowdfunding, qui permet aux particuliers, à partir de 100 euros, de soutenir des projets de construction ou de rénovation immobilière d’envergure, avait le vent en poupe ces dernières années. Il fait désormais l’objet de fortes inquiétudes. Après huit années consécutives de croissance soutenue, le marché du crowdfunding immobilier a ralenti l’an passé en France, avec une collecte d’environ 1,16 milliard d’euros, contre 1,61 milliard en 2022 (-11,5 %).Arnaud Romanet-Perroux, le directeur général d’Upstone, en convient : la sortie du cycle haussier entre 2015-2022 sonne la fin de la martingale pour le financement participatif. Selon le baromètre publié par Mazars et FPF, le secteur a été confronté à une forte progression des opérations en retard, de 9 % à 35 %. « Face à des dossiers plus complexes, au blocage du marché bancaire et à la baisse de liquidité, une phase de correction des marchés s’est enclenchée avec des pertes annoncées et des opérations qui se débouclent mal, au mauvais moment », explique-t-il, rappelant que lorsque des placements rapportent, en moyenne, 10 à 12 % de rendement, le risque est nécessairement présent « Nous sommes dans la normalité du marché de l’investissement avec ses contractions et ses difficultés. Il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain ! », soutient-il.Si la situation a été tendue en 2023, il pressent une accalmie d’ici la fin de l’année. Dans un souci de diversification, Upstone a développé, en parallèle, une offre de refinancement hypothécaire.
Pour financer l’achat d’un bienEn 2023, le marché du crowdfunding a également été soumis à la réglementation européenne PSFP (prestataires de services de financement participatif) – un agrément permettant d’exercer cette activité – que quarante-cinq plates-formes françaises ont obtenu à ce jour. Parmi elles, Baltis, la plate-forme d’investissements alternatifs, entité du groupe Magellim, qui a financé soixante-trois projets et collecté 32 millions d’euros pour un rendement annuel prévisionnel moyen de 10,7 % en 2023. «Il s’agit d’une étape majeure qui protège davantage les investisseurs, fixe des règles communes et contribue au développement du marché à la fois en France et en Europe. Ce passeport européen ouvre des horizons nouveaux à toutes les plates-formes qui peuvent s’en prévaloir», souligne Alexandre Toussaint, président-fondateur de Baltis, qui regarde des opportunités d’investissement en Belgique, en Espagne et en Italie.Baltis s’apprête également à lancer une première opération dans l’immobilier fractionné, qui permet de financer l’acquisition d’un bien immobilier. Les investisseurs touchent un rendement mensuel adossé aux loyers du locataire ainsi qu’une plus-value potentielle à la revente.Le premier projet portera sur l’acquisition d’un local commercial situé au centre de Lille, actuellement loué à un restaurant. Prévue fin mars, cette opération vise à collecter 216 500 euros et sera accessible aux particuliers dès 1 000 euros. Les rendements annuels devraient s’établir entre 5 et 7 %. « Les modes de financement évoluent mais le sous-jacent immobilier reste le même », soutient Alexandre Toussaint.
Data centers, un actif alternatif en plein boomAla lisière entre l’immobilier et l’infrastructure, les data centers sont des actifs immobiliers au sein desquels sont stockées, traitées et échangées les données informatiques. Selon McKinsey, les montants investis dans la construction de data centers dans le monde devraient connaître une augmentation très élevée d’ici 2030 pour atteindre 49 milliards de dollars, soit près de 45 milliards d’euros, dont une part prépondérante serait adressée aux centres de données en colocation (73 %) et une part inférieure aux centres « hyperscales » (27 %), XXL (au moins cinq mille serveurs et 3 000 m2). A fin 2022, les rentabilités envisagées dans le marché des FLAP (Francfort, Londres, Amsterdam, Paris) auraient été entre 3,6 et 4,5 % selon Savills, tandis qu’aux Etats-Unis, le niveau de rentabilité le plus faible (4,5 %) a été atteint en mars 2022, lors du démarrage du conflit en Ukraine qui a affecté, notamment, la confiance des acteurs du numérique.En France, le baromètre EY estime que les investissements et dépenses directes et non directes dans les data centers sont de l’ordre de 879 millions d’euros en 2023 et devraient croître lors de la prochaine décennie, mais moins fortement (+4 % par an d’ici 2033):au total ce serait donc près de 12 milliards d’euros qui seront investis sur les dix prochaines années. Le fonds SC Pythagore, géré par la société Theoreim, a inclus les data centers dans son allocation logistique, représentant 30 % de son portefeuille. Parmi les opportunités d’investissements immobiliers identifiées par CBRE sur le marché parisien, figurent, en tête, les data centers hyperscales grâce au haut niveau d’offre de réseaux de transports de données et de connectivités, et à l’existence de nombreux clusters permettant de réduire la latence. L’Ile-de-France concentre ainsi cent-treize data centers sur les deux-cent-soixante-quatre recensés en France, et répond à une demande élevée de services du cloud.
Des bureaux-hôtels, « mieux qu’à la maison »Dans une logique d’hybridation des usages et des lieux, Comet a développé le concept de « bureau-hôtel », à savoir des espaces de travail ultra-serviciels et flexibles, s’adaptant aux besoins de chaque utilisateur. Avec un leitmotiv : créer des espaces de travail mieux qu’à la maison. Le confort, le cadre et les prestations traiteur, technique et bien-être en plus. Les entreprises y organisent leurs événements – séminaires, réunions, team-building, formations, etc. – pour la demi-journée minimum ou y louent des bureaux pendant douze à vingt-quatre mois. « Nous proposons de la restauration de qualité en continu et un accompagnement technique et humain pour fluidifier l’organisation de vos réunions et événements », explique Victor Carreau, cofondateur et CEO de Comet. Parmi ses clients, surtout des grands groupes du CAC 40 qui réservent jusqu’à cinq cents à six cents événements par an.L’entreprise sélectionne aussi bien des actifs prime et centraux que des actifs de bureaux « compliqués », obsolètes ou atypiques, pas nécessairement bien situés, qu’elle restructure et transforme en ERP (établissements recevant du public), sans en changer la destination. « La puissance de notre modèle est qu’il n’exige pas de lourde reconversion comme l’hôtellerie ou le logement. Chez Comet, nous travaillons donc avec succès sur des actifs bien localisés et demandés, comme nos sites de Paris 2, mais aussi sur des actifs plus excentrés et compliqués », souligne Victor Carreau.En partenariat avec Primonial, Comet a intégré 5 000 m2 de l’immeuble Lumière (Paris XIIe) et accueille désormais plus de quatre cents professionnels chaque jour. « Nous revitalisons les actifs et nous partageons la valeur avec les investisseurs », précise le CEO qui travaille également avec Amundi, BNP, Ivanhoé Cambridge sur des actifs détenus par des SCPI ou des foncières.
Aestiam, une approche value-add payanteInvestir hors des sentiers battus. C’est la philosophie d’Antoine Monnet, directeur des opérations Value Add chez Aestiam qui cible les actifs qui ne disposent plus de liquidités, positionnés sur des marchés désertés par les institutionnels et les particuliers. Bureaux situés en zones secondaires, retail parks de périphérie, bâtiments désaffectés sont ses terrains de jeux privilégiés pour aller chercher de la performance. Conclue dans le cadre de club deals, chaque opération de réhabilitation dure, en moyenne, deux ans et délivre des rendements pouvant atteindre les 15 %. La société de gestion a récemment investi dans la transformation de la zone industrielle du Vernouillet, à Dreux, composée de nombreuses enseignes commerciales discount. Pour cette opération, Aestiam table sur un TRI net de 20 à 30 %.